1940
Brest en 1900
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Source : La Dépêche de Brest 23 décembre 1940
Brest s'est modernisé.
Depuis deux ans, les tramways parcourent la ville et desservent trois lignes :
Petit-Paris-Porte du Conquet (une section) ;
Porte du Conquet-St-Pierre (2 sections) ;
Lambézellec-Kermor-Casino (2 sections).
Chaque section coûte dix centime ;
quinze centimes pour deux sections.
La ligne du tramway place du Château-Saint-Marc est en construction.
Dès les premiers beaux dimanches de printemps, on aime fuir la ville et aller dans les champs tout proches, cueillir les premières fleurs, les coucous, les primevères, les violettes, boire du soleil, de la lumière et de l’air à pleins yeux et à pleins poumons.
Les Brestois ne manquent pas de se rendre le premier dimanche, après le 25 avril, à la fête de Saint-Marc qui ouvre la série des pardons ;
la grève et le Vallon sont le rendez-vous des promeneurs.
Les sentiers ombrageux de Kervallon, qui mènent à la Chapelle-Jésus, la Digue où, au restaurant, un concert est donné tous les dimanches, de 3 à 6 heures ;
Pont-Cabioch, la grève de la Maison-Blanche sont un but de jolies promenades.
Saint-Pierre-Quilbignon est le terminus du tramway et ce n'est qu'en 1903 que sera inauguré le chemin de fer électrique, avec embranchement sur Sainte-Anne-du-Portzic.
C'est donc à pied, les paniers chargés de provisions, que les groupes joyeux se rendent à Sainte-Anne-du-Portzic, par des sentiers bordés de genêts fleuris et de haies d'aubépines roses.
On ne manque pas de s'arrêter à la chapelle, pour y faire brûler un cierge devant la statue vénérée, patronne des Bretons.
Et voici la grève, fermée par un vallon longé de taillis.
Au milieu serpente un ruisseau qui, après avoir arrosé des prairies où broutent paresseusement les troupeaux perdus dans les hautes herbes, vient se jeter dans la baie, en chantant sur les galets.
Pas de dancings, en ce temps-là !
Une simple guinguette avec tonnelles dominant la plage.
Chaque famille s'installe de son mieux sous les arbres ou dans les petits taillis, des deux côtés de la prairie.
La jeunesse prend ses ébats dans la grande bleue, avant de faire honneur aux victuailles apportées de la ville, pendant que, nous dit M. Toscer, dans son Finistère pittoresque :
Les bons vieux, les bonnes vieilles
Se retirent dans un coin,
Rêvant de fêtes pareilles
Dans un passé déjà loin...
La compagnie des Vapeurs brestois possède une jolie flottille :
Le Rapide, le Plougastel, le Cotentin, le Travailleur, l'Express, qui assurent tous les jours le service de la rade.
C'est surtout le dimanche qu'affluent les promeneurs.
On va au passage de Plougastel (0 fr. 70 aller et retour) ;
pendant la saison des fraises, à Lauberlach (chaque traversée, 0 fr. 50).
Mais la plus belle excursion est celle du Fret-Morgat, par un beau dimanche d'été.
Il faut se lever tôt pour prendre le bateau de 7 heures.
Et quel joyeux départ, dans l'air frais, par ces matinées, « chez nous », si ravissantes avec la rade qui reflète le bleu du ciel, l'un des horizons les plus larges, la plus étincelants, les plus radieux.
Tout le monde débarque au Fret.
Par mesure d'économie, quelques familles resteront toute la journée dans cette anse si joliment abritée.
La plupart des promeneurs prennent les breaks et les omnibus des hôtels, à destination de Morgat et de Camaret.
Et, c'est au débarcadère les appels les sollicitations combien empressés des cochers et des garçons :
Morgat, Hôtel de la Mer !
Par ici, Morgat, hôtel de la Plage !
Morgat, hôtel Hervé !
Camaret, hôtel de France !
Chacun prend place comme il peut.
La route se déroule, très accidentée parfois peu rassurante, quand les cochers concurrents se livrent à un match effréné pour arriver bon premiers.
Voilà Morgat, la reine des plages du Finistère.
Quelle délicieuse après-midi, dans cadre unique, à l'abri des grottes et des dunes, tout près des petits enfants qui pataugent joyeusement dans cette mer qui, à Morgat, baise longuement le rivage de flots si apaisés et si doux, qu'elle dérange à peine un grain de sable.
Jeunes papas, jeunes mamans prennent là des acomptes de joie et de tendresse, pour la semaine ou quelque autre beau dimanche... car les petites bourses doivent compter.
Songez donc qu'une journée à Morgat coûte :
Vapeur, 1,50 ;
voiture, 2 fr. ;
repas, 2,50,
soit 6 francs par personne sans compter les menus frais.
(À suivre)