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1907

Les Apaches s'amusent
place du Château

 

 

Source : La Dépêche de Brest 21 janvier 1907

 

Depuis quelque temps, les personnes habitant les alentours de la place du Château vivent sous la terreur des apaches brestois.

Il n'est point de nuit où il ne se commette quelque déprédation.

Dans le bas de la rue du Château, tout particulièrement, ce sont les loquets et les marteaux des portes qui sont arrachés par des mains inconnues.

 

Bien mieux, la semaine dernière, la plaque de l'égout placé à l'angle de la place du Château et de la rue Jean-Jacques Rousseau fut enlevée, on ne sait comment.

Une honorable dame de notre ville, rentrant chez elle à neuf heures du soir, disparut dans cet abîme, qu'elle n'avait pu apercevoir, vu l'obscurité.

Heureusement, des personnes charitables, témoins du fait, se hâtèrent de lui porter secours.

 

Nous tenons à la disposition de M. Vibert — au cas où la chose pourrait l'intéresser ou encore qu'il voudrait la vérifier — le nom de cette nouvelle victime de l'incurie municipale.

 

Pendant que nous y sommes, nous rappellerons qu'il existe un arrêté municipal prescrivant le silence dans les rues après neuf heures du soir.

Or, les personnes habitant le bas de la rue Saint-Yves et ses environs ne peuvent dormir souvent avant deux heures du matin.

 

Dans ce quartier, après la chute du jour, il n'est guère possible à une personne qui se respecte de sortir de chez elle sans être accostée et injuriée par quelque satyre en état d'ivresse.

 

Des bandes de mauvais marins, particulièrement, très échauffés par de nombreuses libations, troublent pendant des heures entières la tranquillité publique, sans être le moindrement inquiétés par les patrouilles fournies par le 2e dépôt des équipages de la flotte.

 

La police, observeront peut-être certains, est faite pour ramasser les pochards.

C'est évident, mais les agents ne peuvent pas se trouver partout à la fois et lorsque, comme samedi soir, ils luttent, rue Suffren, avec des individus ivres et violents, ils ne peuvent pas arrêter ceux qui bousculent les passants rue de Siam.

 

Or, ce jour, à onze heures du soir, pendant que quatre agents de la sûreté, aidés de leurs camarades en tenue, mettaient en état d'arrestation trois noctambules qui causaient du scandale à l'angle des rues Guyot et Suffren, deux autres marins, que nous vîmes, l'an dernier, sur les bancs du conseil de guerre, simulant l'ivresse, s'amusaient à agacer les passants, au bas de la rue de Siam.

 

Ils bousculaient les uns, donnant des coups de poing aux autres, et leur attitude paraissait tellement agressive que personne n'osait leur tenir tête.

 

Ce manège durait depuis près d'une demi-heure, lorsqu'un lieutenant de vaisseau, en tenue, se rendant au bal de la préfecture, et dont la femme avait été bousculée en passant, voulut intervenir.

Mal lui en prit, car les deux marins l'injurièrent grossièrement à son tour et le menacèrent de lui casser la g..., quand arrivèrent les deux agents de service dans cette artère, qui avaient dû interrompre leur surveillance pour aller conduire les autres perturbateurs au violon.

 

Les marins, du plus loin qu'ils virent les agents, prirent la fuite et se réfugièrent dans l'un des bouges de la rue Suffren, où ils ne purent être rejoints.

 

Des faits semblables se renouvellent trop souvent pour que nous n'attirions pas l'attention de l'autorité supérieure sur le service insuffisant fait par les patrouilles dans notre ville.

 

Nous espérons que des ordres sévères seront désormais donnés aux chefs de ces détachements pour qu'ils secondent d'une façon plus efficace le service si chargé de la police brestoise et ne soient plus arrêtés par l'esprit de corps pour faire observer l'ordre sur la voie publique.

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