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1923

Les rues de Brest

par Ollivier LODEL

- Article 39 -
- Fin -


 

Auteur : Ollivier Lodel (*)

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Sources : La Dépêche de Brest 11 janvier 1923

 

Le nom d'Armand Rousseau rappelle le souvenir d'un grand citoyen.

 

Il est né à Tréflez (Finistère) le 24 août 1835, mais c'est à Brest, qu'il représenta pendant vingt-trois ans au conseil général, qu'il naquit à la vie politique.

 

Ingénieur administrateur, soldat, homme, politique, M. Rousseau laissa partout une trace éminente de son passage.

 

En 1870, on lui confia la direction des travaux de défense du Camp de Conlie, qu'il transforma rapidement en camp retranché de premier ordre.

Élu député en 1871, il devint l’un des membres les plus influents du groupe de la gauche républicaine, fut nommé sous-secrétaire d'État des Travaux publics en 1882 et sous-secrétaire d'État des Colonies, en 1885.

 

Aux élections générales d'octobre 1885, le rétablissement du scrutin de liste entraîna l'échec des candidatures républicaines dans le Finistère et Rousseau, arraché à la politique, fut nommé conseiller d'État.

Le gouvernement l'envoya à Panama pour constater l'état d'avancement du canal interocéanique et les possibilités d'achèvement de l'œuvre entreprise par M. de Lesseps.

Nul témoignage plus éclatant de confiance ne pouvait lui être décerné.

Il fut désigné, en 1894, pour succéder à M. de Lanessan, en qualité de gouverneur général de l’Indo-Chine, et, quelques mois après, les délégués sénatoriaux du Finistère, voulant acquitter envers M. Rousseau la vieille dette de la démocratie bretonne, le choisirent pour les représenter au Sénat.

 

M. Armand Rousseau mourut subitement à Hanoï le 10 décembre 1896 sans qu'il lui ait été donné de poursuivre, dans notre domaine colonial, son œuvre déjà féconde.

Sous son habile direction, en effet, la pacification du Tonkin devint suffisamment, complète pour permettre au gouvernement de consacrer la plus grande partie de ses efforts au développement économique du pays.

 

La statue d'Armand Rousseau fut inaugurée sur la place du Château le 26 juillet 1903, en présence de M. Maruéjouls, ministre des Travaux publics.

L'Indo-Chine en deuil, symbolisée par une femme coiffée du casque colonial vient, au pied de sa statue inscrire, le nom de son ancien gouverneur pour te transmettre à la postérité.

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À lire sur Retro29.fr : La mort d'Armand Rousseau

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Armand Rousseau

 

Une rue et une place de l'Annexion portent le nom de Sané.

 

Jacques Sané, né à Brest, le 18 février 1740, fut un ingénieur constructeur du plus grand mérite.

Les qualités nautiques des vaisseaux dont, il donna les plans ou surveilla l'exécution surpassaient ce qu'on avait vu jusqu'alors, et c'est pourquoi la réputation de Sané grandissait chaque jour.

 

Il devint directeur du port de Brest sous la Convention, ordonnateur sous le Directoire, inspecteur des constructions de la marine depuis Saint-Malo jusqu'à Bayonne sous le Consulat, officier de la Légion d'honneur et baron sous l'Empire.

 

C'est à Sané qu'on doit le plan-type du Pluton (1802), qui servit à la construction des petits vaisseaux de 74, ceux du Commerce de Paris et de l’Austerlitz (1808), modèles des navires de 110 canons et de 118 ;

puis, deux ans après, le plan de la Justice, d'après lequel on construisit un grand nombre de frégates.

 

Après soixante-trois ans de services, Sané fut mis à la retraite en 1817, brusquement et sans avis préalable, bien qu'il eût conservé toutes ses facultés.

Il en conçut un très vif chagrin qui ne fit que s'accroître avec les années.

 

Aussi combien furent grandes l'émotion et la joie de ce vieillard de 89 ans, lorsque, onze ans plus tard, en 1828, il vit entrer dans son cabinet le ministre de la Marine, qui venait le chercher pour le conduire aux Tuileries !

C'était-le roi Charles X qui avait voulu lui-même, en présence de ses ministres, attacher sur la poitrine du baron Sané la plaque de grand-officier de la Légion d'honneur.

 

Sané ne survécut que trois ans à cette réparation tardive.

Il mourut à Paris le 22 août 1831.

Dans le discours qu'il prononça sur sa tombe, Charles Dupin désigna à l'admiration et à la reconnaissance de la France celui qu'il appelait le « Vauban de la marine, l'homme, disait-il, que l'ancienne monarchie a encouragé, que la République a respecté, que les honneurs sont venus chercher et que l'estime toujours croissante de trois générations maritimes a comblé de ses hommages ».

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Jacques-Nöel Sané (1740-1831)

par Julien Léopold Boilly.

 

M. Sanquer — dont le nom a été donné à l'une des places du quartier de l'Annexion — naquit à Morlaix le 10 juillet 1841 et mourut, à Brest le 18 juin 1898.

 

Ancien capitaine du génie, il fut nommé conseiller municipal de Brest en 1882 et premier adjoint au maire en 1884.

Pendant, quatorze ans, M. Sanquer dirigea le service des travaux communaux.

Il contribua puissamment à l'embellissement de la ville, à l'amélioration de la voirie, à la construction et à la réfection de nos écoles.

On lui doit la tranchée, dans les fortifications, de la porte Fautras et la transformation des glacis en squares et jardins, qui sont encore la parure extérieure de Brest.

 

M. Sanquer était un administrateur intègre, et d'un dévouement, sans bornes, un républicain convaincu, épris de progrès, de liberté et de justice sociale.

 

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La rue Tourot honore la mémoire de Jean-Baptiste Tourot maire de Brest de 1799 à 1800 et de 1802 à 1808.

Lorsqu'il cessa ses fonctions, M. Miollis, préfet du Finistère, lui exprima « les sentiments de reconnaissance, de respect et d'amour auxquels il acquit de si justes droits, par une gestion infiniment probe et par un zèle le plus exemplaire, pendant tout le temps que dura son exercice ».

 

« Les qualités de M. Tourot, ajoutait-il, sont vraiment faites pour servir de modèle à tous ceux qui remplissent de semblables fonctions.

Et, le conseil municipal déclara que ce magistrat « avait bien mérité de la chose publique ».

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L'amiral Villaret-Joyeuse n'est pas né à Brest, mais c'est en vue de nos côtes que pour protéger un convoi de blé qui arrivait d'Amérique, il soutint pendant trois jours, en 1794 (prairial an II), contre l'amiral anglais Howe, une lutte inégale et terrible qui nous coûta 8.000 hommes et sept vaisseaux.

 

Son nom est désormais inséparable de l'héroïque bataille dans laquelle s'immortalisèrent les marins du Vengeur.

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L'amiral Villaret-Joyeuse

 

Hippolyte Violeau est un enfant de Brest ; il y naquit, le 13 juin 1818 et y mourut le 24 avril 1892.

 

C'était un poète délicat et fleuri, un conteur élégant, spirituel et disert, Violeau publia son premier ouvrage, les Loisirs poétiques, en 1841.

Les années suivantes, il adressa ses vers à l'Académie des Jeux Floraux, à Toulouse, où ils obtinrent les fleurs poétiques, souvenir de Clémence Isaure et à cette occasion, la ville de Brest, qui suivait ses succès avec attention, lui fit présent d'un coffret contenant mille francs en pièces d'or.

 

En 1848, il publia le livre intitulé Les mères chrétiennes, qui fut, couronné par l'Académie française.

Puis vinrent successivement les Paraboles, Amice de Guermeur, les Veillées bretonnes, les Récits du foyer, la Maison du cap, que l'on a souvent comparé, pour le style et l'exécution, à Paul et Virginie, de Bernardin de Saint-Pierre,

et enfin les Surprises de la vie, livre qui passe pour le plus remarquable de ses ouvrages.

 

Hippolyte Violeau renonça de bonne heure à la littérature, jugeant sans doute que son œuvre était achevée.

 

Les vingt dernières années de sa vie s'écoulèrent dans les joies du foyer et dans les affections d'une famille à laquelle il était profondément dévoué.

Il aimait à recevoir dans sa maison, rue de Paris, n° 14, en Lambézellec, quelques amis fidèles que charmaient son fin talent de causeur et son esprit toujours alerte et délicat.

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À lire sur Retro29.fr : Hippolyte Violeau - Écrivain Brestois

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La rue André Portail et la place Paul Léonnec rappellent le nom de deux artistes brestois.

 

Jacques-André Portail, longtemps considéré comme Nantais — il passa, en effet, toute sa jeunesse à Nantes, où son père fut nommé, architecte-voyer en 1705 — naquit à Brest, côté de Recouvrance, le 4 septembre 1695.

 

Découvert et enlevé à la province, par le surintendant des beaux-arts Orry de Vignory, Portail parvint, à acquérir une valeur artistique, et un talent qui devaient faire de lui un des plus délicieux maîtres du XVIIIe siècle.

 

« Ce magicien de la sanguine et de la pierre noire, écrit M. A. de Lorme dans son étude sur Jacques-André Portail (*), a su, par son habileté prestigieuse à manier le crayon, par le sentiment délicat et l'élégance qui règnent dans ses œuvres, nous faire revivre dans tout leur éclat les merveilleuses fantaisies du règne de Louis XV et rivaliser ainsi avec Watteau, Nattier et Lancret.

Il montre dans ses dessins avec une sûreté de coup d'œil incomparable et un véritable génie pour saisir les altitudes, une précision et une douceur qui en font de petites merveilles de poésie, de vérité et de charme pénétrant. »

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(*) L'art à Brest au XVIIIe siècle par A. de Lorme (Bull. de la soc. acad. de Brest, tome XXV, 1900).

 

Modeste et sans grande ambition, Portail devint dessinateur du Roi, garde des tableaux des musées de la couronne et arriva comme en se jouant à la renommée.

 

La ville de Brest peut être fière de le compter parmi ses enfants.

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Jacques-André Portail (français, 1695 - 1759)

La lecture

 

Issu d'une famille de marins, Paul Léonnec né à Brest le 27 août 1842, entra au service à l'âge de 18 ans comme écrivain du commissariat, et franchit lentement les divers degrés de la hiérarchie pour obtenir deux ans avant sa mort — 4 octobre 1899 — le grade d'agent principal.

 

C'est vers 1868 qu'il fit paraître, dans la montre de la petite librairie Imbert, (au n° 63 de la rue de Siam) un premier dessin :

Matelots en patrouille, « et l'on se pressait nous raconte M. le docteur Charles Auffret (*), pour voir à la vitrine ces cinq matelots sur deux rangs, « éméchés », sinon gris, le visage empourpré, l'œil émerillonné ou éteint, suivant le cas, festonnant de guingois, qui du pied gauche, qui du pied droit, « à la recherche des pochards », chacun au pas du nombre de « bougearons » qu'il avait absorbés, précédé d'un inénarrable sergent-major coiffé de la casquette à baleine, leur scandant la marche en veillant, en grain ».

 

Devant cette étonnante « ronde de jour » observations et lazzis allaient leur train :

« Est-y Dieu possib' de se moquer ainsi des povs per's de famille », disaient les bonnes femmes d'un air ahuri.

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(*) Le dessinateur Paul Léonnec (Brest, 1910)

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Paul Léonnec avait 28 ans quand le Journal amusant donna asile à ses premiers dessins.

Nadar qui y avait travaillé, disait :

« Il n'y a dans ce journal que deux illustrateurs : Mon ami Grévin et Léonnec »,

qui y eut une place marquée jusqu'à sa mort.

 

En 1884, il illustra le fameux Patata et Bredindin, aventures et mésaventures de deux gabiers en bordée

(Brest, imprimerie Proux 1843), et orna de délicieuses aquarelles certains exemplaires de la Mer, de Richepin ;

Pêcheur d'Islande, de Loti, et Gens de mer de Tristan Corbière.

 

Ces ouvrages, hautement appréciés des bibliophiles, sont aujourd'hui très recherchés.

 

Paul Léonnec habita pendant plus de trente ans la maison n° 12 de la rue Algésiras.

II était l'oncle de l'aspirant P. Léonnec qui fut fué à Sfax et son fils, G. Léonnec est l'excellent dessinateur de la Vie parisienne.

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(*) Olivier Lodel – Ollivier Lodel – Louis Delourmel

 

Source : Le Télégramme de Brest 7 mars 2003

 

Natif de Rennes en 1873, Louis Delourmel, après avoir satisfait à ses obligations militaires, devenait, en 1895, archiviste adjoint du département d'Ille-et-Vilaine.

En 1899, apprenant que le poste d'archiviste de la ville de Brest devient vacant suite à la démission du Dr Corre, il sollicite et décroche cette succession.

 

Jusqu'en 1939

 

Peu de temps après, le Dr Marion, bibliothécaire, décède.

Il brigue son remplacement et l'obtient contre la promesse d'achever l'histoire de la ville et du port commencée par P. Levot et de terminer l'inventaire du fond de l'Amirauté du Léon entamé par le Dr Corre.

Il est donc, à partir de 1900, archiviste bibliothécaire de la ville de Brest et le restera jusqu'en 1939.

 

Chroniqueur à « La Dépêche de Brest »

 

Outre ses nombreuses tâches que lui impose sa fonction, il présentera, pendant 40 ans, aux Brestois, dans les pages de la «Dépêche de Brest», sous le pseudonyme d'Olivier Lodel, de nombreuses études historiques.

En 1923, il publie « Une histoire anecdotique de Brest à travers ses rues », qui sera rééditée en 1946, sous le titre « Le vieux Brest à travers ses rues », illustrée par Pierre Péron.

Son œuvre maîtresse restera « Le Livre d'or de la ville de Brest », ouvrage inachevé mais imprimé.

Par ailleurs, il avait publié en 1909 un « Essai de bibliographie brestoise » et un « Brest pendant la Révolution ».

 

Conférencier remarquable

 

Secrétaire de la Société académique de Brest, il publie encore dans le bulletin de cette assemblée de nombreux articles et donnera aussi, lors de réunions, des conférences fort prisées.

Ses activités vaudront à Louis Delourmel, outre d'être devenu l'historien brestois, les décorations de la Légion d'honneur et des Palmes académiques.

Il disparaît le 12 juin 1944 dans sa propriété de Portsall où il s'était réfugié pour fuir les bombardements .

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