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1936

Découverte d'un trésor à Trémaouézan
par Charles Léger

 

20 juin 1936 - Trémaouézan 00.jpg

 

Source : La Dépêche de Brest 20 juin 1936

 

Un journal régional a imprimé ceci sous la rubrique Trémaouézan :

 

Depuis plusieurs jours, on parle d'une découverte archéologique importante, qui aurait été faite dans une propriété de la commune par un radiesthésiste bien connu dans la région, M. Gradel, de Plounéventer.

 

Sur ses indications, on aurait trouvé un souterrain contenant une certaine quantité d'armes diverses du commencement du 17e siècle, ainsi que de nombreux objets domestiques comprenant de l'orfèvrerie très artistement travaillée et de grande valeur.

 

Vraiment, cela ne manquait pas d'intérêt, car, enfin, depuis le temps que l'on parle de trésors dans notre région, nous n'aurions pas été fâchés de pouvoir en contempler un.

 

Au surplus, M. Gradel n'est pas pour nous un inconnu.

Nous l'avons déjà rencontré dans des conditions du même genre et nous avons eu l'occasion de le voir opérer sur terrain propice avec son pendule.

 

À cette époque de pleine floraison, par ce soleil, la route de Landerneau, Plouédern, Plounéventer est des plus jolies.

À flanc de coteau, elle domine une longue et belle prairie encadrée de frais boqueteaux.

 

Mais notre radiesthésiste a profité du jeudi pour rechercher un endroit plus frais encore : Brézal.

Magnifique promenade que celle-là, sous une voûte de feuillage touffu, au beau milieu d'un bois épais ;

puis c'est le bel étang qui surplombe Pont-Christ.

 

Vraiment, il n'est pas de cadre mieux fait pour vous prédisposer à la vision d'un trésor.

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15 juin 1936 - Trésor 01.jpg

 

Voici M. Gradel, à qui nous présentons l'entrefilet reproduit plus haut.

 

— Pas une ligne, pas un mot de vrai là-dedans ; je n'ai jamais opéré à Trémaouézan.

On m'a bien demande d'aller rechercher une fontaine comblée et recouverte depuis un temps infini car, disait-on, elle avait provoqué le choléra dans la commune, mais je ne m'y suis pas encore rendu.

Quant à cette découverte, j'ignore complètement comment elle put être annoncée et vous m'en voyez profondément surpris.

 

Désillusion !

Ce n'est pas encore aujourd'hui que nous verrons l'un de ces fameux trésors enfouis depuis tant de siècles.

 

Mais M. Gradel ne partage pas notre déception ;

il sait si bien qu'à défaut d'un trésor à Trémaouézan il en est d'autres, dont les radiations lui sont parvenues.

Il en a révélé l'existence après les avoir nettement situés.

 

Tout récemment encore, il s'en fut à Morlaix, où, depuis longtemps, des recherches sont entreprises :

à l'emplacement qu'occupait jadis la chapelle de Notre-Dame du Mur, près des fortifications de l'ancien château, on creusait sous une boulangerie afin de retrouver une galerie souterraine.

 

Des travaux de ce genre en pleine ville n'eussent peut-être pas attiré l'attention si l'on n'avait dû, se heurtant au rocher, utiliser la mine.

Cela fit du bruit, naturellement, et l'on apprit ainsi que, là encore, on cherchait un trésor.

 

On avait fait appel à des radiesthésistes en renom qui affirmaient l'existence du précieux dépôt.

M. Gradel, après expériences, avait confirmé l'opinion de ses collègues.

 

Nous avions déjà rencontré M. Gradel, il y a un an, à propos d'une affaire du même genre.

Cette fois, le trésor gisait en bordure de la route nationale Landerneau-Landivisiau, derrière la carrière du Moulin-à-Papier, non loin de Pont-Christ.

 

Nous avions dit, à l'époque, que des précisions avaient pu être fournies sur la nature du trésor qui consistait en neuf coffres contenant de l'or, de l'argent, des pierres précieuses, des parchemins.

L'un d'eux enfermait encore une crosse abbatiale d'or.

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15 juin 1936 - Trésor 02.jpg

 

À ce propos, M. Gradel avait reçu une bien curieuse visite.

En mai 1934, deux personnages venus de Paris se présentaient chez lui.

L'un se présentait comme Américain ; M. William Seabaker ; l'autre comme prospecteur.

 

M. Seabaker, connaissant les excellentes relations qu'entrenait M. Gradel avec M. Le Cann, propriétaire de la carrière, lui demanda d'obtenir de ce dernier la cession de 200 mètres carrés de terrain.

Le prix lui importait peu ; il consentait à engager jusqu'à un million dans cet achat.

 

En outre, il offrait une commission de 500.000 francs si les pourparlers réussissaient et une indemnité de 100.000 francs si les démarches demeuraient vaines.

 

M. Gradel s'étonna.

Acheter un million deux cents mètres carrés d'un terrain caillouteux, abrupt, inutilisable, cela sentait le mystère.

 

Comme il refusait, M. Seabaker lâcha son secret.

Le terrain dont il s'agissait recélait un trésor d'une valeur considérable.

Il l'avait appris par son compagnon, prospecteur doué de remarquables qualités et possesseur d'un appareil de détection vraiment merveilleux.

 

M. Gradel ne se décidant pas, l'Américain le voulut convaincre.

 Il le conduisit au sommet de la carrière et invita le prospecteur à opérer.

 

Celui-ci découvrit une sorte de boîte d'ébonite portant des cadrans et un verre dépoli.

Il parcourut le terrain puis s'immobilisa.

Sur le verre dépoli se dessinaient les neuf coffres.

Sur l'un des cadrans, les aiguilles indiquaient la nature des métaux, sur l'autre la profondeur des objets enfouis était révélée.

 

M. Gradel admira la perfection de l'appareil, mais maintint son refus.

Il ne consentait pas à tromper M. Le Cann et il ne lui plaisait pas de voir emporter par un étranger des objets et des documents enfouis chez nous depuis une dizaine de siècles.

 

Cependant, directement derrière la crête de la carrière, le propriétaire avait fait faire des recherches.

Le trésor gisait à 15 mètres.

Les expériences entreprises par M. Gradel avec un pendule de son invention le confirmaient.

 

Tout cela se faisait en grand, mystère ; puis un jour les travaux furent arrêtés.

 

On était parvenu à une profondeur d'environ dix mètres.

 

On s'étonna de voir interrompre de pareilles recherches si près du but.

Quelqu'un proposa de, creuser une galerie horizontale pour accéder rapidement à la chambre du trésor, mais le propriétaire ne le permit pas

 

Le silence se fit sur cette affaire.

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20 juin 1936 - Trémaouézan 01.jpg

 

Cependant, une nouvelle se répandit récemment :

Le trésor avait été découvert.

Deux vasques d'or massif de 42 kilos chacune avaient été emportées à Paris.

 

Par qui avaient été repris les travaux ; comment était-on parvenu au but ?

Il est impossible de le savoir.

Toute question posée sur ce sujet dans le voisinage de la carrière demeure sans réponse.

 

Pourtant, le succès ne semble plus faire de doute depuis qu'un jour le propriétaire lui-même confia à quelques amis, à Landivisiau, que les vasques découvertes avaient le volume d'une tête de distributeur d'essence.

 

Possible, mais que sont devenus les neuf coffres qui s'étaient si nettement profilés sur le détecteur de l'Américain ?

Le saura-t-on jamais ?

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