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1893

Tentative de suicide
sur la place de la Tour d'Auvergne
à Brest

 

 

Source : La Dépêche de Brest 9 février 1893

 

Vers quatre heures, hier soir, un homme portant une casquette, un pantalon de velours noir usé et un veston bleu, en toile, se présentait au bureau de location de voitures, sur la place La Tour d'Auvergne, et demandait à M Casamajor, commis de M. Balarat, quelle heure il était.

Celui-ci lui répondit qu'il était quatre heures juste.

 

— Je suis en retard, répondit l’homme.

Voulez-vous me faire « un mot d'écrit » ?

 

Sur la réponse affirmative de M. Casamajor, il dicta à celui-ci le billet suivant que l'on a retrouvé dans la poche de son paletot et dont nous respectons les termes, sauf en ce qui concerne des tiers :

 

« Joncour (François) a été volé de la somme de 82 francs, le 7 février 1893, chez M. B..., route de la Vierge.

« J'ai payé ma chambre cinq fr.

« J'ai un lit, un sommier, un matelas neuf, deux paires de drap, un traversin, deux habillements complets.

« Le patron de la maison est un honnête homme, seulement il prend l’intérêt du nommé Le P..., qui serait monté dans ma chambre pendant mon sommeil. »

 

Après avoir dicté ce qui précède, il pria M. Casamajor de remettre ce papier à un agent. Naturellement, le commis de M. Balarat s'y refusa.

 

L'homme s'éloigna alors de quelques pas et, ouvrant un poinçon de 10 centimètres de longueur adapté au manche de son couteau, il s'en frappa par deux fois à l'abdomen.

La deuxième fois, l'arme pénétra presque toute entière et l'inconnu s'affaissa sur le sol.

 

M. Casamajor et un cocher, M. Evillard (François), accoururent aussitôt et relevèrent le blessé, qui s'était évanoui.

M. Cureau, commissaire de police, prévenu aussitôt, le fit transporter à l'hospice civil dans une voiture de place.

 

Le docteur de Leseleuc, qui l'a immédiatement visité, a constaté que cet homme était absolument ivre et que la blessure paraît, à première vue, peu dangereuse.

Mais l'on ne pourra véritablement se prononcer que lorsque l'ivresse sera dissipée.

 

Cet individu, qui s'appellerait réellement Joncour, serait ouvrier serrurier.

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Source : La Dépêche de Brest 11 février 1893

 

Le sieur Joncour (François), dont nous avons annoncé jeudi la tentative de suicide sur la place La Tour d'Auvergne, est presque rétabli.

 

Joncour, qui est ouvrier charron, est célibataire.

Il est né à Quéménéven le 28 février 1867.

Il était employé chez MM. Beynel et Tessier depuis un an.

 

Mardi dernier, Joncour fut très froissé d'une observation qui lui fut faite.

Le soir même, il faisait arrêter son compte et il venait rue du Château, au bureau de MM. Beynel et Tessier, toucher 78 fr. qui lui étaient dus.

 

Muni de cet argent et d'une somme de 10 fr. qu'il avait déjà, le charron, après avoir fait la noce, alla coucher rue de la Vierge, 137, dans la chambre qu'il occupait.

Il s'étendit, dit-il, tout habillé sur son lit, l'argent étant dans la poche droite de son gilet.

 

À son réveil, l'argent avait disparu.

Il soupçonna un de ses camarades, mais celui-ci nia être l'auteur du vol.

 

C'est par dépit d'avoir perdu sa place et son argent qu'il se grisa dès le matin du mercredi, et à mesure que l'ivresse grandissait, son chagrin augmentant, il résolut de se donner la mort.

On sait le reste.

 

Joncour, qui ne se souvient, dit-il, de rien, ne s'est éveillé qu'avant-hier soir.

Il a mangé de fort bon appétit, et hier il s'est promené une grande partie de la journée dans la cour de l'hospice.

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