1893
Une petite fille de 10 ans
violée et trouvée morte
dans un champ à Hanvec
Source : La Dépêche de Brest 30 juin 1893
Un crime vient d'être commis à Hanvec dans des conditions particulièrement odieuses.
Avant-hier soir, vers six heures, une petite fille de dix ans, Marie-Jeanne G..., qui avait passé l'après-midi dans un champ à surveiller des vaches, était trouvée morte dans ce champ.
Aussitôt informé de l'événement, M. Floch, notaire à Hanvec, adjoint au maire de la commune et suppléant
du juge de paix du canton de Daoulas, se rendait sur les lieux et, remarquant de la bave autour de la bouche
de l'enfant et à côté du corps des déjections contenant des matières vertes, il chargeait M. le docteur Hély,
ancien médecin de la marine, d'examiner le corps.
M. Hély découvrit alors que la malheureuse petite fille avait l'anus déchiré au point qu'on aurait pu y introduire la main.
On se trouvait évidemment en présence d'un ignoble attentat.
M. Floch informa aussitôt de ces faits par lettre M. le procureur de la République, à Brest.
En même temps, il lui transmettait un rapport de. M. le docteur Hély, concluant à l'inhumation.
Hier matin, à 9 h. 1/2, le chef du parquet trouvait la lettre et le rapport, en arrivant à son cabinet ;
il télégraphia aussitôt de surseoir à l'inhumation.
Dans le cas où cet ordre serait arrivé trop tard, on procédera à l'exhumation du corps de la petite victime.
Une descente de justice aura lieu aujourd'hui sur les lieux du crime.
MM. Frétaud, procureur de la République, Guicheteau, juge d'instruction, le docteur Anner, médecin légiste,
et Combes, commis-greffier, partiront par le train de 11 h. 25 pour Hanvec.
Déjà, sur l'ordre envoyé par M. Frétaud, le juge de paix de Daoulas et la gendarmerie ont commencé une enquête sur les relations des parents de la petite fille et sur les relations de l'enfant elle-même.
Comment le crime a-t-il été commis ?
L'assassin, après avoir consommé son attentat, a-t-il tué sa victime ?
Ou l'a-t-il étouffée d'abord et a-t-il ensuite assouvi sur elle sa brutale passion ?
Quel est l'assassin ?
Autant de questions sur lesquelles, espérons-le, l'enquête ne tardera pas à faire la lumière.
Inutile d'ajouter que ce crime a produit une profonde émotion à Hanvec.
Comment en pourrait-il être autrement ?
Source : La Dépêche de Brest 1er juillet 1893
Comme nous le disions dans notre numéro d'hier, c'est mardi soir, vers sept heures et demie,
que le corps de la petite Marie-Jeanne Gourlait, âgée de dix ans,
a été trouvé dans un champ situé à un kilomètre 300 mètres du bourg de Hanvec.
Vers 6 h. 1/2, un petit garçon de sept ans, nommé Jacques (Pierre), fils d'un fermier de Hanvec,
aperçut la fillette allongée sur un talus et faisant de violents efforts pour vomir.
Arrivé chez lui, il raconta ce qu'il avait vu, et sa mère alla prévenir les fermiers Prédour,
chez lesquels la petite Marie Jeanne était domestique.
Quand le fermier arriva dans son champ, la fillette était morte.
Il la prit alors dans ses bras et la transporta à la ferme, où il arriva à neuf heures.
Quelque temps après, il allait faire sa déclaration à la mairie, disant que sa domestique était morte d'une indigestion.
On sait comment le parquet fut prévenu.
Marie-Jeanne Gourlait était domestique chez les époux Prédour, cultivateur au village de Quillafel, en Hanvec,
depuis le 20 janvier dernier.
Ses parents, journaliers à Kerancurus, dans la même commune, savaient que leur fille était domestique en Hanvec, mais ils ignoraient le nom de son maître.
Ces parents, d'ailleurs, ne s'occupaient jamais de leur fille.
Quant à la petite, elle était très gaie et très aimée.
En allant et en revenant des champs, elle chantait des complaintes bretonnes, et ses patrons n'avaient à lui reprocher qu'une certaine lenteur.
MM. Frétaud, procureur de la République, Guicheteau, juge d'instruction, Anner, médecin-légiste,
Combes, commis-greffier, ont pris hier matin le train de 11 h. 27, pour se rendre à Hanvec,
où ils sont arrivés à une heure.
Un de nos reporters s'était également rendu à Hanvec par le même train.
Reçus par M. Le Floch, notaire et suppléant du juge de paix de Daoulas, et par la gendarmerie,
les magistrats se sont immédiatement rendus au cimetière.
La fosse contenant le corps de Marie-Jeanne Gourlait avait été ouverte dès le matin.
Pendant que l'on procède à l'exhumation, on dresse, à l'ombre de deux arbres,
une tablette sur laquelle le docteur Anner va procéder à l'autopsie.
Un premier examen du petit cadavre démontre qu'on se trouve en présence d'un autre crime
que celui dont nous avons parlé hier.
Marie Jeanne Gourlais n'était plus vierge, et les viols dont elle a été victime paraissent assez anciens
et datent de plusieurs mois.
Les poumons, très engorgés, indiquent que l'enfant est morte d'une congestion pulmonaire.
A-t-elle été étouffée ?
Le docteur n'est pas très affirmatif sur ce point.
À 3 h. 1/4, l'autopsie est terminée et les magistrats prennent le chemin du champ où le cadavre a été découvert.
Après un examen attentif des lieux, on se rend à la mairie, où M. Guicheteau, juge d'instruction, interroge les époux Prédour.
Les fermiers, chez lesquels était l'enfant, déclarent qu'ils n'ont jamais vu Marie-Jeanne malade depuis qu'elle était chez eux, et ils croient qu'elle est morte d'indigestion.
Ils racontent au juge que, depuis trois semaines, la petite boitait un peu.
Elle avait dit à ses maîtres qu'elle était tombée en poursuivant un lièvre.
Le père et la mère de la petite victime, qui ont assisté au cimetière, à une certaine distance, il est vrai, à l'autopsie du corps de leur fille, sans verser une larme, sont ensuite interrogés.
La mère est une mendiante ;
quant au père, il a l'air brutal, et sa déposition, bien extraordinaire, permettra peut-être à la justice de découvrir,
sans tarder, le coupable.
Commencés à 4 h. 3/4, ces interrogatoires n'ont pris fin qu'à sept heures.
Après avoir dîné chez un hôtelier du bourg, les magistrats sont revenus à la gare, et à 9 h. 45 ils rentraient à Brest, après une journée bien remplie et qui aidera sans doute à jeter quelque lumière sur ce crime mystérieux.