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1896

Décapité par un train
sur la ligne de Saint-Renan

 

 

Source : La Dépêche de Brest 3 février 1896

 

Un grave accident s'est produit avant-hier soir sur la ligne de Brest à Ploudalmézeau.

Un jeune cultivateur de Lambézellec, M. Guével (Jacques), est tombé d'un train en marche et a été littéralement décapité.

 

C'est à deux ou trois cents mètres de Saint-Renan que l'accident s'est produit.

Le train n° 8, mis en service à l'occasion de la foire, avait quitté la gare à 6 h. 55, se dirigeant sur Brest, lorsqu'une panique se produisit parmi les voyageurs de la quatrième voiture dans laquelle se trouvaient MM. Caër et Le Gall, bouchers à Brest.

Le wagon, sorti des rails, roulait sur le ballast et menaçait de verser.

M. Joseph Taillé, voyageur de la maison d'engrais Gorret, de Paris, eut heureusement la présence d'esprit de serrer le frein.

Au même moment, le conducteur Louarn serrait le sien et le mécanicien Millour arrêtait sa machine.

 

Le train stoppé, on s'aperçut qu'un voyageur, qui se trouvait sur la plate-forme avant de la quatrième voiture avait disparu.

Ce voyageur n'était autre que Guével.

Pendant que le personnel du train remettait la voiture sur les rails, on se mit à sa recherche et on le retrouva sur la voie, dans une mare de sang.

La tête ne tenait plus au tronc que par un lambeau de chair.

La jambe droite était coupée au tibia et à la cuisse.

Le corps a été aussitôt transporté à l'hôpital de Saint-Renan, tandis que le train se remettait en marche avec vingt-cinq minutes du retard.

 

M. Chuiton, juge de paix de Saint Renan, et la gendarmerie se sont aussitôt rendus sur les lieux, où ils ont procédé aux constatations légales.

D'autre part, hier matin, à neuf heures, MM. Maheu, chef d'exploitation, Joyandet, chef de traction, et Sadet, chef de section de la compagnie des chemins de fer départementaux, se sont rendus par train spécial à Saint-Renan pour procéder à une enquête.

 

Comment s'est produit l'accident ?

C'est ce qu'on n'a pu établir exactement, deux voyageurs qui se trouvaient sur la plateforme avant de la quatrième voiture avec Guével ne l'ayant pas vu tomber.

On suppose cependant qu'ayant voulu se pencher ou s'asseoir sur le garde-fou de la plateforme, il sera tombé entre la quatrième et la troisième voiture.

D'autre part, comme c'est précisément la quatrième voiture qui a déraillé et que le point du déraillement est le lieu même où l'accident s'est produit, ainsi que cela a pu être constaté par les traces de sang relevées sur la voie, on en a conclu que c'est le corps de Guével qui a produit le déraillement.

Cette constatation est d'ailleurs conforme aux dires des voyageurs que nous avons pu interroger.

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Le corps de Guével a été transporté hier dans sa famille au Spernot-Vras, en Lambézellec.

La victime de ce malheureux accident n'avait que 24 ans.

Après avoir fait une année de service militaire au 19e d'infanterie, à Brest, il était rentré dans sa famille où, avec son père, sa mère, trois frères et une sœur, il exploitait une des plus importantes fermes de Lambézellec.

Sa mort, dans des circonstances aussi tragiques, a soulevé une vive émotion.

Les obsèques auront ce matin, à dix heures, à l'église de Lambézellec.

 

Il y a deux ans, le brigadier Petton, du 2e chasseurs, à Pontivy, en congé, eut, on s'en souvient, les deux jambes brisées à peu près dans les mêmes circonstances, en la gare de Saint-Renan.

Quelques jours après, il succombait des suites de ses blessures.

 

À lire sur Retro29.fr :

1894 - Un brigadier de chasseurs a les deux jambes coupées par un train sur la ligne de Saint-Renan – Cliquer ici

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Source : La Dépêche de Brest 4 février 1896

 

Hier matin, à dix heures, ont eu lieu, à l'église de Lambézellec, au milieu d 'une immense affluence de parents et d'amis les obsèques de M. Guével (Jacques),la victime de l'accident survenu samedi soir sur la ligne de Brest à Ploudalmézeau.

 

Le corps était porté par des jeunes gens de la commune, et le deuil conduit par le père et les frères du défunt.

Après la cérémonie religieuse, l'inhumation a eu lieu au cimetière de Lambézellec.

 

La gendarmerie de Saint-Renan a transmis hier le résultat de son enquête à M Frétaud, procureur de la République.

 

Au moment où l'accident s'est produit Guével se trouvait sur la plateforme avant de la quatrième voiture en compagnie de deux amis avec lesquels il s'était rendu le matin à la foire de Saint-Renan, MM. Trébaol (Jean), cultivateur au village de Ploufoury, en Lambézellec, et Roscongard, cultivateur au village de Kerzéon, en la même commune.

À 150 mètres de la gare de Saint-Renan, MM. Trébaol et Roscongard ont ressenti une violente secousse, puis ils ont presqu'aussitôt constaté que la voiture dans laquelle ils se trouvaient était sortie des rails.

Ils s'aperçurent alors de la disparition de Guével, mais, comme ils lui tournaient le dos, ils ne l'ont point vu tomber sur la voie.

 

Après comme avant l'accident, les chaînes de sureté de la plate-forme étaient en place, ainsi que la barre de fer qui livre passage au chef du train pour aller d'un wagon à l'autre.

Quand le train s'est arrêté, ils ont trouvé Guével couché sur le côté gauche de la voie, la tête presque détachée du tronc.

 

L'enquête de la gendarmerie a établi que Guével est tombé du train sur le côté gauche de la voie, à 150 mètres environ de la gare de Saint-Renan, à un endroit où la voie décrit une courbe assez prononcée.

 

Est-ce le déraillement de la voiture dans laquelle se trouvait Guével qui a déterminé l'accident, ou bien est-ce au contraire Guével qui, en tombant sur la voie, a produit le déraillement ?

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La compagnie, dans son enquête, s'est arrêtée à la seconde hypothèse ;

cette version a été corroborée en tous points par la gendarmerie.

Exactement en face des traces de sang constatées sur le ballast, à trois mètres de la place où a été traîné le cadavre, la gendarmerie a remarqué, immédiatement après l'accident, que le ballast avait été dérangé par les roues de la voiture, qui paraît avoir déraillé par suite de la chute de Guével sur le rail.

La position du cadavre, le terrain maculé de sang et les premières traces de déraillement rendent cette hypothèse vraisemblable.

 

On ne sait pas encore si la famille de la victime doit actionner la compagnie en dommages-intérêts.

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Source : La Dépêche de Brest 5 février 1896

 

Décapité par un train.

 

La compagnie des chemins de fer départementaux a clos hier l'enquête qu'elle avait ouverte après l'accident de la ligne de Brest à Ploudalmézeau.

Ainsi que tout le faisait présumer, on a conclu que la chute de Guével avait été la cause du déraillement.

 

M. Joseph Laillé, voyageur de la maison A. Gosset (*), de Paris, dont nous avons signalé le sang-froid en cette occasion, n'en est pas, du reste, à son premier acte de dévouement.

Déjà, en juin dernier, nous avions eu l'occasion de signaler sa présence d'esprit au cours d'un incendie qui s'était déclaré pendant la nuit dans le débit situé au n° 71 de la Grand'Rue.

 

Ajoutons qu'au moment de l'accident, une vingtaine de personnes se trouvaient dans la quatrième voiture.

 

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(*) La Dépêche de Brest 9 juin 1895

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