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1929

L'histoire de Brest
par
Ollivier Lodel

37 sur 41

1783 - 1787

 

 

Source : la Dépêche de Brest 28 octobre 1929

 

L'un des premiers actes de la municipalité Raby est l’organisation d'une compagnie de pompiers, pour manœuvrer et entretenir les six pompes à incendie qui viennent d'être achetées.

 

Elle comprend six escouades, chacune de seize hommes, « choisis parmi les citoyens à talents, comme serruriers, maçons, charpentiers ».

Les clefs des locaux où sont remisées les pompes sont aux mains des chefs d'escouade, du fontainier et de quatre officiers municipaux.

 

En cas d'incendie, l'escouade arrivée la première sur le lieu du sinistre reçoit une gratification de 30 sols pour chaque homme et de 3 livres pour le chef.

La manœuvre des pompes est dirigée par l'ingénieur des ponts et chaussées, ou, en son absence, par le fontainier.

 

En récompense de leurs services, les pompiers sont exemptés de toute corvée de ville et leur capitation est modérée.

Ils doivent manœuvrer leur pompe tous les deux mois, en présence d'un officier municipal ou de l'ingénieur.

 

Ceux qui sont absents de l'exercice, sans excuse préalable, font vingt-quatre heures de prison.

Par contre, l'escouade qui, pendant l'année, « a manœuvré la pompe avec le plus de vivacité et d'intelligence », reçoit une gratification.

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L'armée et la marine coopèrent le plus souvent avec la communauté, pour lutter contre les incendies, et celle-ci vote pour les soldats et marins des gratifications.

 

Cependant, vers 1784, civils et militaires tendent à préciser leurs attributions respectives.

Un nouveau règlement concernant les incendies dans l'arsenal, interdit aux habitants de pénétrer ou de naviguer dans le port, sous prétexte de prêter leur concours à la marine, et en même temps fixe les conditions dans lesquelles les pompes de l'arsenal en sortiront, pour aller au feu en ville.

 

En 1789, à la suite de quelque malentendu avec la municipalité, le commandant de place Moynier et le comte d’Hector, commandant de la marine, déclarent qu’ils ne secourront plus la ville, en cas d’incendie.

 

On leur demande de continuer leurs secours, jusqu'à ce qu'un nouveau règlement soit élaboré, en faisant remarquer que la communauté a donné, pour le dernier incendie, 1.200 livres de gratification aux marins et soldats, mais la Révolution vint accentuer les dissentiments entre l'élément civil et les deux commandants, et empêcha pour longtemps toute conciliation.

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L'entretien d'une partie des quais et des cales est à la charge de la ville et, conformément à l'arrêt de 1684,

elle verse pour les travaux une somme annuelle de 1.200 livres, mais depuis longtemps, l'ingénieur de la place se l'attribue à titre de gratification.

Aussi les quais de la Penfeld sont-ils en très mauvais état.

 

À plusieurs reprises, l'intendant de la marine a prié la communauté de faire commencer les réparations nécessaires ; à chaque fois, celle-ci lui a répondu qu'elle s'occupait de la question.

L'intendant s'impatiente et recourt au procureur du roi de l'Amirauté.

 

La municipalité répond à l'attaque par une délibération assez ferme :

« Il n'est pas besoin d'employer envers elle ni l'autorité, ni les voies dispendieuses de la justice...

Elle est persuadée que MM. les Commandant et Intendant de la Marine emploieront désormais envers elle des procédés plus conformes aux égards qu'un corps de ville a droit d'attendre, et que sa conduite respectueuse semblait devoir lui mériter. »

 

La Communauté se montre cependant conciliante.

Elle fait établir le devis des travaux à effectuer et commence par la réfection complète de la cale de l'Amiral où embarquent tous ceux que leurs affaires obligent à passer de Brest à Recouvrance.

 

Ce petit conflit eut du moins pour le budget municipal un résultat immédiat ;

à partir de 1786, les 1.200 livres dépensées autrefois sans profit, ne furent plus payées à « Messieurs du Génie ».

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Fontaine à Lambézellec

 

On rebâtit, en 1783, la fontaine du quai Tourville, construite depuis plus d'un siècle, et la communauté décide que ;

« les armes de la ville y seront sculptées, du côté des maisons ;

celles de Mgr l'Intendant, du côté de la mer, et des inscriptions y seront gravées sur les deux autres faces ».

 

Armoiries et inscriptions, dues au ciseau de M. Lubet, maître sculpteur de la marine, furent martelées en 1791 et la fontaine du quai, inutilisée depuis fort longtemps, est le dernier vestige de l'ancien port de commerce, la partie la plus animée du Brest d'autrefois.

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En même temps que l'on s'occupe du service des eaux, il faut multiplier les douets ou lavoirs qui sont hors de la ville.

 

Il en résulte :

« que la plus grande partie des citoyens, qui par eux-mêmes ou leurs domestiques, lavent ou blanchissent les hardes et linges, sont obligés de se transporter dans toutes les saisons, un quart de lieu hors ville ;

qu'outre la peine et retardement qu'ils ont de se rendre et trouver une place au douet, ils courent très souvent des risques d'être non seulement volés, mais même attaqués dans leur honneur ».

 

Il faut construire des douets en ville, « pour empêcher que les habitants, craintifs avec raison, ne lavent aux pompes ».

La communauté est de cet avis et décide de construire cinq ou six lavoirs gratuits de chaque côté de la ville.

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Le bas de la Grand'Rue, depuis la porte de l'arsenal jusqu'au bureau des Armements, est impraticable, tant les pavés sont en mauvais état.

« Les voitures sont obligées, pour au pas verser, de rouler sur les banquettes, au grand danger des passants. »

 

La municipalité a décidé de relever les pavés, mais aux frais des propriétaires riverains.

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La ville n'a pas seulement à entretenir ses rues, ses quais et ses places publiques ;

il lui faut consacrer, tous les ans, des sommes assez élevées à mettre en bon état les grands chemins de la banlieue et, en particulier, celui de Brest à Landerneau.

 

En 1783, on apprend que les États ont accordé aux villes de la province une subvention de 200.000 livres, pour les aider à entretenir leurs banlieues.

Naturellement, la communauté de Brest, toujours gênée, demande sa part, en faisant remarquer qu'elle beaucoup dépensé pour ce service.

 

À la fin de 1785 seulement, elle est avisée qu'on lui accorde 1.000 livres.

Ce n'est pas une telle subvention qui peut diminuer sensiblement la charge de la ville, d'autant plus que les travaux viennent d'être adjugés à un prix très élevé et que l'entrepreneur réclame « contre l'obstination des gens de campagne à faire passer leurs voitures sur les banquettes ».

 

La communauté obtient de l'Intendant une ordonnance prescrivant « aux conducteurs de tenir la chaussée du chemin, sous peine d'amende, dont une moitié sera attribuée à l'adjudicataire et l'autre à la brigade de maréchaussée, établie près les glacis de Brest ».

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Les droits d'octroi, qui constituent la presque totalité des ressources municipales et qui, pendant la guerre, se sont élevés jusqu'à plus de 107.000 livres, sont retombés entre 35.000 et 40.000 livres.

 

Faute d'argent, on ne peut entreprendre de grands travaux.

On s'en tient à des projets d'embellissement et d'utilité publique qui furent approuvés par arrêt du Conseil du 28 juillet 1786 :

 

Construction de halles dans l'enfoncement du Pont-de-Terre (place La Tour d'Auvergne) ;

d'un perron à l'église Saint-Louis et d'une place qui fera disparaître les baraques encombrantes de l'ancienne place du Vieux Marché ;

établissement des tueries hors ville, pour remplacer celles qui, depuis un siècle, se trouvent rassemblées place Kéravel.

 

Le séjour à Brest, en septembre 1785, de M. Bertrand de Molleville, intendant de la province, avait puissamment contribué à l'obtention de cet arrêt du Conseil et, l'année suivante, M. Maury, architecte des domaines du roi, venait à Brest dresser les plans des tueries et du perron de Saint-Louis.

 

Il fut décidé que les tueries seraient établies sur le bord de la mer, à Porstrein, près des remparts du cours Dajot.

Mais voici que le génie intervient.

 

Le terrain où l'on va bâtir appartient aux fortifications, par conséquent au roi, et le maréchal de Ségur empêche tous travaux, avant que la communauté n'ait promis de restituer le terrain, en cas de besoin, et de payer à l'état-major de la place, pour le dédommager de la privation d'un emplacement dont il ne se servait pas, une rente annuelle de 63 livres.

 

(À suivre.)

 

OLLIVIER LODEL.

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