1939
Les ravages de la vanesse
dans la région de Morlaix
Source : La Dépêche de Brest 19 juillet 1939
Nous avons signalé brièvement, hier, que la vanesse de l'artichaut, qui sévissait depuis quelque temps dans la région saint-politaine, avait fait son apparition dans les environs de Morlaix et avait causé d'importants dégâts dans les plantations de Sainte-Sève, de Saint-Martin-des-Champs, de Ploujean, de Plourin-les-Morlaix et de Morlaix.
Pour avoir une idée exacte du désastre dont souffrent aujourd'hui nos cultivateurs, nous nous sommes rendus hier matin à Saint-Martin-des-Champs et à Sainte-Sève.
Là, comme ailleurs, hélas ! les dégâts sont considérables.
Dans le premier champ que nous avons visité, les plants d'artichauts étaient réduits à l'état squelettique, comme s'ils avaient été rongés par le feu.
Seules, les têtes d'artichauts, auxquelles ne s'attaquent pas les chenilles, sont indemnes, mais elles n'ont pas de valeur pour les cultivateurs puisqu'elles ne sont pas encore arrivées à maturité.
Sur de nombreux plants, d'ailleurs, les chenilles, après avoir dévoré les feuilles, ont atteint la tige, qui s'est brisée de telle sorte que la tête pend lamentablement.
C'est un spectacle bien triste que de voir une vaste plantation, bien vigoureuse et bien verte, il y a quelques jours, et qui semble aujourd'hui être complètement roussie.
Dès qu'on s'approche, on aperçoit de nombreuses chenilles noires, avec une raie jaune de chaque côté, qui s'accrochent encore à ce qui reste des nervures des feuilles et de la tige.
Dans un champ voisin, les chenilles n'ont accompli leurs terribles ravages que sur une moitié, mais elles avancent rapidement et les feuilles encore entières en sont littéralement couvertes, de sorte qu'elles semblent toutes noires.
Bientôt, dans quelques heures peut-être, la plantation entière sera anéantie.
Nous avons observé, hier, assez longuement, la vanesse dans son travail destructeur.
Dans un champ qui venait d'être envahi, on percevait nettement un petit crissement qui ne pouvait être provoqué que par la multitude de chenilles grouillant sur les feuilles des plants d'artichauts.
Fait curieux, ces chenilles se déplacent très vite et semblent douées d'un certain sens de l'orientation !...
Nous les avons vues, hier, quitter par milliers une plantation qu'elles venaient de dévaster, traverser un champ et franchir un talus pour arriver dans un autre champ où se trouvaient de jeunes plants d'artichauts qui étaient déjà sérieusement mis à mal.
Le sol était couvert de chenilles sur une grande distance et c'était un phénomène vraiment surprenant à voir.
Dans un autre champ, au contraire, les chenilles se sont attaquées aux plants par le milieu, mais le cercle roux ne tardera pas, hélas ! à s'étendre.
Les cultivateurs ont voulu, au début, lutter contre le fléau.
Certains ont essayé des mélanges à base de nicotine qui ne leur ont pas donné entière satisfaction, parce qu'ils étaient peut-être mal dosés, puis ils se sont découragés.
Pendant ce temps — et sans doute parce qu'on n'a pas agi avec suffisamment d'énergie et d'assurance dès les premières atteintes du mal — la vanesse poursuit ses effroyables ravages.
Il faut espérer que les pouvoirs publics viendront en aide à nos cultivateurs si durement éprouvés.
En tout cas, nous conseillons aux intéressés de suivre les conseils qui leur ont été donnés par M. Perrault, directeur des services agricoles du Finistère, conseils que La Dépêche a publiés dans son numéro de lundi dernier.
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