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1928

L'histoire de Brest
par
Ollivier Lodel

14 sur 41

1738 - 1744

 

 

Source : la Dépêche de Brest 10 septembre 1928

 

Un arrêt du Conseil du 4 décembre 1737 a suspendu la vente des offices municipaux, rendu la mairie élective, et Brest se hâte de profiter du droit qui lui est restitué.

 

Le 28 décembre, l'assemblée générale des électeurs est réunie au couvent des Carmes, pour procéder à la désignation d’un maire.

Mais, dès l'ouverture de la séance, se produit un incident.

 

M. Marion de Pénanru, élu maire en 1733, n'a pas achevé son triennat, puisque, nous l'avons vu, l'État, en rétablissant les offices, a conféré sa magistrature à M. Jacques Symon, le 5 mai 1735.

 

Il présente une requête qu'il signe comme « maire de Brest » et « s'oppose formellement à ce qu'il soit procédé à aucune élection, qu'au préalable l'assemblée ait délibéré, s'il doit être dépossédé ou interrompu dans son exercice, pour finir son triennat, avec messieurs les échevins et autres de la Communauté. »

 

L'assemblée ne fit pas droit à l'opposition de l'ancien édile de Recouvrance, et les suffrages se portèrent sur M. Vincent Labbé, notaire royal et procureur à la sénéchaussée de Brest, qui fut réélu le 15 décembre 1740, pour un second triennat.

 

M. Labbé dut démissionner le 18 mai 1744, à l'âge de 66 ans, « Dieu ayant voulu l'affliger, depuis le 30 mars dernier, d'une paralysie qui lui a tombé sur la langue, et qui l'empêche de parler librement. »

 

La Communauté, cédant aux sollicitations pressantes et réitérées de M. Labbé, « accepta sa démission avec regret, et le remercia des soins et du zèle le plus ardent qu'il avait toujours marqués, pour les intérêts de la ville. »

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Le plus important ouvrage que l'on doit à l'administration de M. Labbé, fut l'établissement de fontaines « tant pour servir à la boisson des habitants, que pour remédier aux incendies. »

 

L'une fut placée à l'encoignure du Champ de Bataille et de la rue Saint-Yves ;

l’autre, au pied des glacis, vis-à-vis la porte du Château ;

la troisième, dans la rue de Siam, près du Petit-Moulin.

 

C'est M. Dumontier de Pricé, ingénieur en chef des fortifications, qui avait dressé le plan de ces travaux, et la ville, reconnaissante, fit présent à Mme Dumontier d'un service en vaisselle plate, qu'elle paya 500 livres.

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Amédée Frézier

 

M. Frézier, directeur des fortifications, trace en 1740 la rue qui portera son nom, pour accéder de la Grand' Rue à l'église Saint-Louis.

 

Il restaure la vieille chapelle du Château qui, avant sa démolition en 1819, occupait l'emplacement actuel des cuisines, entre la caserne de Plougastel et la courtine longeant la rade.

 

La même année, la ville recouvre la propriété de son église Saint-Louis, moyennant un versement de 50.000 livres, que les Jésuites emploieront à la construction de leur chapelle.

 

Et c'est aussi en 1740 que fut créée, à Brest, la première école communale gratuite.

 

Le 10 mars, M. Jean de Hennot, lieutenant de vaisseau, léguait à la ville, quelques jours avant de mourir, « ses meubles et argenterie, pour enseigner aux enfants du menu peuple, la doctrine chrétienne, la lecture, l'écriture et le chiffre. »

 

La vente rapporta 6.075 livres et un traité fut immédiatement passé avec le Frère Timothée, supérieur général de l'ordre de Saint-Yon, qui réglait les devoirs des Frères et les engagements de la municipalité. ,

 

Aux termes de ce contrat, les Frères de la Doctrine chrétienne étaient reçus à perpétuité à Brest, pour y instruire les enfants, et ne pouvaient être renvoyés, sous aucun prétexte, tant qu'ils rempliraient dignement leurs charges d’instituteurs.

 

Deux Frères devaient provisoirement assurer le service de l'école.

 

La ville s'engageait à leur fournir un logement convenable, 50 livres de frais de voyage et 500 livres pour achat de vêtements ;

une pension annuelle de 200 livres et 30 livres pour l'achat des prix à distribuer aux élèves.

En novembre 1743, la municipalité fit l'acquisition, au prix de 3.813 livres, pour servir d'école, de la maison de la rue Charonnière (rue Monge), « en face l’escalier Neuf. »

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C'est en 1743, le 25 janvier, qu’une potence fut dressée, pour la première fois, près de la caserne Fautras, pour l’exécution du soldat Louis Gourvéol, dit La Bonté, « chef et cause d'un tumulte arrivé au château du Mingant, par les soldats de la compagnie de Poulconq. »

 

Le gibet demeura en permanence après l'exécution et son maintien provoqua des observations de la part du Ministre, auxquelles l'Intendant répondit en ces termes :

 

« Ça a été après des peines infimes, que j'ai fait faire cette potence.

Aucun ouvrier n'y voulait travailler, tant ça est en horreur parmi la population de ce pays.

 

« Il a fallu la faire faire en secret et, après qu'elle a été faite, personne ne voulait la transporter, ni la planter.

 

« Enfin, à force d'argent et de nuit, on est venu à bout de la mettre en place.

Il y aura autant de difficultés pour la mettre à bas et je ne puis vous répondre d'y parvenir.

 

« Au surplus, cette potence n'est pas vis-à-vis des casernes.

Elle est dans une place, à côté, où l'on passe par les armes les déserteurs.

Ainsi, c'est une place destinée aux exécutions. »

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Plusieurs graves incendies sont à signaler pendant cette période.

 

Le 25 octobre 1739, le feu prend à l'hôpital de la marine, par l'imprudence de deux ouvriers aliénés, qu'on laissait se promener et fumer en toute liberté.

II se déclara dans une écurie attenante à la salle Sainte-Reine contenant de la paille, sur laquelle étaient tombées des étincelles.

On se rendit assez promptement maître du feu, pour n'avoir à reconstruire que 27 toises des deux édifices contigus.

 

Le 25 octobre 1742, c'est dans le port, sur plusieurs points en même temps, du côté de Recouvrance, qu'un incendie éclate à six heures du matin.

En moins de deux heures, le feu consume les ateliers, bureaux et magasins de la menuiserie et se propage à un tel point, du côté de la prison de Pontaniou, qu'on est obligé d'en faire sortir les détenus.

Les flammes gagnent le Royal-Louis, de 124 canons, achevé jusqu'à son troisième pont, et c'est grâce aux efforts des officiers et marins qui se relayèrent pendant douze heures, par escouades de 500 travailleurs, que le vaisseau ne fut pas détruit.

Malgré tout, la perte fut considérable, car les dégâts s'élevèrent à près de 820.000 livres.

 

Enfin, le 30 janvier 1744, nouveau désastre.

Le magasin général, le contrôle, situé là où se trouve la direction du port, et la corderie sont la proie des flammes.

Ce dernier bâtiment, construit en 1687, occupait tout le terrain compris actuellement entre les rues Louis Pasteur et Kéravel et se terminait à la place Médisance, par un petit pavillon situé à l'encoignure de cette place et de l'ancienne rue Saint-Louis.

Il paraît que le feu se déclara dans la salle à manger des contrôleurs, séparée du magasin général par une simple cloison.

 

Des édifices incendiés, la tour de l'horloge de l'arsenal fut seule reconstruite en 1744.

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Royal Louis

 

Dans le port, faute de crédits suffisants, on se borna, de 1739 à 1741, à continuer le travail des cales et à installer un atelier de corderie dans les hangars du Moulin-à-Poudre.

 

Mais, en 1742, une certaine activité reprend.

 

On établit à la Pointe, la première rampe du Fer-à-Cheval et, dans la crique de Pontaniou, les forges des constructions navales, démolies en 1789, pour faire place aux forges actuelles.

 

Choquet de Lindu commence les importants travaux des trois grandes formes de Pontaniou, sur les plans et sous la direction de l'ingénieur Ollivier.

 

(À suivre.)

 

Ollivier LODEL.

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