1927
Le prix de l'essence
Automobilistes défendez-vous !
Source : La Dépêche de Brest 13 mars 1927
D'octobre 1926 à fin janvier 1927, les prix de l'essence allèrent en décroissant.
« Ils suivent la baisse de la livre sterling », put-on penser alors en escomptant pour l'avenir, avec la stabilisation du franc aux environs de 123, le maintien des cours pratiqués à mais l'époque où, pour la première fois l'essence atteignit ce taux.
Certains journaux parisiens allèrent même jusqu'à prévoir une baisse assez sensible.
Hélas I Hélas !
De 209 à 194 francs (tourisme et poids lourd) en fin janvier, à Brest, l'hectolitre d'essence passa, une semaine plus tard à 229 (*) et 204 francs, pour continuer ensuite sa progression inadmissible, sinon inexplicable.
(*) 229 Francs l'hectolitre en 1927 = 1,49 Euros le litre en 2021
Car l'augmentation d'une denrée telle que l'essence s'explique si l'on considère que son marché est entre les mains de quelques grosses firmes.
Celles-ci sont-elles en désaccord ?
La concurrence joue ; les prix baissent.
S'entendent-elles ?
Elles agissent alors comme un trust, et le consommateur est à leur merci.
C’est ainsi que la baisse de janvier, provoquée par une mésentente, ne fut pas durable.
Des sociétés qui en se groupant, concluent un monopole de fait, n'ont pas intérêt à se faire la guerre...
Elles ne tardèrent pas à se réconcilier.
Des protestations
À Paris, où l'essence est moins chère qu'à Brest — nous verrons tout à l'heure pourquoi — de nombreuses associations d'automobilistes ou de tourisme se sont émues et l’un des députés de la Seine, M. Leboucq, sur leur suggestion, a questionné M. Bokanowski, ministre du Commerce à ce sujet.
La réponse ministérielle est encore inconnue, mais, comme le disait un de nos confrères, « il est évident que l'émotion considérable provoquée par la hausse actuelle ne pourra s'apaiser que si des déclarations nettes et des explications valables sont fournies par le gouvernement ».
La vente d'un produit de première nécessité, comme l’essence effectuée sans contrôle sérieux, par un groupe privilégié, est inadmissible.
Notre cas particulier
Les consommateurs finistériens ont encore plus de raisons de s'indigner que ceux de la Seine.
Chacun connaît le système qui préside à rétablissement des prix de l'essence et qui veut — étant basé sur le nombre de kilomètres séparant chaque localité du port d'importation le plus proche (Rouen, Sète ou Bordeaux) — que le tarif brestois soit plus élevé de 18 francs par hectolitre que celui de Rouen.
Méthode appliquée avec une telle rigueur, qu'un détaillant de Landerneau, desservi par un dépôt de notre ville, paiera moins cher son essence qu'un détaillant brestois s'approvisionnant directement au même dépôt, sans frais de transport pour celui-ci.
Brest recevant depuis plusieurs mois par mer, et non plus par fer, l'essence qui se consomme dans la majeure partie du département, il semblerait normal de créer, pour notre ville et ses environs, un cas particulier à côté du barème en vigueur.
Notre port n'est pas un importateur direct, nous le savons, il ne l'est pas encore, tout au moins.
Les approvisionnements d'essence lui viennent d'autres ports français.
On ne saurait donc exiger de voir appliquer sur notre place les tarifs de Rouen, par exemple.
Mais il n'en reste pas moins que la différence de 18 francs à l'hectolitre que subissent nos concitoyens n'a plus sa raison d'être.
Cette différence devrait être réduite, nous semble-t-il.
Et les automobilistes finistériens ont deux raisons au lieu d'une pour protester contre les cours actuels.
Ils se réunissent justement aujourd'hui.
C'est une occasion d'amorcer une campagne.