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1940 - 1944
Chroniques d'occupation


2 septembre 1940

Jour 76
 

 

Nous avons signalé l'acte de sabotage commis il y a huit jours par une bande de jeunes gens, qui arrachèrent un fil téléphonique placé par les troupes d'occupation, près du pont Albert Louppe.

 

Après une première enquête ouverte par la gendarmerie de Landerneau, qui permit d'établir que certains des auteurs du méfait habitaient Saint-Marc, le gendarme Gloaguen, des brigades de Brest, fut chargé de retrouver les coupables.

 

Ses investigations ont abouti rapidement à l'arrestation de douze jeunes gens, âgés de 15 à 19 ans, dont quatre habitent Brest et huit la commune de Saint-Marc.

 

Toute la bande a été amenée à la gendarmerie de la rue Portzmoguer.

 

Louis K..., 15 ans, apprenti boulanger, et Albert K..., 16 ans, électricien, reconnurent avoir coupé à l'aide d'un couteau le fil téléphonique.

 

L'autorité militaire allemande mise au courant de ces arrestations, a ordonné le transfert immédiat des douze jeunes gens à la prison de Pontaniou.

 

Par ces temps de grande sécheresse — pas une goutte d'eau n'est tombée dans la région depuis plusieurs semaines — les incendies dans les bois et taillis des environs de Landerneau deviennent nombreux par suite vraisemblablement d'imprudences commises par des fumeurs ou des promeneurs.

 

Hier après-midi, vers seize heures, une abondante fumée, chassée par des vents d'est, s'abattait sur la rive gauche de l'Elorn et se répandait dans les rues du quartier Saint-Thomas.

 

On apprenait bientôt qu'un incendie ravageait les taillis qui surplombent la route nationale Brest-Morlaix, en face de la Roche-Maurice.

 

Les gendarmes de la brigade se sont rendus sur les lieux et ont organisé les premiers secours.

 

Les pompiers de Landerneau ont été appelés téléphoniquement.

 

Le feu s'étend dans la direction de plusieurs habitations.

 

Nous avons dit hier que samedi soir on apercevait de Landerneau une fumée noire bouchant complètement l'horizon à l'ouest, et provenant des environs de la route de Quimper, sur le territoire de la commune de Dirinon.

 

À 19 heures, du secours était réclamé à la ville de Landerneau, l'incendie, menaçait l'importante ferme et le château de Kerlézérien.

 

Immédiatement, les pompiers et les hommes de service de la troupe d'occupation furent alertés, pendant que le tocsin se faisait entendre au clocher de l'église Saint-Houardon.

 

La plus grande partie de la population landernéenne, mise en émoi par cette sonnerie, qui n'avait pas été entendue depuis une vingtaine d'années dans la localité, s'empressa de se rendre à pied ou à bicyclette vers le lieu du sinistre où les pompiers, sous les ordres du lieutenant Kerbrat, et les militaires allemands, après près de quatre heures de travail, parvenaient à protéger manoir et ferme et à se rendre maîtres du feu.

 

Les dégâts sont importants.

 

Une enquête a été ouverte par les gendarmes de la brigade.

 

Une fausse alerte

 

Pendant qu'on achevait d'éteindre l'incendie à Kerlézérien, on prévenait les pompiers que le feu venait de se déclarer route de Brest, près de la Grande Palud.

 

C'était, fort heureusement, une fausse alerte et nos braves sapeurs s'aperçurent à leur arrivée au lieu indiqué, qu'il s'agissait tout simplement d'un cultivateur qui faisait brûler des mauvaises herbes dans un champ bordant la route nationale.

 

Il y a une huitaine de Jours, le thonier Fleur de Saint-Joseph, de Port-Louis, débarquait au grand port l'un de ses hommes d'équipage, Jean-François Guillevin, né le 16 octobre 1908 à Riantec (Morbihan), père de deux enfants, dont la femme, née Claquin, est récemment décédée à Plouhinec.

 

Guillevin logeait dans une pinasse près de laquelle vint mouiller ces jours derniers le dundee Le Ver-Luisant.

 

Guillevin offrit ses services à bord pour le débarquement du poisson.

Il assista aussi au partage de la recette, qui s'élevait à 2.300 francs par homme.

 

Le patron lui remit 20 francs et l'autorisa à coucher dans l'entrepont, près de ses matelots.

 

Le lendemain, l'un de ceux-ci, Robert Rault, d'Auray, rue du Quai Neuf, s'aperçut que son avoir, soit 2.265 francs — un billet de 100 francs ayant été monnayé avant la nuit — avait disparu.

La somme se trouvait dans son veston, placé à la tête de sa couchette.

 

Il porta plainte au commissariat de police et l'enquête commença.

Les soupçons de Rault se portaient sur Guillevin, qui avait été vu par le mousse, au cours de la nuit, baisser la lumière, s'approcher de la couchette de Rault, fouiller son veston et quitter pour un instant le bord.

 

En effectuant une fouille, le commissaire de police découvrit, caché à l'emplacement où avait dormi Guillevin, la somme de 65 francs.

Les 2.200 francs manquaient toutefois à l'appel.

 

Vendredi matin, un brave réfugié de Boulogne vint remettre à la police le portefeuille de Rault, ramené par le flot près de la cale ronde, vide de ses billets, mais renfermant ses pièces d'identité.

 

Guillevin nie toujours avec persistance avoir commis le vol dont on l'accuse.

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