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1922

Les rues de Brest

par Ollivier LODEL

- Article 11 -


 

Auteur : Ollivier Lodel (*)

Les rues de Brest 11.jpg

 

Sources : La Dépêche de Brest 12 janvier 1922

 

RUE FRÉZIER

 

M. Frézier, directeur des fortifications, traça cette rue en 1740, dans la venelle appelée Petite rue de la Tête Noire, à cause de l'auberge du même nom qui se trouvait à l'encoignure actuelle de la rue Frézier et de la place Saint-Louis ;

la Poste aux chevaux y était établie en 1755.

 

Jusqu'à l'ouverture de la rue d'Orléans, en 1810, cette voie était la seule qui donnait accès de la Grand'Rue à l'église Saint-Louis.

 

Le nom de Frézier a été longtemps écrit comme s’il dérivait du mot « fraise » et l'Annuaire officiel de 1850 mentionne la rue Fraisier, comme, si elle devait son appellation au marché de fraises qui se tenait autrefois en ce lieu.

 

C'est cependant bien à l'ingénieur Frézier que la ville donna le nom de la nouvelle rue, en 1746, pour témoigner sa gratitude « au zélé Citoyen qui apporta ses soins et son talent à l'embellissement de Brest et au perfectionnement de l'église Saint-Louis ».

 

Frézier est connu par les relations de ses voyages, ses travaux d'architecture et, son fameux traité de la coupe des pierres.

Il devint, en 1739, directeur du génie pour la Bretagne et, en 1752, membre de l'Académie de marine.

 

Frézier habitait dans la rue qui porte son nom et y mourut, en 1773, à l'âge de 91 ans.

 

La rue Frézier fut le berceau de la famille Ozanne.

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Nicolas Ozanne

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Adrien Ozanne, le père de nos deux grands artistes brestois, avait épousé la fille de l'hôtelier de la Tête Noire, et c'est dans cette auberge que naquirent, Pierre et Nicolas Ozanne.

 

On connaît leur œuvre, largement, représentée au Musée de Brest, et retracée dans le très bel ouvrage de M. le docteur Ch. Auffret. (*)

 

(*) Une famille d'artistes brestois au XVIIIe siècle : Les Ozanne, par le docteur Ch. AufTret, Rennes, 1891.

 

À lire sur Retro 29 : Les Ozanne, une famille d’artiste - Cliquez ici

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Le crayon des Ozanne a rendu toutes les grandes scènes maritimes de la fin du XVIIIe et du commencement du XIXe siècle.

Il a contribué à immortaliser les luttes héroïques de la Surveillante, du Formidable, du Guillaume Tell, tous les hauts faits d'armes de ces brillantes escadres qui portèrent, bien haut, notre pavillon sur toutes les mers, de 1775 à 1810.

 

RUE GUYOT

 

La rue Guyot fut ouverte en 1750 pour établir une communication entre la Grand'Rue et le quartier Kéravel.

 

Elle reçut d'abord le nom de rue du Passage, auquel ne tarda pas à être substitué celui de M. Guyot, trésorier de la marine, qui habitait la maison de la Grand'Rue, n° 51, à l'angle de ce passage.

 

De là, vient, aussi qu'on l'appela longtemps rue du Trésor, puis rue de la Clef d'Or, parce qu'un serrurier, établi sur la place depuis 1830, avait pris pour enseigne une grande clef de bois doré que ses successeurs avaient conservée.

 

La rue Guyot fut nommée, en l'an II, rue des Vétérans.

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Dès 1790, les citoyens commissaires, chargés du recensement de la population, signalent comme habitant au n° 11 « un aubergiste, un peu suspect ;

Geneviève Chevalier, soi-disant sa femme et huit filles de 19 à 34 ans, toutes filles mondaines. »

 

Mais cette, rue n'est devenue mal famée que depuis la disparition du quartier des Sept-Saints.

 

La Société maçonnique de Brest fit édifier sa loge, en 1867, au n° 4 de la rue Guyot, sur un terrain dont elle était propriétaire.

Cet immeuble, qui porte toujours à son faîte l'écusson maçonnique : l'équerre et le marteau, fut converti en café-concert et est actuellement occupé par un atelier de serrurerie.

 

RUE JEAN-JACQUES ROUSSEAU

 

Cette rue a été tracée, comme la rue Ornou, dans vin grand terrain vague, appelé Parc-ar-Cornou que nous voyons compris, sur un plan de 1670, entre les glacis du Château et les rues actuelles : Émile Zola, Monge et Amiral Linois.

 

Vauban lui donna, en 1694, le nom de rue des Carmes ;

mais elle ne fut réellement ouverte qu'en 1762, sur la demande du commandant du Château, car, jusqu'alors, la Grand'Rue était la seule voie praticable aux voitures pour le service de la citadelle, « ce qui faisait un circuit d'un quart de lieue. »

 

La rue des Carmes prit, en l'an II, le nom de Jean-Jacques Rousseau. ,

 

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Dès 1805, nous trouvons rassemblées, dans la rue J.-J. Rousseau, les importantes maisons des négociants brestois : Larrue, Lorans, de Rivérieulx, Larrien.

 

C'est là aussi que l'imprimeur Pierre Anner, éditeur de plusieurs feuilles de nouvelles, en 1815, établit sa première imprimerie.

 

Pierre Anner dut, quelques années plus tard, transporter ses presses au n° 54, de la rue Royale (Louis Pasteur).

Son fils Édouard, fondateur, en 1832, du journal le Brestois, qui, l'année suivante, devint l'Armoricain (1833-1869) ; installa son imprimerie dans la cour du n° 32 de la rue Émile Zola.

 

RUE JEAN MACÉ

 

Vauban avait assigné à cette rue le nom de rue de la Rampe, toujours incrusté dans le granit de la maison qui forme l'angle de la rue Voltaire.

 

C'était, en effet, une côte rapide du vieux chemin qui, partant de Saint-Sébastien (rue Voltaire) descendait au domaine de Troujoly (église Saint-Louis) puis conduisait, par devant les Terrains de l'hôpital maritime, à Lambézellec et à Saint-Renan.

 

La rue fut d'abord ouverte de la Grand'Rue à la rue du Château et, jusqu'à la fin du XVIIIe siècle, on ne voyait du côté Est, que quelques hôtels dans son prolongement jusqu'au cours Dajot, longtemps appelé rue de la Rampe prolongée.

 

À droite, en effet, s'étendaient jusqu'à la rue voltaire, les jardins du Petit-Couvent puis, jusqu'au cours, un grand terrain vague qui servit aux ébats des enfants Jusqu'à la fin de l’Empire.

 

Cette place était connue sous le nom de Champ de pommes de terre, en souvenir de la culture qu'y avait faite la ville en 1794.

 

En ce temps de « vie chère », le représentant Laignelot avait autorisé les administrations municipales à porter le maximum du prix des denrées de première nécessité aux prix de 1790, augmentés d'un tiers, et « pour apporter un prompt remède à la cupidité et à la malveillance des possesseurs de bestiaux », il leur avait ordonné de cultiver le vingtième de leurs terres en pommes de terre, sous primé d'une amende double de leur contribution foncière.

 

Et pour donner l’exemple de l'obéissance à cet arrêté le conseil municipal avait décrété, le 8 germinal an II (28 mars 1794) que les terrains propres à la culture de la pomme de terre seraient mis en réquisition pour les besoins de la commune.

 

Ce n'est qu'en 1811, que M. Penaud, négociant, fit construire, sur ce terrain, la maison n° 14, occupée, jusqu'en 1877, par la Trésorerie générale.

 

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Plusieurs maisons de la rue Jean Macé méritent d'être mentionnées dans nos recherches d’histoire locale.

 

L'immeuble actuel des religieuses de la Retraite qui, en partant du cours Dajot, forme, à droite, l'angle de la rue Voltaire, fut, jusqu’en 1850, le bureau de la poste aux lettres.

 

II n’y avait alors, à Brest, que quatre boîtes :

au bureau de la rue de la Rampe, quai Tourville, place Médisance et au n° 59 de la rue de la Mairie.

 

Le courrier de Paris arrivait tous les jours, par malle-poste, de 10 heures du matin à une heure de l'après-midi, en été, et de une heure à 3 heures du soir, en hiver.

Celui de Nantes arrivait à 4 heures du matin.

 

La Malle de Paris partait à midi et effectuait son trajet en 53 heures.

Elle était disposée pour recevoir quatre voyageurs, qui payaient 1 fr. 50 par poste (soit, 4 fr. 50) pour Landerneau,

11 fr. 25 pour Morlaix, 26 fr. 65 pour Saint-Brieuc, 43 fr. 90 pour Rennes, 116 fr. 63 pour Paris) ;

chacun avait droit, franco de port, à un sac de nuit de 25 kilos.

 

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La maison n° 13 fut le domicile du célèbre ingénieur de la marine Choquet, de Lindu, et sa construction remonte à 1768, date gravée sur le linteau de la maison contiguë.

 

Quelques pas plus loin, au numéro 21, nous rencontrons l'un des plus beaux immeubles de la ville, actuellement occupé par l'administration de la Caisse d'épargne.

 

Cette maison et son grand jardin étaient la propriété, du glorieux chef d'escadre La Motte-Picquet. qui y mourut le 11 juin 1791.

 

Vendue, comme bien d'émigré, elle fut achetée 48.000 livres, en l'an II, par M. Guilhem, négociant, qui occupa les fonctions de président du tribunal de commerce de Brest et de député du Finistère.

 

« L’hôtel Guilhem » devint ensuite le siège de la Société des Vêpres, jusqu'à la dissolution de ce cercle, en 1891.

 

Au numéro 25 — l'hôtel actuel de la Dépêche de Brest — demeurait, en 1789, la jolie Dorbigny (*), marchande de modes, ex-première actrice du théâtre de Brest, l'infortunée amante du chevalier de Coatlès ;

et l'année, suivante, la maison fut louée à l'administration du Directoire du district, qui l'occupa jusqu'à son remplacement par le tribunal correctionnel, en 1795, et son transfert à l'hôtel Saint-Pierre.

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(*) Le Télégramme de Brest 28 juillet 2002

 1791. Dernier acte pour la Dorbigny - Le Télégramme

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(*) Olivier Lodel – Ollivier Lodel – Louis Delourmel

 

Source : Le Télégramme de Brest 7 mars 2003

 

Natif de Rennes en 1873, Louis Delourmel, après avoir satisfait à ses obligations militaires, devenait, en 1895, archiviste adjoint du département d'Ille-et-Vilaine.

En 1899, apprenant que le poste d'archiviste de la ville de Brest devient vacant suite à la démission du Dr Corre, il sollicite et décroche cette succession.

 

Jusqu'en 1939

 

Peu de temps après, le Dr Marion, bibliothécaire, décède.

Il brigue son remplacement et l'obtient contre la promesse d'achever l'histoire de la ville et du port commencée par P. Levot et de terminer l'inventaire du fond de l'Amirauté du Léon entamé par le Dr Corre.

Il est donc, à partir de 1900, archiviste bibliothécaire de la ville de Brest et le restera jusqu'en 1939.

 

Chroniqueur à « La Dépêche de Brest »

 

Outre ses nombreuses tâches que lui impose sa fonction, il présentera, pendant 40 ans, aux Brestois, dans les pages de la «Dépêche de Brest», sous le pseudonyme d'Olivier Lodel, de nombreuses études historiques.

En 1923, il publie « Une histoire anecdotique de Brest à travers ses rues », qui sera rééditée en 1946, sous le titre « Le vieux Brest à travers ses rues », illustrée par Pierre Péron.

Son œuvre maîtresse restera « Le Livre d'or de la ville de Brest », ouvrage inachevé mais imprimé.

Par ailleurs, il avait publié en 1909 un « Essai de bibliographie brestoise » et un « Brest pendant la Révolution ».

 

Conférencier remarquable

 

Secrétaire de la Société académique de Brest, il publie encore dans le bulletin de cette assemblée de nombreux articles et donnera aussi, lors de réunions, des conférences fort prisées.

Ses activités vaudront à Louis Delourmel, outre d'être devenu l'historien brestois, les décorations de la Légion d'honneur et des Palmes académiques.

Il disparaît le 12 juin 1944 dans sa propriété de Portsall où il s'était réfugié pour fuir les bombardements .

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