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1962

Potins du port de Brest
des années 1760

 

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Source : Marine d'Octobre 1962

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Recueillis par le C.V. (R) LABARÈRE au cours de son commandement de l'École des E.O.R.

 

1756 - Jugement de trois déserteurs.

 

Le 5 juillet 1756, Jean Lias, dit « Bonaventure », Jean Bidaou, dit « Lebrun », Jean-Louis Dupuis, dit « La Douceur », soldats déserteurs du régiment de la Marine, repris et jugés, sont condamnés à la peine de mort.

Suivant la tradition, les condamnés tirent au sort.

Le sort est fatal à Jean Bidaou, dit « Lebrun », qui, sur le front des troupes assemblées au champ de bataille, est passé par les armes.

Ses deux camarades, Jean Lias, dit « Bonaventure » et Jean-Louis Dupuis, dit « La Douceur » voient leur peine commuée en galères à perpétuité.

 

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1756 - La langue anglaise.

 

C’est du 20 septembre 1756 que date la décision royale qui rend obligatoire l’étude de la langue anglaise chez Messieurs les gardes de la Marine.

Ces Messieurs protestent par un solide carillon dans les rues de Brest.

 

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1757 - Celui-ci a eu le malheur de le tuer !

 

Monsieur de Monti, garde de la Marine, est occis en duel qu’il a livré le vendredi à un enseigne de vaisseau.

Le 23 janvier 1758, Monsieur le Comte Duguay, commandant la Marine, rend compte :

« Une aventure malheureuse, arrivée vendredi dernier à Monsieur du Chafford de Lestrediagat, enseigne de vaisseau, m’engage à vous demander pour cet officier un ordre de passer au Département de Toulon. »

La prudence elle-même ne serait point à l’abri de certaines affaires.

Monsieur de Monti, garde de la Marine, à propos de rien, a insulté de la façon la plus vive Monsieur de Lestrediagat.

Celui-ci a eu le malheur de le tuer.

Comme Monsieur de Monti a ici un frère et trois cousins germains, vous devez sentir, Monseigneur, combien il est de la prudence d’assoupir cette affaire par l’éloignement de Monsieur de Lestrediagat... ».

 

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1758 - Le prisonnier oublié.

 

C’est par oubli que le sieur de Reals, depuis le décès de Monsieur son père, est toujours détenu au château du Taureau.

C’est sur la demande de feu son père qu’il y fut enfermé.

La vie crapuleuse qu’il menait à Brest comme garde de la Marine et le mariage honteux qu’il était sur le point de contracter étaient, il y a dix ans, des motifs bien suffisants.

Ces dix ans de détention paraissent suffisants aussi pour lui avoir fait faire des réflexions sur sa conduite passée.

D’après les témoignages de Monsieur Delort, commandant du château du Taureau, son maintien peut faire présumer qu’il est revenu à lui-même.

 

Que va-t-on faire de lui ?

Il a des frères dans le service qui méritent des considérations.

Peut-il reprendre du service dans la Marine ?

En attendant, il est libéré et se rend chez lui au château de la Noix Verte, près Morlaix.

Finalement, Monsieur de Reals est écarté de la Marine, mais il reçoit une retraite de trois cents livres sur les Invalides.

 

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1758 - Les prérogatives des colonels.

 

Voici qu’à Brest les colonels prétendent avoir le pas sur les capitaines de vaisseau dans ce port.

Le corps proteste pour le bien de l’État, pour la gloire des armes du Roy, pour l’honneur du corps de la marine, afin d’avoir sans aucune restriction les mêmes honneurs, rangs et prérogatives.

Pendant que l’on discute, les mauvaises langues prétendent que le cutter britannique de découverte est entré en rade et en est sorti sans être soupçonné d’être ennemi.

Le débarquement de Cancale, heureusement suivi du rembarquement de douze mille anglais, fait cesser le 10 juin 1758 ces querelles intestines.

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1758 - Les rations.

 

Les capitaines de vaisseau perçoivent, suivant le rang de leur bâtiment, 26, 24 ou 22 rations.

Pour leurs passagers, ils ont cinq rations par personne et huit pour la campagne d’Amérique.

Les lieutenants de vaisseau, eux, perçoivent 16 ou 12 rations.

 

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1759 - Monsieur le curé reste seul.

 

Messieurs les Anglais sont d’une hardiesse inouïe.

Ils font le 15 septembre 1759 une descente sur l’île de Quéménès, enlèvent tous les bœufs et chevaux de l’île.

Monsieur le curé de Molène est sommé par les Anglais de livrer soixante bœufs sous les deux heures, sous peine de voir abattre toutes les maisons de l’île.

Les habitants sautent dans les embarcations et laissent Monsieur le curé tout seul.

 

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1761 - Les rats occasionnent des voies d’eau.

 

L’Éclatant joue depuis de nombreuses années le métier d'amiral.

Embossé sous le château, il accueille les gardes de la marine turbulents, les officiers qui se livrent au jeu, font des dettes, rossent les fermiers ou les huissiers.

L’Éclatant est maintenant pourri ; on accuse les rats d’occasionner des voies d’eau que la pompe du bord ne peut plus franchir.

 

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1763 - La visite surprenante.

 

Le Ministre ne dissimule pas sa surprise d’apprendre indirectement que la corvette du roi d’Angleterre le Burton, armée de six canons, est venue à Brest.

Il sait que le sieur J. Mortimer, qui la commande, est descendu à terre, avec Monsieur Ormsby, membre du Parlement et deux irlandais, qu’ils ont visité l’arsenal, les bassins, le bagne.

Aussi le Ministre témoigne son mécontentement à Monsieur de Roquefeuil, commandant la Marine et à Monsieur Hocquart, intendant.

 

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1764 - L’hôtel du Commandant de la marine.

 

Monsieur de Roquefeuil propose de transférer l’hôtel du Commandant de la marine dans la maison cy-devant des jésuites.

Elle a la meilleure vue sur les signaux de la rade et du port, un escalier y donne accès.

 

Sa proximité des casernes, de l’hôtel de ville, du bagne, de la manufacture des toiles la rend très propre à cet usage.

Elle a l’avantage d’avoir sa chapelle et un beau jardin, mais surtout d’offrir un salon à manger et un salon de compagnie.

C’est par là que pêche l’hôtel d’aujourd’hui, fort commode pour un particulier, mais où on est obligé de manger dans l’antichambre et de partager le monde en plusieurs salons.

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1764 - Levée de contributions.

 

Une femme est venue à pied de Strasbourg pour chercher son mari galérien.

Celui-ci est condamné pour « avoir levé quelques contributions sur les faiblesses de sa femme ».

On voit qu’elle ne lui en tient plus rigueur...

 

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1765 - Scandale menuisier.

 

Monsieur de Clugny, qui a remplacé Monsieur Hocquart à l’intendance, vient de faire cesser le scandale de la menuiserie.

Sur cinquante menuisiers, tel commissaire en avait deux ou trois chez lui, tel écrivain autant.

Tel autre pouvait faire à l’atelier une armoire ou un bureau.

Ces abus sont venus à la connaissance publique.

 

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1766 - Relâche de M. de Bougainville.

 

Le 18 novembre 1766, Monsieur de Bougainville fait à Brest une courte relâche avec La Boudeuse.

 

Il est déjà loin lorsque parvient l'ordre pour lui de renvoyer à terre et d’y laisser en liberté les frères Héricourt, hautbois et flûte, qu’il a engagés mal à propos pour sa campagne.

Ces deux musiciens ont, en effet, un engagement avec le sieur Bernand, entrepreneur de spectacles de la province de Bretagne.

Il comptait sur eux pendant la prochaine assemblée des États...

 

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1766 - Le port marchand.

 

Le port marchand et le port de guerre se confondent.

Les étrangers en profitent pour nous observer.

L’idée de Monsieur de Roquefeuil, commandant la Marine, est de faire à l’extérieur un petit port marchand par le moyen d’une jetée.

Ceci éviterait ces visites de curiosité...

 

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1767  - Le forçat usurier.

 

Le Ministre a reçu requête d’un forçat de Brest, n° 2010, contre trois officiers du régiment de Vermandois.

Ce forçat leur a prêté de l’argent sous d’apparentes promesses de l’aider à recouvrer la liberté et il ne voit rien venir.

L’indignation de Monsieur de Choiseul est grande :

« L’emprunt d’argent auprès d’un malheureux de cette classe annoncerait dans ces officiers des sentiments peu conformes à la noblesse de leur état, mais ce serait le comble de la bassesse, si c’était vrai qu’à l’indécence de l’emprunt ils eussent ajouté le refus du remboursement. »

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