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1940 - 1944
Chroniques d'occupation


25 juin 1940

Jour 7

 

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25 juin 1940  La reprise normale des affaires à Brest.jpg

 

Dans cette grande quincaillerie, tous les vendeurs sont derrière leur comptoir attendant les clients.

Il n'y a qu'un petit courant d'acheteurs.

 

On vend beaucoup d'alcool à brûler au litre ; le prix en est de cinq francs.

 

Notre gros client était l'arsenal, dit le directeur.

Il est, pour le moment, impossible de savoir ce qu'il adviendra de ce côté-là.

Notre plus gros souci est d'ailleurs la possibilité de reconstituer nos stocks, quand nous aurons épuisé nos réserves en magasin.

 

C'est le leit-motiv que nous entendrons chez tous les commerçants au cours de cette rapide enquête.

 

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De nombreux clients stationnent devant les rayons de cet important magasin de nouveautés.

 

Je suis le seul magasin, nous dit le directeur, qui ait laissé ses portes toujours ouvertes, sauf dans la matinée de mercredi dernier.

 

Les premiers jours de l'occupation allemande, les affaires n'ont pas été brillantes.

Elles n'ont pas encore repris leur cours normal.

 

Une certaine inquiétude règne parmi les retraités, la petite épargne laborieuse ; le retard apporté dans le règlement des soldes et salaires sont les principales causes du ralentissement des affaires.

 

Il est compensé par les ventes aux soldats allemands, qui achètent du linge et de la bonneterie.

 

Ce qui nous inquiète, c'est de savoir de quelle façon et dans quelles conditions nous pourrons nous approvisionner.

 

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Dans cette épicerie où les rayons semblent encore bien garnis, on nous dit :

Nous avons l'impression que nos clients vivent actuellement sur des stocks.

Ce qui est impossible.

Comment les auraient-ils constitués ?

 

Nous voyons un nombre moindre de clients, mais notre chiffre journalier se maintient, grâce à l'appoint des acquisitions relativement importantes des troupes allemandes, qui achètent du Champagne de marque, des vins fins, du jambon, du saucisson, du beurre et du chocolat.

 

La suppression du téléphone, du télégraphe et du courrier postal ne nous permet pas de passer de commandes, même dans la région.

La difficulté des transports gêne notre réassortiment en marchandises périssables que nous recevions de Quimper, Pluguffan, Ploudaniel, etc.

 

Nous ne manquerons pas de sucre.

Je n'en dirai pas autant du café.

Je veux espérer qu'après quelques jours de flottement, les trains rétablis, tout marchera normalement.

 

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Ici, beaucoup de femmes et d'enfants essaient des chaussures.

 

Après quelques jours de stagnation, dit la directrice de cette marque connue de chaussures, les affaires reprennent, mais le genre de vente a changé.

 

Ce ne sont plus des chaussures de luxe, de bains de mer ou d'été que nous demande notre clientèle, ce sont des chaussures de marche, des souliers solides que nous ne vendions que l'hiver qui nous sont réclamés.

 

Mais les tanneries du Nord et les fabricants pourront-ils renouveler nos stocks ?

 

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Les deux grands magasins de la rue de Siam ont repris leur activité.

 

Le directeur de l'un nous confie :

Avant l'arrivée des Allemands, la clientèle s'étant raréfiée, par suite de l'exode d'une grande partie de la population, j'avais invité mon personnel à rester chez lui jusqu'à nouvel ordre.

 

Le retour de la plupart des habitants m'a permis d'occuper mes vendeuses par moitié, soit un jour sur deux, en attendant mieux, car, vous pouvez le constater, les clients reviennent.

 

Nos stocks nous permettront de tenir encore quelque temps, mais j'espère, avant leur épuisement, recevoir du ravitaillement.

 

Les soldats allemands nous achètent beaucoup de chemises, des gants, des bijoux et des montres.

Cette vente n'offre aucune difficulté, les prix de nos marchandises étant affichés d'une façon très visible.

 

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Une directrice très énergique nous accueille très aimablement dans le magasin voisin :

J'occupe ici une centaine de personnes, dit-elle.

Mon devoir est de les aider et de leur donner du travail par tous les moyens.

 

Elles travaillent toutes, sauf quatre vendeuses qui, à tour de rôle, prennent un jour de congé par semaine.

 

Je peux tenir au moins deux mois sans ravitaillement si la vente reste normale.

Je pense que d'ici là, le ravitaillement sera redevenu normal.

 

Je n'ai pas l'intention d'attendre ce ravitaillement, je vais me mettre en campagne, acheter n'importe quoi.

Je revendrai comme je pourrai, je me débrouillerai, mais je ne renverrai mon personnel qu'à la dernière extrémité.

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25 juin 1940 A la gare des chemins de fer de l'état.jpg

 

La gare est occupée militairement et des sentinelles allemandes gardent les portes d'entrée ;

mais, depuis hier matin, les centaines de malles et de valises qui se trouvaient à la consigne ont pu être retirées par leurs propriétaires, sur vu du bulletin de bagages.

 

Les bureaux de la petite vitesse ont effectué la livraison des marchandises qui sont arrivées à Brest.

 

Des hommes d'équipe lavent à grande eau le hall des voyageurs, balayent les voies du chemin de fer où il ne reste plus un seul détritus, un seul papier ;

brossent et nettoient les wagons dont plusieurs rames stationnent sur les quais.

 

« Vous pouvez affirmer, nous dit un groupe de cheminots, que nous travaillons ferme et que notre moral, à tous est excellent. »

 

Et M. Denis, chef des gares, veut bien nous préciser :

« Je suis sous les ordres du général gouverneur de Bretagne.

Il m'a demandé de rétablir la circulation le plus rapidement possible.

Et nous nous y employons, avec la plus grande activité.

 

« Un pont avant Landerneau a été détruit ; il est presque entièrement rétabli.

Demain, il y a tout lieu de l'espérer, deux trains pourront circuler jusqu'à Rennes et Quimper.

Nous ne serons plus isolés. »

 

Ajoutons qu'hier après-midi sont arrivés, par cars, les courriers de Quimper, Saint-Pol, Le Conquet et la presqu'île de Crozon.

 

À la gare, place de la Liberté

 

Ce lundi, jour de marché, place de la Liberté, il n'y avait qu'une bouquiniste et quelques marchandes de vieilles et pauvres choses.

 

Au centre, trois auto-mitrailleuses et leurs servants.

 

Mais à la gare des cars règne une grande animation.

Les habitants des environs sont venus faire leurs achats coutumiers et de nombreux Brestois sont allés voir parents et amis partis à la campagne.

 

Le service normal est assuré sur Porspoder, Saint-Renan et Lampaul-Plouarzel, Châteaulin et Quimper, Morlaix, Plougastel et Le Faou.

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