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1929

Rapport annuel
du
bureau d'hygiène de Brest

 

 

Source : La Dépêche de Brest 9 novembre 1929

 

Voici le rapport adressé par M. le docteur Jauffret, directeur du Bureau d'hygiène,

à M. le docteur Le Gorgeu, maire de Brest :

 

Monsieur le maire,

 

J'ai l'honneur de vous soumettre ci-après le rapport annuel concernant le fonctionnement des services d'hygiène pendant l'année 1928.

 

Avant toute chose, je tiens à rappeler le souvenir du docteur Paul Bodros, qui fut si longtemps directeur îles services d'hygiène.

Ce rapport m'a été un travail facile, grâce à l'ordre et à l'excellente organisation qu'il avait su créer.

Je n'ai eu qu'à prendre ses documents ; c'est leur résumé que vous trouverez ici.

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I. — Assainissement de la localité et voirie

 

Les travaux d'assainissement ont consisté en réfection de chaussées, aménagements des trottoirs et des caniveaux.

On en trouvera plus loin la liste.

Leur montant s'est élevé â la somme de 527.456 fr. 60.

 

La réfection de la rue Jean Jaurès, tant réclamée par mon prédécesseur, va enfin être effectuée, un accord étant intervenu entre la ville et l'administration des ponts et chaussées.

Au moment où paraîtront ces lignes, le travail sera en cours d'exécution, apportant une meilleure hygiène pour la plus grande artère de la ville de Brest.

 

En ce qui concerne les « habitations à bon marché » (H.B.M), le programme de l'Office communal est terminé.

Ces immeubles abritent 229 ménages répartis comme suit :

Ménages de 4 enfants et au-dessus, 17 ;

ménages de un à quatre enfants, 163 ;

ménages sans enfants, 17.

 

Et, outre, il reste trois appartements pour commerce à louer.

 

La pièce est louée d'après les prix du barème (318 francs au 1er étage).

 

La ville a construit un égout pour évacuer les fosses et les eaux ménagères des H. B. M. dans le collecteur de la rue de la Vierge : Longueur, 650 mètres.

 

Le raccordement d'eau des petites habitations individuelles de Kerigonan est opéré.

Mais la question des égouts est toujours difficile à résoudre ;

seules les maisons individuelles des rues Condorcet et Félix Le Dantec (en partie) pourraient être desservies par l'égout précité.

 

En ce qui concerne le contrôle des eaux d'alimentation, il continue à s'effectuer par les soins vigilants de M. Farcy, dont nous ne nous lasserons pas de clamer la haute conscience et la grande compétence.

On trouvera plus loin le rapport qu'il a dressé du fonctionnement de Pont-ar-Bled.

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L'enlèvement des ordures ménagères donne satisfaction dans son ensemble.

Mais on continue de déverser dans la rue des détritus de toutes sortes qui ne sont pas enlevés quotidiennement.

 

Nous avons pu constater que le service des vidanges mettait parfois quinze jours ou plus avant de vider certaines fosses déjà plus que pleines.

C'est là un état de choses particulièrement déplorable, tant pour l'insalubrité que pour le retard apporté aux réparations ou aux curages qu'il nous est donné d’imposer aux propriétaires.

Il serait absolument nécessaire que, sur avis du Bureau d'hygiène, vidange et curage soient effectués d'urgence par les Compagnies.

 

Une autre solution qui résoudrait encore mieux la question serait que la ville fût dotée, au plus tôt, d'un réseau d'égouts un peu plus complet que celui existant, qui ne dessert qu'un nombre très réduit de rues.

Chaque maison pourrait alors y être reliée et à l'aide d'une chasse d'eau assez puissante, les déjections liquides et solides seraient repoussées à la mer, le plus loin possible.

Cela éviterait les odeurs pestilentielles qui se dégagent d'un certain nombre de rues et résoudrait, une fois pour toutes, la question des vidanges qui, comme on le sait, est un des grands obstacles à une meilleure hygiène de la cité.

Les vidanges, en effet, y sont faites plus ou moins rapidement ;

les fosses débordent ou, quand elles sont fissurées, laissent épandre leur contenu dans les caves, état de choses qui se répète indéfiniment et auquel il conviendrait d'apporter une solution définitive.

 

La question des dépenses à intervenir — plusieurs millions évidemment — ne pourrait-elle pas être entièrement résolue par la redevance annuelle que les propriétaires paieraient pour utiliser ce système d'égout, seul procédé permettant l'assainissement de la ville.

Le capital nécessaire, devenu ainsi rentable, ne pèserait nullement sur les finances municipales et il serait facile de trouver une Compagnie qui se chargerait de l'opération.

Seule, cette réforme permettra à Brest de devenir une ville normale, car il est bien évident que le système des fosses d'aisances, avec vidange et curage plus ou moins intermittent, ne peut durer éternellement.

C'est un défi aux règles du bon sens et de l'hygiène, et la présente municipalité s'honorerait grandement en y apportant le remède nécessaire.

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II. — Prophylaxie des maladies contagieuses

 

Les déclarations sont strictement observées par certains praticiens.

D'autres se bornent à mentionner, comme cause de décès :

« Mort naturelle », « affection organique », ce qui, entre autres inconvénients, ne facilite pas notre travail de statistique.

Je ne puis que remercier ceux de mes confrères qui veulent bien collaborer avec nous en ajoutant un diagnostic à leur certificat de décès, et encourager tout le corps médical à persévérer dans cette voie, qui facilite grandement la tâche complexe du Bureau d'hygiène.

 

La déclaration obligatoire de la tuberculose et la désinfection obligatoire pour cette affection n'étant pas encore promulguée en France, la lutte antituberculeuse ne peut être menée par les Bureaux d'hygiène avec toute l'action et la vigueur désirables.

 

III. — Désinfection Transport des blessés

 

Le service de la désinfection a opéré, durant l'année 1928, 722 désinfections, chiffre de beaucoup supérieur à celui de l'année dernière et qui nous démontre que la désinfection rentre de plus en plus dans les mœurs.

 

Répétons que la camionnette qui a été attribuée au service de la désinfection, déjà très usagée, entraîne une dépense trop élevée en essence, surtout en ville.

 

Nous rappellerons également les diverses améliorations déjà réclamées.

Il est de toute nécessité de construire un abri et une plateforme de déchargement pour la caisse interchangeable.

Il y aurait lieu aussi de rechercher, par tous moyens à agrandir le poste de désinfection, ne fût-ce que pour y construire un séchoir couvert qui permettrait de rendre des literies complètement sèches et d'aménager une chambre à formol qui nous rendrait de grands services.

L'hygiène la plus élémentaire demande également que le garage soit entièrement clos, ce qui protégerait les employés qui ont à y travailler par temps de pluie et, en tout cas, dans un courant d'air perpétuel.

Signalons encore une fois l'utilité de relier directement par téléphone le poste de désinfection au Bureau d'hygiène.

Enfin, le dallage de toute la cour est une chose urgente et indispensable.

 

Le transport des blessés continue à fonctionner d'une façon très satisfaisante.

Le service a, d'ailleurs, été pourvu d'une deuxième camionnette, depuis longtemps réclamée, et grâce à laquelle il ne sera plus nécessaire de recourir aux vieux moyens de transport par brancards.

 

L'ambulance municipale a exécuté 1.193 sorties, dont 562 à titre onéreux et 631 à titre gratuit, tous chiffres supérieurs à ceux de l'an dernier.

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IV. — Considérations d'ordre général

 

La ville de Brest a présenté, durant l'année 1928, une mortalité de 18,6 pour mille, indice par conséquent au-dessous de la moyenne des grandes villes de France.

 

L'année 1928 se caractérise par un silence épidémique à peu près complet, sauf une petite recrudescence de scarlatine et de diphtérie, déjà relevée l'année dernière, pour la première affection.

 

Le tableau que l'on trouvera plus loin donne seulement une idée approchée de la marche des maladies contagieuses durant l'année 1928.

 

Fièvre typhoïde

 

En ce qui concerne la fièvre typhoïde, nous n'avons eu à enregistrer que 29 cas contre 27 en 1927 et 55 en 1920.

Néanmoins, nous ne manquerons pas de continuer à recommander la vaccination par voie buccale, pratique d'une simplicité remarquable et de nature à éviter la contagion familiale, et nous rappellerons que le Bureau d'hygiène continue à se pourvoir de ce vaccin (Bili-vaccin) dont il tient en permanence des boites à la disposition des familles indigentes parmi lesquelles il se produirait un cas de maladie typhique.

 

Scarlatine

 

La scarlatine a présenté une recrudescence assez marquée :

105 cas déclarés contre 79 en 1927 et 11 cas en 1926.

Mais alors qu'en 1927, sur les 79 cas, 62 se rapportaient aux milieux maritimes, en 192S, nous comptons, sur les 105 cas déclarés, 56 cas se rapportant à la population civile, principalement dans Brest intra-muros.

 

Rougeole

 

Cinquante-cinq cas déclarés, tous par l'hôpital maritime.

La déclaration ne joue guère en ville pour cette maladie, et les épidémies scolaires échappent, dans les détails, à un contrôle rigoureux.

Contentons-nous de constater avec satisfaction que le génie épidémique de cette affection a été moins sévère cette année, puisque, au lieu de 16 décès relevés en 1927, nous n'avons eu, cette année, aucun décès à enregistrer.

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Diphtérie

 

Comme la scarlatine, la diphtérie a montré, cette année, plus d'activité : 65 cas déclarés contre 33 en 1927 et 17 en 1926.

Le quartier le plus touché par cette affection reste toujours l'Annexion.

 

Tuberculose

 

La ville de Brest n'a enregistré, cette année, que 312 décès contre 373 en 1927 et 444 en 1926.

Malheureusement, la morbidité, étant donné le nombre toujours croissant de malades que nous voyons au dispensaire, n'a certainement pas diminué.

 

Cancer

 

Cent trois décès par cancer, contre 86 en 1927 et 116 en 1920.

La moyenne reste donc sensiblement la même.

 

Conclusion

 

La courbe de la mortalité infantile s'est maintenue au-dessous de la moyenne des années précédentes, ce qui prouve, une fois de plus, les bienfaits des œuvres sociales protectrices de l'enfance, si généreusement soutenues par la ville de Brest.

 

La seule chose que nous ayons à déplorer est l'indifférence marquée par la population brestoise envers une œuvre aussi utile que celle des bains-douches.

 

Je veux bien admettre que ces établissements possèdent encore un matériel parfois un peu rudimentaire et plus ou moins défectueux ;

que l'eau chaude n'existe pas (avec toute l'abondance désirable, mais cette situation va être, sans tarder, améliorée.

 

Quoi qu'il en soit, il a été pris, dans les établissements communaux.

27.000 bains-douches, au prix de 0 fr. 75, soit un rapport de 20.250 francs.

D'autre part, il a été distribué, dans les écoles, 2.785 tickets de bains-douches gratuits, dont 1.484 seulement ont été utilisés.

 

Nous ne comptons donc que 28.484 bains-douches pris dans les établissements communaux, dont une très faible proportion pour la population scolaire qui, pourtant, y est accueillie gratuitement.

 

À supposer que la même personne n'ait pris que deux bains-douches dans l'année, il résulte que les deux tiers de la population semblent ignorer les bienfaits de l'hydrothérapie, ce qui constitue un état déplorable.

Nous nous efforcerons de faire, dans l'avenir, cette éducation, base de la santé et, partant, de tout progrès social.

 

En résumé, nous avons pu constater néanmoins que l'état sanitaire a été excellent pendant l'année 1928.

Rendons-en hommage au docteur Bodros, notre prédécesseur, qui a su mener à bien cette œuvre ingrate qu'est l'hygiène publique et se concilier en même temps la sympathie et l'estime de toute la population.

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