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1897

Les tramways électriques
à Brest


 

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Source : La Dépêche de Brest 1 juin 1897

 

Brest aura, avant un an, des tramways électriques.

 

Les avantages du nouveau réseau ne sont pas discutables.

Il suffit, pour s'en convaincre, de jeter un coup d'œil sur le mémoire descriptif établi par les concessionnaires,

MM. Hérodote et Laval.

 

Brest n'est aujourd'hui qu'imparfaitement relié, en effet, avec ses faubourgs.

Les omnibus-tramways qui ont succédé à l'antique et vénérable guimbarde d'antan s'arrêtent à mi-chemin.

Si l'on va à Saint-Pierre, il faut descendre à Recouvrance, et l'autre côté n'est pas mieux partagé.

 

Le faubourg de Kérinou et une partie de la commune de Lambézellec, dit le mémoire, que nous citons textuellement, sont desservis d'une façon insuffisante par les chemins de fer départementaux, qui n'ont que trois ou quatre trains par jour dans chaque sens.

Le port de commerce, enfin, est complètement séparé de la ville, sans aucun moyen de transport pour les voyageurs.

 

Les nombreuses marchandises arrivant par les bateaux sont difficilement transportées par les voitures à chevaux, qui ont de la peine à remonter les rampes qui conduisent en ville et aux gares des chemins de fer.

 

La différence d'altitude entre le quartier de Recouvrance et la place de la Liberté, ainsi que les pentes très raides de la plupart des rues, ont été jusqu'ici le principal obstacle à l'établissement d'un moyen pratique de locomotion dans la ville de Brest.

La faible largeur de la rue de Siam rend impossible l'emploi, pour la traction, de moteurs encombrants, ou faisant du bruit ou de la fumée.

 

La solution du problème, impossible avec des moteurs à vapeur, à gaz ou à pétrole, est facilement donnée par l'électricité.

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Les tramways automobiles électriques possèdent une puissance de traction assez grande pour desservir toutes les rampes que les conditions d'adhérence permettent d'aborder, c'est-à-dire jusqu'à 0m10 et 0m11 par mètre.

 

Le faible diamètre des fils conducteurs, et par suite leur faible visibilité, ainsi que l'ornementation des poteaux ou des consoles qui les soutiennent, ont permis l'installation de ce système dans les villes les plus soucieuses de leur esthétique.

Paris, Lyon, Marseille et la plupart des autres grandes villes de France emploient actuellement pour leurs tramways la traction électrique de préférence à tout autre mode de production d'énergie.

 

De plus, les voitures électriques, construites avec élégance, ne faisant ni bruit, ni fumée, sont peu encombrantes et n'effraient point les chevaux.

Leur vitesse est modérée à volonté et leur arrêt est instantané.

Il leur est donc facile de circuler sans aucun danger dans les rues les plus fréquentées.

La voie, formée par un rail et un contre-rail avec parage dans l'entre-voie, pour l'intérieur de la ville, est exactement à fleur du sol et ne gêne pas la circulation des voitures.

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Le tracé

 

Le tracé se composera de deux lignes principales :

Le point de départ de la première serait sur la place de la mairie de Saint-Pierre Quilbignon.

 

Elle suivrait le chemin de grande communication n°12 de Brest au Conquet jusqu'à l'octroi.

La voie suivrait ensuite la rue de la Porte, la rue du Pont, traverserait le pont tournant, descendrait la

rue de Siam et l'avenue de la Porte de Landerneau, traverserait la place de la Liberté pour suivre ensuite la rue de Paris, en Brest, jusqu'à l'octroi et la route de Paris, en Lambézellec, jusqu'à la rue Inkermann, où serait le point terminus de la première ligne.

 

La longueur de cette ligne sera d'environ 5 kilomètres 700 mètres et, pour obtenir une circulation intensive entre la rue Inkermann et la porte du Conquet, la voie sera doublée dans la plus grande partie du parcours.

 

La deuxième ligne partirait du port de commerce, près de l'octroi, pour remonter les rampes d'accès aux gares, traverserait la rue de la Poterne, emprunterait la rue de la Mairie, puis suivrait la rue Fautras pour descendre par la rue Portzmoguer et la rue du Bouguen à la route départementale n°10 de Brest à Saint-Renan, qu'elle suivrait jusqu'à la rue de Penfeld, où serait le point terminus.

La longueur de cette ligne serait d'environ 3 kilomètres 100 mètres.

 

Au sujet de cette ligne, les rétrocessionnaires, sur la demande qui leur en a été faite, ont accepté de prolonger la ligne, d'une part de l'octroi du port de commerce à la défense mobile, et d'autre part de Kérinou au bourg de Lambézellec jusqu'à l'église.

 

La longueur totale du tracé serait environ de 9 kilomètres 300.

Le minimum de rayons de courbes sera de 20 mètres, et si l'on comprend les prolongements ultérieurs, la ligne atteindra au minimum 12 kilomètres 500.

 

La largeur de la voie sera d'un mètre.

Dans la traversée de la ville, les rails seront noyés dans un pavage et posés au niveau du sol, sans saillie ni dépression, suivant le profil de la voie publique.

 

Toutes les rues sont assez larges, sauf la rue de Siam, qui est très étroite dans sa partie basse, à la hauteur de la rue Ducouédic ;

mais avec le système de voie noyée dans le pavage, la circulation des voitures ordinaires n'est nullement gênée.

Le matériel roulant n'ayant que deux mètres de largeur, toutes saillies latérales comprises, il restera, même au passage du tramway dans la partie la plus étroite de la rue, un espace largement suffisant pour permettre à une voiture ordinaire de circuler ou de stationner.

 

Le tramway aura des arrêts fixes.

Leur nombre et leur emplacement seront fixés ultérieurement, d'accord avec la municipalité.

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Genre de service et mode d'exploitation

 

Le tramway sera affecté au service des voyageurs et facultativement des marchandises.

Les voitures seront automobiles, à double moteur ; on pourra cependant ajouter des voitures de remorque pour les besoins du service, si une trop grande affluence de voyageurs en nécessite l'emploi.

 

L'électricité sera produite dans une station centrale qui sera située à Kérinou sur l'emplacement de la corderie Lebeurier.

 

La transmission en sera faite au moyen de fils aériens soutenus par des poteaux ou des consoles en acier ou en bois.

Le retour du courant se fera par les rails et la terre.

Le poids du wagon sera d'environ six tonnes, de façon à pouvoir circuler sans inconvénient sur le pont tournant.

Il pourra transporter 36 voyageurs au minimum.

 

La vitesse du tramway en marche sera de 15 à 20 kilomètres à l'heure.

L'allure sera réduite dans la partie étroite des rues.

 

Le nombre minimum de tramways sera de :

 

1er tronçon. — De la rue Inkermann à la porte du Conquet :

Toutes les dix minutes, de sept heures à dix heures du matin ; toutes les cinq minutes, de dix heures du matin à six heures du soir, et ensuite toutes les dix minutes jusqu'à la fin du service.

 

2e tronçon. — Des gares à Kérinou et au port de commerce :

Toutes les quinze minutes.

 

3e tronçon. — De la porte du Conquet à Saint-Pierre Quilbignon :

Toutes les vingt minutes, et toutes les dix minutes les jeudis et les dimanches.

 

Prix de transport

 

Ligne de la rue Inkermann à Saint-Pierre Quilbignon

 

1ère section. — De la rue Inkermann â la porte du Conquet, 0 fr. 10.

2e section. — De la porte du Conquet à Saint-Pierre Quilbignon, 0 fr. 10.

Ligne des gares à Kérinou

 

Une seule section, 0 fr. 10.

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Correspondance

 

Le prix de transport sur chaque section par correspondance sera de 0 fr. 05.

Si plusieurs sections sont empruntées successivement, le prix de chacune de ces sections, sauf la première, sera abaissé de 0 fr. 05.

Dans ce prix, le péage entre pour 2/3 et le transport pour 1/3.

 

Au-dessous de quatre ans, les enfants ne paient rien, à la condition d'être portés sur les genoux des personnes qui les accompagnent.

De quatre à sept ans, ils paient demi-place, ayant droit à une place distincte ;

toutefois, dans un même compartiment, deux enfants ne peuvent occuper que la place d'un voyageur.

Au-dessus de sept ans, ils paient place entière.

 

Abonnements

 

Trains ouvriers. — Quatre francs par mois, quel que soit le parcours, matin et soir.

 

Cartes de circulation annuelles pour tout le réseau : 60 francs.

 

Les trains de voyageurs se composeront en général d'une seule voiture, dont la longueur ne dépassera pas huit mètres.

Ils pourront toutefois, se composer de quatre voitures dont la longueur totale ne dépassera pas trente-deux mètres, si les besoins de la circulation l'exigent.

 

L'accès des chemins publics ou privés sera assuré, puisque le rail sera noyé dans un pavage ou un empierrement, sans avoir ni saillie ni dépression.

 

En ville, le minimum de la distance qui séparera la zone affectée au tramway des trottoirs sera de 0m30.

En rase campagne, la distance qui séparera la zone du tramway des propriétés riveraines sera de 0m50.

 

La concession est demandée pour une durée de cinquante années.

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Conclusion

 

Il est facile de conclure, des données qui précèdent, dit en terminant le mémoire des concessionnaires, que l'installation d'un tramway électrique dans les principales rues de Brest, ainsi qu'entre la ville, ses faubourgs, Kérinou et la commune de Saint-Pierre Quilbignon, contribuera au développement et à la richesse du pays.

Il amènera peut-être, par la facilité des communications, l'établissement d'industries nouvelles dans les environs ; dans tous les cas, il apportera aux habitants un confortable et un bien-être que beaucoup de villes moins importantes que Brest possèdent déjà.

 

Personne n'y contredira.

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