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1940 - 1944
Chroniques d'occupation


23 juillet 1940

Jour 35
 

 

Les examens des baccalauréats première et deuxième parties auront lieu au petit lycée de Brest,

du 29 Juillet au 5 août.

 

Après une interruption de trois semaines, les classes ont repris pour les externes seulement, hélas I car six dortoirs, les réfectoires et les cuisines sont occupés.

 

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Dans la classe de philosophie, sur le tableau, est inscrite à la craie, comme sur le fronton du temple de Delphes, la maxime Socrate :

Gnôthi Seauton, sujet de la dernière dissertation qui permit aux élèves de s'étendre sur la morale, la méthode comportant l'ironie, l'induction et la définition et de s'attacher à prouver, après le grand philosophe grec, que la méthode est indispensable à la morale, parce que « toutes les vertus sont sciences. »

 

Mlle Richet, une toute jeune et charmante jeune fille, est titulaire de la chaire philo, en l'absence du professeur, actuellement prisonnier quelque part en France.

 

Elle procède à des interrogations sur des sujets susceptibles d'être demandés à l'examen.

Elle rectifie, explique, corrige, avec une bonne grâce et une patience digne d'éloges, les réponses insuffisantes.

 

On est surpris de constater l'autorité que ce jeune professeur exerce sur ses grands élèves :

 

Je n'ai qu'à m'en louer, nous confie-t-elle.

Les jeunes gens me sont revenus plus sérieux, plus dociles, plus disciplinés.

Les événements les mûris.

Ils comprennent que leur avenir est en jeu.

 

Leur bonne volonté est évidente.

Ils font tous leurs efforts pour tenter de passer avec succès leurs examens.

Tous repassent depuis quinze jours avec une méritoire application, les cours de l'année pour réussir.

 

Plusieurs de ces jeunes gens se destinent à la médecine.

 

— Ce doit être pour vous une bien grande charge, mademoiselle, que de préparer tous ces candidats ?

— J'avoue ne pas avoir manqué d'occupation durant cette année scolaire.

La préparation d'un cours qui doit durer une heure demande au moins six heures de travail et les corrections d'une dissertation sont longues et minutieuses.

Je ne puis guère songer à prendre un peu de repos, chaque jour, qu'à une heure du matin mais si, comme je l'espère mes élèves obtiennent les succès qu'ils méritent je serai pleinement récompensée de mes peines.

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Dans la classe de mathématiques élémentaires, quelques jeunes filles voisinent avec les jeunes gens.

L’enseignement est mixte.

Mlle Goron et M. Allard, tout récemment démobilisé, se partagent les cours de lettres.

 

Pleins de bonne volonté, leurs élèves, nous assurent-ils, se préparent aux prochaines épreuves avec acharnement.

Il en est qui paraissent très jeunes.

Ils viennent d’atteindre les seize ans exigés.

Ce ne sont pas les moins studieux.

 

… Ça ne me dirait rien, nous dit l'un d’eux, d’être obligé de remettre ça en octobre.

Je voudrais profiter de mes vacances, écourtées cette année, puisqu’il parait que la rentrée aura lieu le 15 septembre.

 

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En somme, chacun des candidats — première ou deuxième partie — comprend la nécessité de travailler ferme.

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