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1936

Noël à Brest

 

 

Source : La Dépêche de Brest 25 décembre 1936

 

Un soleil très doux, voilé de brume bleue donnait hier, à la veille de la Noël, bien du charme à la ville.

Une petite fille, à sa fenêtre, fit cette réflexion candide :

« Pourquoi y a-t-il tant de fumée sur les toits ? »

Et quelqu'un lui répondit :

« Parce que le père Noël ne veut pas être vu des petits enfants. »

Puis le brouillard se dispersa, s'évanouit dans un ciel presque printanier tant il était magnifiquement bleu.

C'était Noël à Brest, dans le soleil et la lumière.

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Un Noël qui n'est pas comme ceux des autres villes.

Un Noël dans un décor maritime.

Un Noël avec des coiffes de dentelles, de la joie et des traditions.

 

Les permissionnaires sont partis par longs convois vers leurs villages, mais les cols bleus sont encore assez nombreux pour donner à la fête son caractère essentiel :

Noël d'un grand port.

 

La foire, place Wilson, s'animait dès le matin.

Manèges, loteries, tirs, attractions diverses étaient assaillis.

 

Ce qui a disparu des petites loteries, ce sont ces filets verts, gonflés d'oranges, que les enfants emportaient autrefois avec fierté.

Ce parfum d'oranges manque à la fête.

Heureusement, celui du nougat et des berlingots subsiste.

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La Noël, que les « grands » fêtent parfois sans discrétion, est la journée des enfants surtout, la fête des petits aux cœurs purs et à l'âme fraîche.

 

Hier matin, aux alentours des halles, les marchandes de sapin faisaient de belles affaires.

Les boutiques de fleuristes furent aussi assaillies.

 

Les « arbres de Noël » n'avaient d'ailleurs pas subi de hausse et chacun pouvait emporter ce qui était à sa convenance.

— Et surtout, que les branches soient bien égales et bien disposées.

Tous les acheteurs voulaient des arbres parfaits, symétriques et harmonieux.

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Dans les pavillons des halles, les marchands de volailles faisaient des affaires brillantes.

 

— Cette année, nous dit l'un d'eux, les grosses pièces n'ont pas supporté la hausse.

Par exemple, les oies et les dindes.

Les prix cependant ont varié pour le poulet, le pigeon et le gibier.

Nous avons d'ailleurs été surpris par un brusque changement et nos achats s'en sont ressentis.

 

Les halles furent cependant très largement approvisionnées et, peu après midi, les stocks de victuailles étaient véritablement pillés.

Les devantures des charcuteries, avec leurs amas d'escargots, de foie gras, de saucissons, de pâtés dorés de gelée retenaient les gourmands.

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À la tombée de la nuit, la ville vivait intensément.

Les magasins, illuminés à profusion, attiraient les regards des promeneurs en quête d'emplettes longuement méditées.

 

Rue Émile Zola, un grand magasin de nouveautés présentait avec un goût très sûr, une variété de tissus et d'articles d'élégance.

 

Rues Jean-Jaurès et Anatole-France, la foule stationnait devant les magasins de meubles.

Rue d'Aiguillon, les petits admiraient la vitrine d'un magasin, dans laquelle on voyait un ange inscrire sur un grand livre les noms des enfants sages.

 

La rue de Siam était encombrée d'une foule comprenant des milliers d'enfants, anxieux de visiter le paradis des jouets.

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C'était bien le soir de Noël, dédié aux joies de la famille.

Mais il faut penser aussi à ceux qui n'auront pas la joie de se réunir pour contempler le bonheur de leurs petits.

La fête de Noël est aussi la leur.

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