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1940 - 1944
Chroniques d'occupation


23 juin 1940

Jour 5

 

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23 juin 1940 L'occupation allemande à Brest.jpg

 

C'est mercredi soir que les troupes allemandes sont arrivées à Brest.

Des officiers se rendirent à la préfecture maritime et à la mairie, où ils s'entretinrent avec le vice-amiral d'escadre Traub, gouverneur de la place, et avec M. le sénateur-maire Le Gorgeu.

Le drapeau à croix gammée fut aussitôt hissé, par les occupants, sur la façade de l'hôtel de ville.

 

À 20 heures, tandis que l'hôtel des postes était occupé, les troupes motorisées descendaient les rues Jean Jaurès et de Siam et s'installaient sur toutes les places de la cité.

 

Le général commandant les troupes descendit à l'hôtel Continental.

 

LE DÉFILÉ

 

Jeudi, à 15 heures, une fanfare venait prendre position devant l'hôtel des postes.

 

Un général, à parements d'épaules dorés et culotte à bandes rouges, se plaça sur le terre-plein et le défilé d'un groupe d'artillerie motorisée commença, aux accents d'une marche lente, dirigée par un chef observant constamment une attitude strictement militaire.

Fait notable, ce chef tournait le dos à ses musiciens et, seuls, le bras droit et la baguette marquaient, avec la régularisé d'un métronome, les deux temps de la mesure.

 

Pendant une heure, les véhicules, préalablement rangés rues Jean Jaurès et Inkermann, défilèrent sans arrêt, observant rigoureusement leurs intervalles.

 

Les pièces passent avec un bruit sourd.

Les huit servants et le chef de pièce, assis derrière le conducteur, leur mousqueton fixé devant eux, tournent la tête à droite en passant devant les généraux, tandis que les officiers, debout dans leur auto, saluent.

 

Ce sont ensuite des fourgons, des camions recouverts de la poussière des routes, des motocyclistes et encore des voitures et des canons.

Une dizaine de gros tanks ferment la marche.

 

Le général répond au salut des officiers.

 

La musique joue sans arrêt et quand la revue est terminée, les musiciens manœuvrent à la baguette pour, d'un même mouvement, déboucher leurs instruments et les replacer dans le rang.

 

Le général monte en voiture et regagne l'hôtel Continental, dont les abords sont gardés par deux chars de combat placés en oblique et obstruant la rue Émile Zola.

 

En ville

 

Dans les rues, les soldats allemands circulent.

Ils payent parfois avec des billets français, mais, le plus souvent, en marks.

Ils font eux-mêmes le compte de ce qui est dû, se montrent aimables et corrects.

 

Quelques conseils pratiques

 

L'heure n'étant pas la même en France, horloges et pendules ont dû être avancées d'une heure.

 

À partir de 23 heures, il est formellement interdit de circuler dans les rues.

Tout le monde doit être rentré et se tenir tranquille chez soi.

 

Il est recommandé à toutes les personnes qui ont quitté la ville de regagner leur domicile et à chacun de reprendre ses occupations normales, qui ne seront aucunement entravées' par l'occupation allemande.

 

La circulation

 

Sur les routes, la circulation est maintenant entièrement libre.

On peut se rendre sur n'importe quel point du territoire occupé par les Allemands, par n’importe quel moyen de transport, sauf pendant encore 48 heures environ, par chemin de fer.

 

En effet, les trains doivent être remis en circulation dans deux jours, le temps de procéder à une vérification des voies.

 

Un mark : 20 francs

 

Les commerçants sont tenus d'accepter en paiement la monnaie allemande, la valeur d'un mark étant estimée à 20 francs.

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23 juin 1940 Entrée des troupes Allemandes à Brest.jpg

 

La plus grande correction est recommandée aux soldats allemands.

Toute infraction pourra être dénoncée à la Kommandantur (hôtel des Voyageurs).

 

Par contre, l'autorité allemande sévira avec la plus grande rigueur contre toutes les infractions commises par des civils : ivresse, vol, rixe, même entre eux, etc.

 

CHEMINS DE FER

 

Il est possible, croit-on, à la gare, que quelques trains de voyageurs puissent être mis en circulation, après vérification des voies, au moins jusqu'à Morlaix.

 

P. T. T.

 

Les bureaux des postes et télégraphes sont provisoirement fermés au public.

Le personnel a été licencié, mais, dans quelques jours, le trafic normal reprendra dans la limite des trains en circulation.

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23 juin 1940 Les principaux évènements de la semaine.jpg

 

Voici un résumé succinct des événements qui se sont déroulés à Brest, depuis lundi dernier, 17 juin.

 

Ce matin-là, toutes les troupes anglaises réparties dans la région reçurent l'ordre de leur gouvernement de regagner Brest.

La veille, trois grands paquebots avaient déjà quitté le port de commerce.

 

Des camionnettes, chargées de soldats, continuent à arriver aux abords des bassins, où de grands cargos sont sous pression.

 

L'embarquement se fait en hâte.

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Ne pouvant tout emporter, les troupes brûlent une grande partie de leur matériel et abandonnent des vivres.

 

Cependant, place de la Liberté et à la gare, un grand nombre de nos concitoyens prennent d'assaut, les autocars, tandis que de nombreuses autos particulières se dirigent vers les plages et petits ports du Finistère.

 

La nuit est troublée par des alertes ; des milliers de Brestois se réfugient dans les abris.

La voix des canons du « Richelieu », seul bâtiment de ligne demeuré sur rade, se mêle à celle des batteries de la D.C.A.

 

18 juin — Journée de fièvre.

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Les marins et les dernières troupes s'embarquent.

 

En ville, l'inquiétude grandit.

Rues de Siam et Jean Jaurès, c'est un défilé ininterrompu d'autocars et de voitures particulières qui prennent la direction des côtes nord et sud du Finistère.

De nombreuses personnes n'ayant pu trouver place dans les autocars gagnent la campagne poussant devant eux des voitures d'enfant sur lesquelles on a entassé de la literie et des ustensiles de cuisine.

 

Cet exode se poursuit la nuit venue à la lueur des incendies allumés sur toute la côte, depuis Saint-Nicolas jusqu'au Portzic.

On brûle, par ordre, les artifices de la pyrotechnie, les poudres du Moulin Blanc et on met le feu aux réservoirs à mazout du port de commerce, de La Ninon et des Quatre Pompes.

 

De hautes flammes, surmontées de gigantesques tourbillons de fumée s'élèvent dans le ciel clair.

Le vent souffle heureusement du Nord-Est et les énormes panaches qui bondissent des cratères sont poussés vers le large.

 

La destruction du matériel de la marine se poursuit aussi dans l'arsenal, où l'on fait sauter à la dynamite les portes des bassins et quantité d'apparaux divers.

Les hangars du Point du Jour, de la digue, de Penfeld, flambent comme châteaux de cartes.

Dans la direction de Guilers tout le ciel paraît en feu.

 

La grande grue qui s'élève devant la majorité générale a résisté, mais elle est gravement endommagée.

 

Tout à côté, dans le bassin Tourville, on a ouvert les vannes et le torpilleur Cyclone — grand blessé de guerre — qui reposait en cale sèche, est inondé.

Les superstructures et le pavillon de proue émergent.

 

Cette nuit tragique est encore marquée par les appels stridents des sirènes et le séjour angoissé de nos concitoyens dans les caves et les abris....

 

Sur la rade, où il y avait hier plus de soixante cargos, il ne reste que le Waldeck-Rousseau, croiseur, depuis longtemps désarmé et déclassé, et trois vieux pontons servant de bâtiments-écoles.

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19 juin.

 

— Les Brestois, qui commençaient à s'endormir, ont été réveillés en sursaut, à 4 h. 5, par de fortes détonations.

 

Rue de la Porte, un vendeur de journaux qui s'était abrité sous un porche, en face des halles de Recouvrance, a été tué par un éclat.

 

À droite du petit bois de La Ninon, rues Pierre Loti et de la Poterne, trois maisons se sont écroulées et plusieurs autres ont été endommagées.

Plus loin, à l'extrémité de la plaine de Kérangoff, la rue Brizeux, qui fait face à la rade, a été particulièrement éprouvée : Huit maisons se sont écroulées ou ont pris feu et d'autres ont beaucoup souffert.

 

Par un heureux hasard, on ne compte aucune victime dans le quartier, les habitants s'étant réfugiés dans les caves.

Les dégâts sont malheureusement considérables.

 

On nous signale qu'à la Grande Rivière et à la Maison Blanche, plusieurs immeubles ont également été détruits.

Nous en reparlerons.

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