top of page
1940 - 1944
Chroniques d'occupation


9 septembre 1940

Jour 83
 

 

Ces jours derniers, les gendarmes Thomas et Le Gouill, des brigades de Brest, ont reçu une plainte émanant de Mme Cincin, née Sabine Chaperon, 27 ans, demeurant à Kerbriand, en Saint-Marc, relative à un cambriolage, commis dans la propriété de sa sœur, Mme Destremau, qui habite Toulon depuis le 29 juillet.

 

En effet, cette propriété, sise 78, route du vieux Saint-Marc, a eu la visite d'un ou plusieurs cambrioleurs, dans la période comprise entre le 25 août et le 3 septembre, date à laquelle fut découvert le vol.

 

Deux services à thé en porcelaine et un service à café ont été dérobés.

Le tout se trouvait emballé dans une caisse en bois déposée dans la salle à manger.

 

Un désordre indescriptible régnait dans cette pièce.

 

Pour pénétrer dans l'habitation, entièrement entourée de murs, les cambrioleurs brisèrent un carreau de la fenêtre située au rez-de-chaussée, puis firent jouer l'espagnolette. Ils purent ensuite opérer à leur aise.

 

Mlle Marie Goalabre, 18 ans, ancienne bonne des époux Destremeau, a déclaré aux enquêteurs que dans l'après-midi du 25 août, alors qu'elle se trouvait encore dans la villa, elle avait aperçu deux jeunes gens qui, à son approche, s'étaient dissimulés dans le garage.

Interpellés, ils reconnurent avoir pénétré dans le jardin pour voler des pommes et des poires.

Mlle Goalabre n'insista pas davantage.

 

Au cours de leurs investigations, les gendarmes Thomas et Le Gouill, découvrirent chez un antiquaire de la rue Suffren les services à thé et à café dérobés chez Mme Destremau.

 

Interrogé, le commerçant déclara que le 27 août, un homme âgé d'environ 25 ans, était venu lui proposer ces objets.

 

— Je viens d'être démobilisé, dit l'inconnu, et pour me procurer quelques ressources,

Je voudrais vendre ces tasses.

 

L'homme ayant exhibé une carte bleue de chômeur au nom de Jean Queffelec, demeurant 5, rue Magenta, à Lambézellec, l'antiquaire acheta les trois services pour la somme de 325 francs.

 

Les recherches faites par les gendarmes pour retrouver le nommé Queffelec sont demeurées infructueuses.

 

Le commerçant, qui n'a pu fournir le registre sur lequel doivent figurer les achats et les ventes, s'est vu dresser procès-verbal.

 

L'enquête continue.

​

 

Les paysans n'ont pas attendu que le gouvernement les y invite pour se grouper dans des organisations professionnelles agricoles.

À la base, des syndicats locaux groupant les cultivateurs d'une même commune et se chargeant de défendre les Intérêts de ses membres ; rien de plus juste.

 

Peu à peu, ces syndicats se sont groupés dans des associations qui, elles-mêmes, se sont affiliées à l'Union nationale des syndicats à Paris.

 

Ce mouvement a favorisé la création des syndicats laitiers, et c'est sur la proposition du Comité central des groupements professionnels laitiers, constitué par la loi du 27 juillet, qu'un arrêté ministériel, en date du 20 août, a fixé les prix des produits laitiers à partir du 25 août.

 

Cet arrêté, qui a créé sur le marché au beurre une assez forte perturbation, a permis à certains grossistes d'exiger des détaillants un prix qui ne semble pas conforme aux prescriptions du décret.

 

Ils ont, en effet, appliqué aux beurres de 2e qualité le prix du beurre extra.

 

Qu'est-ce que le beurre de laiterie ?

Une visite à Poudaniel va nous renseigner.

 

LA COOPÉRATIVE LAITIÈRE PLOUDANIEL

 

Un superbe bâtiment a été édifié sur les plans de M. Chabal architecte.

Il domine deux luxuriantes vallées.

Une grande propreté règne à l'Intérieur.

L'eau y coule à flots.

 

La société ne se sert que chez les fermiers adhérents à la Coopérative laitière.

Elle leur paie actuellement le lait 1 fr. 10 (vingt-deux sous) le litre, mais elle répartit, en fin d'année, ses excédents — le mot bénéfice n'a pas cours dans le domaine des coopératives — et cette répartition est faite, d'après l'apport en lait de chacun des adhérents.

 

LE RAMASSAGE

 

Montées sur roues pneumatiques, longues voitures basses, attelées d'un robuste cheval de labour, apportent, dès matin, à la laiterie, les bidons contenant le lait « ramassé » dans les fermes.

Dans un rayon d'une dizaine de kilomètres autour de la laiterie, 24 ramasseurs, fournissant cheval et voiture, passent dans les fermes et transportent le lait des fermiers voisins.

Ce sont tous des adhérents à la société, qui reçoivent, en paiement du transport dont ils se chargent, une rétribution mensuelle fixe et un pourcentage établi d'après la quantité de lait journellement apportée.

 

À l'arrivée, les bidons sont rapidement déchargés sur un quai surélevé.

​

 

LE LAIT EST PESÉ ET PAYÉ SELON SA TENEUR EN MATIÈRES GRASSES

 

Le lait de la traite du matin est immédiatement versé dans le bac, garni de filtres, d'une bascule automatique.

Un tour de manivelle, et un ticket tombe indiquant le poids exact du lait, inscrit sur une fiche au compte du fournisseur-adhérent.

 

Le lait de la traite de la veille au soir est versé dans un autre bac de la même bascule et pesé dans les mêmes conditions.

 

Le lait du matin va être pasteurisé pour être livré à la consommation ; le lait du soir sera écrémé pour la fabrication du beurre.

 

Le lait est payé aux fermiers d'après sa teneur en matières grasses qui ne doit pas être Inférieure à 32 grammes par kilo mais atteint parfois 45 grammes

 

Chaque jour des échantillons sont prélevés.

Trois fois par quinzaine, chacun des laits fournis par les adhérents est analysé au laboratoire municipal.

Si un lait n'atteint pas la teneur en matières grasses minimum, son fournisseur reçoit un avertissement et l'on surveille de plus près se« livraisons. S'il y a récidive, son lait lui est payé au taux le plus bas.

 

La Coopérative laitière de Ploudaniel reçoit mensuellement 350.000 litres de lait :

100.000 sont pasteurisés et revendus dans ses dépôts ;

250.000 sont transformés en beurre.

 

LA PASTEURISATION

 

Seul, le lait du matin est pasteurisé.

En sortant de la bascule, où il a subi un premier filtrage, il vient, par des canalisations, se déverser dans deux bacs d'une contenance de 3.000 litres chacun.

 

Il passe sur un nettoyeur centrifuge qui î tournant à une vitesse de 4.000 tours fait adhérer aux parois toutes les impuretés, toutes les poussières plus lourdes que le lait qui y sont en suspension.

 

Ainsi purifié, le lait passe dans l’appareil tubulaire de pasteurisation par des tubes horizontaux enfermés dans d’autres d'un diamètre plus gros lesquels une circulation d'eau chaude est établie.

 

La première nappe est portée à une température de 28 à 30° ;

la deuxième de 82 à 90°.

La température minima doit atteindre 82° pour une pasteurisation parfaite et ne détruisant pas les vitamines que contient le lait.

 

Refoulé dans un bac en acier vitrifié, le bac y séjourne jusqu’au lendemain à une température constante de 4 à 5°.

 

De très bonne heure, le matin, on le remet dans des bidons, soigneusement lavés.

Des autos de livraison partent à 6 h. 30 (heure de l'Europe centrale) de la laiterie et le lait est distribué dans tous les dépôts de Brest avant 9 heures, au prix de 1 fr. 80 le litre et y est revendu 2 francs.

 

Avant leur départ, tous les laits sont à nouveau analysés au point de vue de leur teneur en matières grasses.

 

Nous suivrons dans un prochain article les phases de la fabrication du beurre de laiterie.

 

(À suivre)

​

bottom of page