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1940 - 1944
Chroniques d'occupation


10 septembre 1940

Jour 84
 

 

Après pasteurisation, le lait de la traite du matin — nous l'avons vu hier — est livré à la consommation.

Le lait du soir sert à la fabrication du beurre.

 

Ce lait, après avoir été pesé et filtré, passe sur un réchauffeur qui porte sa température de 25° à 28°.

Une canalisation le conduit ensuite aux écrémeuses, qui opèrent à raison de 3.000 litres à l'heure.

 

Au moyen de la force centrifuge la crème passe ensuite dans appareil réfrigérant dans des tubes refroidis par un courant d'eau saumurée.

La crème en coule onctueuse et jaunâtre, et, refroidie à 10°, se déverse lentement dans un bac d'une contenance de 1.80O litres,

 

Le récipient de ce bac est à double paroi.

Il y circule, l'été, de l'eau froide ;

l'hiver, de l'eau tiède, de sorte que la crème est maintenue, pendant une vingtaine d'heures, à la température de 18°, pour lui donner la fermentation voulue, « la faire mûrir ».

 

Par une tuyauterie inoxydable, la crème tombe ensuite dans la baratte, énorme cylindre , de rouleaux malaxeurs, pouvant contenir 2.500 litres de crème, mais que l’on n'emplit qu'à moitié.

 

La baratte est mise en marche.

Tous les appareils sont mus par des moteurs que le manque de combustibles va obliger à remplacer par le courant électrique à haute tension.

 

Les globules gras de la crème sont jetés les uns contre les autres, du fait de chocs répétés et s'agglutinent.

Par des lunettes, percées dans les parois de la baratte, on suit la formation du beurre.

 

Au bout d'une vingtaine de minutes, les grumeaux se présentent sous forme de granulations au milieu du liquide, où ils surnagent, puis se soudent en masses de plus en plus volumineuses.

 

On élimine alors le petit lait ou babeurre et on emplit d'eau fraîche la baratte.

On en accélère la vitesse.

La rotation provoque l'agitation et les chocs nécessaires pour l’agglomération des globules gras de la crème.

 

L'eau du premier lavage est alors changée.

Le mouvement de rotation est ralenti.

Les rouleaux malaxeurs ont purgé le beurre des dernières traces de babeurre et de l'eau de lavage.

 

Il passe alors sur le malaxeur, table ronde en bols plat, légèrement convexe, sur laquelle se meut un rouleau cannelé.

On fait passer le beurre plusieurs fois entre la table et le rouleau.

Jusqu'à ce que sa pâte soit d'aspect uniforme.

On ajoute la quantité de sel pour le beurre demi-sel qui est mis en mottes et placé dans un local très aéré et très frais, où il s'assèche complètement.

Il est ensuite comprimé en pains de 250 ou 500 grammes, enveloppés dans des papiers portant, le mot Even en lettres rouges, pour le beurre sans sel en bleu pour le beurre demi-sel

 

Les 250.000 litres de lait transformés ainsi ne fournissent guère que 10.000 kilos de beurre.

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La laiterie de Ploudaniel le vendait à ses dépositaires, jusqu'à la parution au Journal Officiel du fameux arrêté ministériel du 20 août, 26 fr. 75 le kilo.

Depuis le décret, elle a porté ce prix de gros à 27 fr. 25, et les dépositaires doivent le vendre actuellement 28 fr. 50. soit 14 fr. 25 la livre, conformément à la taxation.

 

— Comme vous le voyez, nous dit le directeur de la coopérative laitière de Ploudaniel, il est plus avantageux pour nous de vendre un litre de lait qu'une livre de beurre, mais nous pouvons garantir celui-ci comme étant de toute première qualité, extra-fin, sans sel ou demi-sel, au choix, et ne contenant que de la matière grasse.

 

HAUSSE INJUSTIFIÉE

 

Dans ces conditions, il paraît inadmissible que les grossistes se permettent de prétendre vouloir vendre au prix du beurre de laiterie le beurre de ferme, qui est loin d'avoir les mêmes qualités, puisque le prix maximum du beurre fermier malaxé, de qualité — celui vendu sur nos marchés — a été taxé 24 francs le kilo (12 francs la livre), alors que le prix du beurre de laiterie est fixé à un maximum de 27 fr. 50 (13 fr. 75 la livre).

 

Les consommateurs qui, samedi dernier, ont payé Jusqu'à 16 francs à Landerneau, 14 et 15 francs à Saint-Renan, et hier matin, au marché de la place Marcelin Berthelot, à Brest, 14 et 15 francs la livre de beurre, ont donc provoqué une hausse injustifiée et faussé les cours, puisque même aux halles centrales de Paris — où il faut tenir compte des prix de transport élevés les prix de vente maxima, répétons-le, sont ainsi fixés:

Beurre de laiterie, charentais ou similaires, le kilo, 31 francs ;

Beurres fermiers malaxés, 1ère qualité, 29 fr. 50; 2e qualité, 27 fr. 50.

 

UNE CIRCULAIRE DES GROUPEMENTS INTERPROFESSIONNELS LAITIERS

 

Le comité central des groupements interprofessionnels laitiers a adressé une circulaire aux directeurs de laiteries, dont nous extrayons les passages suivants :

 

La décision ministérielle du 20 août (taxation du prix du beurre) prise sur notre proposition, après accord avec les autorités supérieures allemandes, en vue d'encourager la production laitière, a fixé les prix de gros des produits laitiers à partir du 25 août.

 

Il nous revient que cette décision ministérielle se heurterait à des refus d'application de certaines autorités, « continuant trop souvent une politique sectaire anti-paysanne ».

 

Les prix fixés constituent le minimum vital absolument indispensable, dans les circonstances actuelles, pour les producteurs de lait.

Nous vous prions donc de ne rien expédier sur aucun marché qui ne vous les garantirait pas.

 

Le prix minimum du lait à la ferme, pour la deuxième quinzaine d'août, a été fixé à un franc dix centimes le litre pour encourager la production agricole.

 

Tout le monde est d'accord pour reconnaître que le cultivateur doit recevoir la juste rémunération du prix de ses peines, mais tout le monde s'étonne que l'on ne respecte pas les prix maxima établis et que certains intermédiaires veuillent abuser de la situation pour faire payer plus cher que les beurres extra des beurres de 2e qualité.

 

Cette hausse injustifiée ne pourrait s'expliquer que par la menace de l'institution d'une carte de beurre, incitant certains consommateurs à en faire des provisions et aussi par la rareté de l'apport du beurre, par suite de l'interruption du service du bateau du Fret, qui a empêché les marchandes de la presqu'île de Crozon de venir, comme tous les lundis et vendredis, au marché de la place Marcelin Berthelot.

 

Au Bouguen

 

Nous avons relaté, hier, comment samedi, vers 20 h. 30, un homme s'était livré à des actes répréhensibles à l'égard d'une fillette de 7 ans, qui jouait, avec deux petites amies, place du Marchallach.

 

Peu de temps après, la fillette, qu'accompagnait sa mère, avait reconnu devant le débit Quéinnec, place Traoulen, l'homme qui l'avait abordée place du Marchallach.

 

Il s'agissait du nommé J..., âgé de 27 ans, de Plougonven, qui fut aussitôt appréhendé par les agents de police.

 

J... fut interrogé par M. Rocher, commissaire de police, à qui il protesta de son innocence.

 

Cependant, tous les témoins, sauf un petit garçon de 11 ans, l'avaient formellement reconnu comme étant l'homme qui s'était signalé à leur attention samedi soir.

 

Pressé de questions, J... déclara qu'ayant  été récemment démobilisé, il était venu samedi, en autocar, à Morlaix, dans le but d'y faire des courses et d'y toucher sa prime de démobilisation.

 

N'ayant pu repartir par le car de 18 heures, et attendant celui de 20 heures, il s'était rendu aux waters de la place du Marchallach.

C'est là qu'il avait eu des gestes déplacés à l'égard de la fillette.

 

Étant revenu place Traoulen pour attendre son car, et alors qu'il se trouvait devant le débit Quéinnec, la mère de la gamine était venue le rejoindre et lui avait administré une magistrale paire de gifles.

 

J... a été déféré hier après-midi au parquet.

Il a été interrogé par M. Botrel, juge d'Instruction, qui l'a confronté avec les témoins.

Il a affirmé n'avoir eu aucune mauvaise intention en faisant les gestes qu'on lui reproche.

Il a été néanmoins placé sous mandat de dépôt et conduit au Bouguen, à Brest.

 

Cette foire fut beaucoup plus Importante que celle du 29 août, tout au moins en ce qui concerne le nombre des animaux amenés.

Les marchands et amateurs étaient nombreux également.

 

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Très beau choix au marché porcin, principalement en laitons et truies pleines.

Celles-ci furent d'abord très mollement demandées.

Presque toutes furent vendues cependant entre 1.200 et 1.700 fr.

 

Assez peu de coureurs valant entre 450 et 500 fr. pièce, en marchandise de moyenne grandeur, prête pour l'engraissement.

 

Les laitons de 6-8 semaines, vu leur nombre, débutèrent difficilement autour de 350 fr. la couple.

En fin de compte, quelques paires atteignirent 500 fr., les plus nombreuses ventes étant conclues aux environs de 400 fr.

Petite relève dans ce compartiment.

 

Les porcs de qualité charcutière firent 15 fr. le kilo de viande nette.

 

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On ne vit guère de bovins gras à cette foire.

Quelques bouchers, venus chercher des veaux au marché hebdomadaire de Lesneven, quittèrent bientôt cette place où, sur le petit nombre des sujets amenés, opéraient à la hausse, loin de la taxe, quelques ravitailleurs étrangers à la région.

C'est ce qui explique la présence de plusieurs bouchers régionaux au Folgoët.

 

Les bonnes vaches laitières étaient relativement rares.

On demandait plus de 4.500 fr. des meilleures.

Mais très peu dépassèrent ce prix.

On pouvait encore se procurer quelques bons sujets de rapport entre 3.000 et 3.500 fr., notamment des vaches plus ou moins tardives et de gabarit moyen.

Un certain nombre de bonnes génisses pleines furent vendues entre 3.000 et 3.500 fr.

D'autres vaches de second ordre, achetées par les revendeurs aux récentes foires cornouaillaises, étaient cédées entre 2.500 et 2.800 fr.

 

De toute évidence, le plus gros intérêt de cette grande réunion se trouvait concentré sur les animaux d'espèce chevaline dont il fallait voir, au Folgoët, les meilleurs échantillons de tout le Bas-Léon.

 

Le plus beau lot était certainement constitué par des juments dont la plupart auraient dignement figuré dans un concours.

On demandait au-delà de 20.000 fr. les meilleures.

 

La demande fit montre de la plus grande réserve et peu de transactions furent conclues de bonne heure dans ce compartiment.

Les juments de moyenne qualité étaient celles qui se négociaient le plus facilement, entre 13.000 et 15.000 fr. pièce.

Assez forte relève cependant, laquelle s'étendit également aux forts limoniers de Kerlouan et Plounéour-Trez et dont quelques unités se vendirent entre 18.000 et 20.000 fr.

 

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La plus forte présentation était peut-être celle des pouliches nées en 1939.

Là encore assez peu de demandes.

On offrit entre 6.000 et 10.000 fr., rarement davantage.

l en fut à peu près de même dans le rayon des poulains d'un an, dont la qualité moyenne était inférieure à celle des pouliches de même âge.

 

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Les produits de l'année se vendaient beaucoup plus facilement entre 2.500 et 4.000 fr., dans la qualité commerciale.

Les pouliches de cet âge sont relativement rares et très recherchées.

Plusieurs approchèrent des cinq billets de mille.

Presque tous les laitons furent vendus.

 

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Devant les trop nombreuses ventes effectuées sur les routes, la gendarmerie de Lesneven, présente sur les lieux, intervint avec énergie.

Et plusieurs marchands se virent de ce fait, gratifiés d'un procès-verbal.

 

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En somme, cette foire du 9 septembre marque un temps d'arrêt dans la course aux prix, de plus en plus élevés.

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