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1940

Brest en 1900

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Source : La Dépêche de Brest 24 décembre 1940

 

Depuis 1893 et 1894, années où ont été mises en service les lignes des chemins de fer départementaux de Brest à Ploudalmézeau et à Lannilis, on ne prend plus guère les diligences qui partaient chaque jour de l'hôtel de la Boule d'Or, au n° 24 de la rue d'Algésiras.

 

Et, depuis l'été dernier, le train va jusqu'à Portsall, l'excursion favorite des familles brestoises.

Le premier départ est à 6 h. 45 du matin, le second à 9 h. 45 ;

l'aller et retour coûte 3 fr. 50.

Presque tout le monde prend le premier convoi, pour passer une journée complète dans ce coin délicieux, à la recherche du grand air et des souffles impétueux du large.

 

Le petit train, espérons qu'on ne tardera pas à le revoir — était bien sympathique.

On se casait, suivant ses goûts :

à l'air, sur la plate-forme, ou à l'abri, à l'intérieur.

 

Il marchait doucement et prudemment, le petit train, et ne manquait jamais de signaler son passage, aux croisées des chemins.

Il prenait parfois quelque retard aux stations, quand une voiture devait rester en gare ou être remorquée, ou encore, quand le conducteur faisait un brin de causette avec l'accorte « cheffesse » de gare.

Mais un petit coup de trompette du chef de train, un jet de vapeur de la locomotive et le petit train s'en allait, soufflant dur dans les montées, s'emballant dans les descentes, pour toujours arriver à l'heure au terminus.

 

Dernier arrêt à « Ploudal », où tout un essaim de jeunes filles, en costumes de plage, est venu voir passer le train ou recevoir des amis.

Quelques foulées et c'est Portsall, où l'on est accueilli par la foule des estivants.

 

Portsall ne possède alors que deux ou trois villas modernes et l'excellent « Hôtel de Bretagne » où l'on prend pension pour 4 à 5 francs par jour.

 

On trouve, dans ce pays rêvé, loin du luxe criard des plages mondaines, deux chambres garnies à 25 francs par mois.

Partout c'est l’humble maison de pêcheur, au toit bas et aux étroites fenêtres.

 

Chaque famille s'en va choisir sa petite plage, au milieu des anses rocheuses et des écueils, avec ses brises vivifiantes et ses senteurs de varech.

 

Et le soir, quand on reprend le petit train, papas et mamans ont fait une provision de santé et il y a du rose sur les joues des enfants pâles.

 

Comment, à propos des promenades et excursions, ne pas évoquer le souvenir des voitures et des premières automobiles, en cette année 1900 ?

 

Brest compte sept loueurs de voitures.

Les principales entreprises sont celles de :

MM. Tartelin, 13, rue de la Mairie ;

Paul Jacq, 35, rue du Château et Holley, 6, rue de Siam.

 

Avant l'établissement des tramways, il y avait de 30 à 40 chevaux dans les écuries et les remises contenaient un grand nombre de fiacres, coupés, landaus, breaks, calèches et omnibus.

 

Le prix de la course en ville est de 1 fr. 25 pour fiacre et coupé ;

2 francs pour landau.

À l'heure, on paie 1 fr. 75 pour coupé et 2 francs pour calèche ou landau.

 

Les voitures sont en stationnement de 7 à 9 heures du soir et un service est assuré à la sortie du théâtre, les soirs de représentation.

 

À cette époque, Paul Jacq avait fière allure quand, en redingote et huit reflets, le fouet à mèche anglaise tenu haut, il conduisait le landau de cérémonie réservé aux autorités.

 

La bicyclette est très en honneur.

On roule sur caoutchoucs pleins ou sur pneumatiques.

Mais, au salon du cycle de cette année, on expose le système de la roue libre qui, aux descentes, permet de ne plus pédaler et de se servir des pédales comme repose-pieds.

 

Les voiturettes à pétrole :

Léon Bollèe, Peugeot, Berliet, Renault, Darracq, Gladiator, de Dion-Bouton, Panhard, Clément, Phoebus, Hurtu, créées depuis une dizaine d'années, possèdent maintenant de notables perfectionnements.

 

La marque A. Darracq ne pesant guère plus de 200 kilos, repose sur un axe central pivotant sur lui-même, en sorte qu'une des roues avant, par exemple, peut monter sur un trottoir, l'autre restant sur la chaussée, sans que l'équilibre du véhicule soit le moins du monde compromis.

Le moteur à ailettes est de 4 chevaux et on peut faire 50 kilomètres à l'heure

 

La Gladiator a deux petites places, avec deux vitesses seulement :

12 kilomètres à l'heure, pour les côtes ; 25 à 28, pour le plat.

On arrive à 30 avec l'avance à l'allumage.

 

La Léon Bollée, de 5 chevaux et demi, a quatre places.

Elle est un moyen de transport économique, ne dépensant pas cinquante centimes pour 15 kilomètres, soit un peu plus d'un litre, pour cette distance.

 

Les usines de Dion-Bouton viennent de lancer une petite voiture, appelée « vis-à-vis », en raison de la disposition face à face des deux banquettes.

Plus cher d'achat, un peu plus dispendieux à l'usage, le vis-à-vis permet de goûter les joies du tourisme familial.

On le recouvre d'un dais avec de belles franges et comportant des rideaux arrière et de côté.

 

Cette voiturette nous semble un peu ridicule aujourd'hui, quand nous la voyons paraître dans les expositions rétrospectives et les concours de vieux tacots, mais nous en connaissons plus d'un qui s'en contenterait, s'il pouvait avoir du « pétrole ».

 

Des leçons gratuites de conduite sont données à tout acheteur de bicyclette ou d'automobile, au garage Renouvel 17, rue de Paris.

Les débutants font leurs premières armes sur une allée circulaire de 2 m. 50, tracée dans un jardin bordant le vieux chemin du cimetière qui vient d'être appelé rue Branda.

(À suivre)

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