1906
Non à l'usine d'acide sulfurique
à Saint-Marc
Source : La Dépêche de Brest 5 janvier 1906
Nous recevons la lettre suivante :
Monsieur le rédacteur en chef,
Une enquête de commodo et incommodo est ouverte, dans la commune de Saint-Marc, jusqu’au 30 janvier, pour la construction d'une usine d’acide sulfurique, que l'on se propose d'ériger sur la route du Vieux Saint-Marc au Moulin-Blanc, à toucher l'enclos où nos jeunes lycéens vont, le jeudi et le dimanche, prendre leurs ébats.
Cela serait très nuisible à leur santé.
Ce coin, sans contredit le plus joli de la commune de Saint-Marc, serait complètement sacrifié, dans un rayon de plus d'un kilomètre, par les émanations délétères s'échappant de cette usine.
Aussi, confiant dans la loyauté de nos conseillers municipaux qui, avant tout, doivent être soucieux de la prospérité de la commune, de son état sanitaire et des intérêts de leurs concitoyens, dont ils ont la garde, nous osons espérer qu'ils ne sanctionneront pas par un vote la construction de cette usine, car, d'après la loi, ce genre de construction ne peut être fait que dans un rayon de 500 métros de toute propriété bâtie.
Veuillez agréer, etc.
Un groupe d'intéressés.
Source : La Dépêche de Brest 7 janvier 1906
Monsieur le rédacteur en chef,
Malgré le peu de cas qu'il y a généralement lieu de faire des lettres anonymes et, pour éviter que mon silence ne soit faussement interprété, je vous demande, monsieur le rédacteur en chef, la permission de répondre à la lettre parue, sous la rubrique Saint-Marc, à propos d'une enquête, dans la Dépêche du 5 janvier.
« Cette lettre est signée : « Un groupe d'intéressés. »
« Il est remarquable que toute entreprise un peu importante se heurte presque toujours à la résistance opiniâtre d'un groupe de personnes qui s'intéressent à la faire avorter.
« Bien des mobiles inconnus, des craintes chimériques, des réflexions amères, des coalitions secrètes, des lettres anonymes se rencontrent, se comprennent, se groupent.
« Une fois formé, le groupe des intéressés se met au travail.
« Par tous les moyens, il faut démontrer que l'entreprise projetée est contraire à l'intérêt général, contraire à l'hygiène, contraire à l'esthétique, etc.
« Tous ces beaux sentiments, ces phrases généreuses, ces démarches philanthropiques, ces appels aux élus de la nation, ont un but facile à saisir :
Masquer l'intrigue, cause unique et bien terre à terre de toute la polémique.
La chose n'est pas toujours aisée, paraît-il, et je n'en veux pour preuve que la pauvreté des arguments contenus dans la lettre précitée.
« Je n'essaierai pas de convaincre le « groupe des intéressés » que la fabrication de l'oléum a justement ceci de particulier qu'elle ne dégage, qu'elle ne peut dégager aucune émanation délétère et que, par suite, elle ne peut nuire à aucune santé.
« Je n'aurai pas davantage la naïveté d'essayer de lui démontrer que la prospérité d'une commune est intéressée à la vitalité des industries qui s'y installent et qu'elle s'accroît en raison directe du développement et de l'importance que ces industries peuvent prendre par la suite.
« Aucune évidence n'a convaincu, ne convaincra jamais l'obstination irréductible d'un groupe intéressé.
« Aussi bien, monsieur le rédacteur en chef, n'eussé-je pas mis votre courtoise hospitalité à contribution, si l'on ne m'avait pas fait observer à quels peu charitables motifs mon silence eût été attribué.
« Veuillez agréer, etc.
« L’administrateur-directeur de la Société des produits chimiques de l'Ouest, »
« (ILLISIBLE). »
Source : La Dépêche de Brest 15 janvier 1906
Nous recevons de nombreuses réclamations au sujet du projet d'installation d'une usine de produits chimiques, près de la propriété du lycée, au Vieux Saint-Marc.
Voici d'abord celle d'une propriétaire dont l'habitation se trouverait située dans la fumée même des cheminées de l'usine projetée :
Paris, le 9 janvier.
Monsieur le rédacteur,
J’ai lu, dans la Dépêche des 5 et 7 janvier les articles que vous avez publiés relativement à l’usine que la Société des Produits chimiques de l’Ouest se propose d'établir à Saint-Marc, et je vous prie de vouloir bien insérer dans votre journal la réponse suivante à M. le directeur de cette société :
Je suis une des principales intéressées dans cette affaire, puisque l’usine projetée nuirait certainement beaucoup à ma propriété.
Mais je mets de côté toute préoccupation personnelle pour voir seulement le tort causé par l’établissement de cette usine à la population de Brest et des environs.
En effet, depuis que les faubourgs se sont étendus, depuis qu’il faut faire quatre ou cinq kilomètres pour trouver la campagne du côté de Saint-Pierre ou de Lambézellec, les promeneurs se portent en foule à Saint Marc, seul endroit où ils trouvent de la verdure et du grand-air pour eux et leurs enfants.
En outre, la grève de Saint-Marc est la seule à proximité de Brest, puisque La Ninon n'existe plus et que les plages du Moulin-Blanc sont rendues impraticables par les acides et les déchets de la poudrerie.
La grève de Saint-Anne étant beaucoup plus éloignée, un grand nombre de familles ne veulent ou ne peuvent prendre le tramway pour s'y rendre.
La Société des Produits chimiques de l'Ouest a choisi le Vieux Saint-Marc à cause de la proximité du chemin de fer du port de commerce qui lui permet de transporter ses marchandises dans des conditions économiques ;
il serait très fâcheux de soumettre à cette considération d'intérêt privé la cause du plus grand nombre, d'autant plus qu'il serait facile de trouver d'autres termes, présentant des avantages analogues, où cette usine pourrait s'établir sans nuire à personne.
M. l'administrateur de la Société des Produits chimiques dit aussi que la fabrication de l'oléum ne donnera ni fumée, ni mauvaises odeurs.
C'est possible, quoique peu probable, puisque cette fabrication est classée dans les produits les plus nuisibles.
Dans tous les cas, les déchets et résidus de ces produits ne seront sûrement pas inoffensifs, et c'est sur la grève de Saint-Marc qu'ils seront déversés, au grand détriment de la santé publique.
C'est sur ces considérations, parfaitement justifiées et raisonnables, que je me fonde pour prier la commission d'enquête de prendre en considération les réclamations des habitants de Saint-Marc.
Réclamations qui concordent, j'en suis sûre, avec les vœux de la population de Brest.
Veuillez agréer, monsieur le rédacteur, l'assurance de ma considération.
E. DE ROQUANCOURT,
Saint-Marc, près Brest. 15, rue de la Planche, Paris.
Monsieur le rédacteur,
Connaissant votre extrême obligeance et votre impartialité, nous venons vous prier de vouloir bien insérer la note suivante :
L'endroit où l'on se propose d'ériger l'usine d'acide sulfurique est le centre d'un cercle dont le rayon a 500 mètres de longueur.
Cette usine, classée dans la première catégorie, c'est-à-dire dangereuse, insalubre et incommode, ne devrait être construite qu'à 500 mètres de toute propriété.
Dans l'intérieur de ce cercle, pivotant autour de l'usine projetée, se trouvent placées, à différentes distances, au moins 50 propriétés habitées et, par conséquent, comprises dans la zone déclarée dangereuse par la loi.
Aussi, le groupe d'intéressés, soucieux de l'hygiène, de la prospérité de la commune et des intérêts en cause, se demande comment un industriel a pu demander à M. le préfet du Finistère l'autorisation de construire pareille usine au milieu de tant d’habitations.
Cet emplacement a été choisi par les industriels tout simplement pour être à proximité d'une voie ferrée, ce qui leur épargnerait des frais de charroi et, par conséquent, leur ferait réaliser un plus gros bénéfice.
Certes, chacun s'arrange au mieux de ses affaires, mais il est un intérêt qui prime tous les autres, c'est celui de l’hygiène publique.
Or, partout où des usines du genre de celle que l'on essaie d'imposer à notre voisinage immédiat ont été installées, le vide s'est fait autour de ces foyers d'infection et de miasmes.
Nous le répétons :
Toute une colonie de Brestois est venue s'installer au vieux Saint-Marc, dans une région saine, heureuse et tranquille.
Et ceux-là, certes, seraient allés ailleurs si l'usine en question avait été construite là où l'on veut la mettre maintenant.
Encore une fois, nous supplions M. le maire et le conseil municipal de prendre en main la défense de leurs administrés.
Il ne devra pas oublier, lui qui est un démocrate convaincu, que la plage du vieux Saint-Marc est la plage préférée de la population ouvrière de Brest et du quartier de l'Annexion.
Or, cette plage sera infectée, couverte de détritus et d’ordures, si l'usine vient s'installer chez nous.
Ce serait sacrifier la santé de tous à l'intérêt d'un seul qu'autoriser la construction de cette usine. M. Péron ne le voudra pas.
Un groupe d'habitants.
*
**
Source : La Dépêche de Brest 17 janvier 1906
Source : La Dépêche de Brest 20 janvier 1906
Pour lire la suite de l'article : cliquez ici
*
**
Source : La Dépêche de Brest 21 janvier 1906
Pour lire la suite de l'article : cliquez ici
*
**
Source : La Dépêche de Brest 22 janvier 1906
Pour lire la suite de l'article : cliquez ici
*
**
Source : La Dépêche de Brest 23 janvier 1906
Pour lire la suite de l'article : cliquez ici
*
**
Source : La Dépêche de Brest 29 janvier 1906
Pour lire la suite de l'article : cliquez ici
*
**
Source : La Dépêche de Brest 5 février 1906
Source : La Dépêche de Brest 22 décembre 1906
Pour lire la suite de l'article : cliquez ici
*
**
Source : La Dépêche de Brest 9 décembre 1907
Source : La Dépêche de Brest 14 décembre 1907