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Mystère dans l'église de Plouguin

L'énigme de l'Armide

Enquête ouverte sur un vitrail

Nouveaux éléments

À l'issue de ce travail de recherche, l'énigme de la présence d'un vitrail "Maritime" dans l'église de Plouguin reste entière.

Cette réflexion reste ouverte à tous les chercheurs, et toutes les hypothèses étayées seront les bienvenues.

Patrick Milan

L’énigme

 

Vous vous êtes surement posé la question en regardant

les vitraux de l’église :

« Mais que vient faire ce magnifique trois-mâts

dans un vitrail de l’église de Plouguin ?»

 

Cette présence est d’autant plus surprenante que Plouguin

n’est pas une commune avec une façade maritime exceptionnelle.

 

Alors pourquoi des références maritimes dans l'église de Plouguin ?

 

Les éléments historiques développés dans ce sujet

permettent d'élaborer diverses hypothèses,

sans pour autant résoudre cette énigme.

 

Mais un jour peut être …

30 - Armide a.jpg

1 - L’église

 

L’église a été construite en 1867 sur des plans de l’architecte Bigot datant de 1865.

Les vitraux ont donc été dessinés à cette époque.

Les noms et blasons des donateurs qui ont participé à la réalisation de l’église et des vitraux,

soit financièrement ou soit directement par leur activité, se trouvent sur les poutres, les blochets et les vitraux.

Le vitrail du transept droit

 

Notre énigme se trouve dans le vitrail du transept droit.

Dans celui-ci, on peut identifier les blasons des familles

du Beaudiez et de Cibon ainsi que quatre éléments maritimes.

En considérant les basons de ces familles, on peut estimer, 

sans se tromper, que  les familles du Beaudiez et de Cibon

ont financé ce vitrail.

Mais par contre quelle est la raison des quatre détails maritimes ?

Le voilier identifié comme étant l’Armide

Un sextant

Une ancre de marine

Une boussole

25 - Blason Du Beaudiez_De Cibon (431 x
Armide Close up a.JPG
29 - Boussole a.JPG
28 - Ancre de marine a.JPG
27 - Compas a.JPG

2 - L'Armide

 

L'Armide était une frégate à voiles de second rang de type XVIII qui a navigué de 1821 à 1888.

 

Ce type de frégates de 800 tonneaux fut produit sur des plans de Jacques-Noël Sané.

Ces frégates avaient un équipage de 327 hommes réduit à 110 en cas de reconversion en transport

et ne gardaient alors que deux canons.

 

L'Armide a connu ses heures de gloire navale.

Elle est passée comme tous les navires de ce type par différents statuts :

Navire de guerre - Navire hôpital - Navire de transport – Navire école – Entrepôt.

Carrière de l’Armide

 

09-1814 : Deuxième sur cale à Lorient.

01-5-1821 : Mise à flot.

(Annales Maritimes et Coloniales 1821 IIe partie)

27-4-1823 : Appareillage de Lorient pour le Brésil,

l'île Bourbon et l'Inde.

1824 : Mouillage à Pondichéry (Inde).

(L’ami de la religion et du Roi tome 39 – 1924)

23-6-1826 : Départ de Toulon.

11-3-1827 : Appareillage de Gabrio (Levant).

10-1827 : Bataille de Navarin (Péloponnèse).

Elle capture la frégate turque Sultania et détruit 4 corvettes.

21 au 26-10-1827 : Voyage de Navarin vers Milo.

01-11-1827 : Attaque du château de Morée (Péloponnèse).

09-3-1830 : Départ de Toulon pour Navarin.

Commandée par le CV Moulac

(Annales Maritimes et Coloniales – 1830 tome 1 p 893)

05-6-1830 : Arrivée à Toulon.

(Annales Maritimes et Coloniales – 1830 tome 1 p 893)

09-6-1830 : Appareillage de Toulon pour le Brésil (?)

Commandée par le CV Kéréon

(Annales Maritimes et Coloniales – 1830 tome 1 p 893)

16-9-1830 : Arrivée à Toulon, en provenance de Navarin.

Commandée par M. le baron Regnault de la Susse,

capitaine de vaisseau

(Annales Maritimes et Coloniales – 1830 tome 1 p 893)

24-10-1830 : Appareillage de Toulon.

Commandée par M. le baron Regnault de la Susse,

capitaine de vaisseau

(Annales Maritimes et Coloniales – 1830 tome 1 p 268)

28-6-1831 : Arrivée à Trieste le 28 juin, le 10 juillet à Ancône.

6 -8-1831 : Arrivée à Malte. 

28-8-1831 : Arrivée à Toulon .

(Annales Maritimes et Coloniales – 1830 tome 1 p 606)

25-10-1831 : Mouillage à Toulon.

09-1832 : Conversion en navire-hôpital (épidémie de fièvre jaune),

pour l'expédition d’Argentine.

1837 : Opérations Navales dans l’expédition de Constantine.

(Annales Maritimes et Coloniales – 1830 tome 1 p 447)

Septembre 1846 : Retour vers la France par l’île Bourbon (la Réunion)

et Sainte Hélène.

Lettre de Saint Hélène écrite par Zélie Cosmao Kerjulien à l’occasion de l’escale à Sainte Hélène sur les traces de Napoléon Bonaparte.

(Biographie de Zélie Cosmao Kerjulien épouse Bazoche (1797 – 1873)

1847 : Le médecin Alphonse Pierre Prosper Guépratte écrit

« Héméralopie des pays chauds », suite à ses observations recueillies

à bord de la frégate Armide.

(International Biography and Bibliography of Ophthalmologists

and Visual …)

30-10-1848 : Arrivée à Brest, en provenance de l'île Bourbon.

11-2-1852 : Appareillage de la Guadeloupe pour Brest

en ramenant 440 hommes d’équipage et passagers de la Loire échouée

entre Sainte-Marie et la Guyane.

23-3-1852 : Arrivée à Brest.

30-5-1852 : Mise en rade de Brest, en partance pour le Sénégal, Cayenne et les Antilles.

07-8-1852 : Voyage de Fort-de-France vers Brest.

30-9-1852 : Arrivée à Brest, en provenance des Antilles.

(71 décès pendant la traversée)

En 1852 la frégate Armide, transformée en navire-hôpital,

effectua plusieurs missions au Sénégal, à Cayenne et aux Antilles.

En août, quelques jours après son départ de la Guadeloupe,

la fièvre jaune se déclara à bord.

Après une escale aux Bermudes, vers Terre-Neuve,

à la recherche d'un climat froid.

Le lieutenant de vaisseau de Trogoff-Coatallio de Lannion

fut victime de cette maladie et décéda le 10 septembre.

Son corps fut immergé par 40°46'N et 57°10'W.

(Mémorial des Anciens de l’École Navale)

24-1-1853 : Arrivée à Fort de France, en provenance de Cayenne.

1853 : Conversion en navire de transport.

01-01-1853 : Transport de 800 forçats de Brest vers la Guyane.

12-6-1853 : Arrivée à Brest en provenance de Cayenne et des Antilles.

26-11-1853 : Arrivée à Brest, en provenance de Cayenne et des Antilles.

27-7 au 30-9-1853 : Voyage de Brest à Cayenne.

20-9 au 28-10-1854 : Voyage de Cayenne à Brest.

27 septembre 1855 après 50 jours de voyage, débarquement

en Guyane de forçats du bagne de Brest.

Quédoc Guillaume de Ploudalmézeau - (voir matricule des chiourmes)

condamné à 5 ans de travaux forcés faisait partie du voyage.

01-1-1856 : Mouillage aux îles du Salut.

Le 4 janvier 1856 : L'Armide, mouillant aux Iles du Salut, y déposa

le P. Pierre Stumpf qui devait succéder au P. Hus

comme Supérieur de la mission.

Il était accompagné des P P. Xavier Bertrand, Thibault

et du F. Paul Bonat.

(Les Jésuites à Cayenne – Histoire d’une mission de 22 ans dans les pénitenciers de la Guyane par P.Paul Mury)

2 avril 1856 : Départ du Sénégal, arrivée à Brest le 1 mai 1856.

22-12-1864 : L'Armide est condamnée et transformée

en "navire École" et en "Magasin" à Lorient.

22-2-1869 : Appareillage de Rochefort pour Brest.

24-2-1869 : Voyage Brest - Rochefort.

16-3-1888 : Démolition.

3 - Les hypothèses au vu de la carrière de l'Armide

 

Comme évoqué précédemment, le vitrail a été « sponsorisé » par les familles « du Baudiez » et « de Cibon »,

de par la présence de leurs blasons.

Un membre de ces deux familles serait-il donc à l'origine de la présence de ces éléments maritimes dans ce vitrail ?

Mais qui est-il ?

 

Pour le découvrir, il faut appréhender l'événement au cours duquel un membre apparenté à l'une de ces familles

aurait pu être présent :

 La bataille de Navarin dans le Péloponnèse en 1827. 

  • Un vitrail relatif à un fait de guerre dans une église serait surprenant.​​

  • De  plus sur les 14 tués et 25 blessés de l’Armide, ne figuraient aucun officier.
    On sait que les marins
    de la noblesse avaient tous de facto le statut d’officier à bord.
    Donc cette hypothèse est peu probable.

La bataille du château de Morée dans le Péloponnèse en 1827.

  • On peut mener la même réflexion que pour la bataille de Navarin.

Navigation en tant que « navire hôpital » en Amérique du sud et au Sénégal en 1832.

  • Ce serait plausible.
     

Navigation en tant que « Transport » entre l’océan Indien et la France.

  • Ce serait également plausible.
     

Navigation en tant que transport de bagnards de Brest vers la Guyane.

  • Ce serait plausible, peut-être pour expier la faute d'envoyer tous ces hommes à la "Guillotine sèche".
     

Navigation en tant que navire hôpital.

  • Encore une autre hypothèse plausible.
     

Navigation en tant que navire école.

  • Dernière hypothèse envisageable.

4 - Indices dans les autres éléments maritimes

Le sextant

 

Sa présence dans ce vitrail interroge :

Le sextant n’était utilisé que par les officiers navigateurs.

On pourrait donc exclure les médecins et passagers.

Est-ce un exercice de style artistique ou une réelle indication ?

L'ancre de marine

 

Elle se trouve sur un fond rouge.

On sait que le rouge dans les vitraux représente l'amour divin,

la charité, la miséricorde.

C'est aussi le sang du Christ.

Une ancre de marine sur un fond de sang du Christ et de miséricorde,

est peut-être un élément à prendre en compte.

La boussole.

 

On pourrait penser qu’un cap Sud-Est vers Rome et la Terre Sainte

aurait du sens dans une église bâtie en Bretagne.

Mais nous avons un cap plein Nord qui pourrait nous indiquer

un voyage retour de la pointe de l’Afrique ou du Sénégal vers la France.

Nous pourrions donc éliminer les voyages retour de la Guyane et des Antilles

car le cap ne serait pas plein Nord ...

 

27 - Compas a.JPG
28 - Ancre de marine a.JPG
29 - Boussole a.JPG

Sauf que, lors du voyage retour des Antilles vers Brest en septembre 1852, un évènement tragique se produisit :

La fièvre jaune s’abattit sur l’équipage et les passagers.

Il y eut 71 décès pendant la traversée.

L’Armide dut faire un cap plein Nord pour toucher Terre-Neuve afin de stopper les ravages de cette fièvre

en naviguant dans un climat froid.

Parmi les décès enregistrés, un seul officier de marine : le lieutenant de vaisseau de Trogoff-Coatallio de Lannion.

Dans ce cas, nous pourrions envisager qu'un compagnon ou un membre de la famille de cet officier,

ou alors un survivant de ce voyage tragique, soit à l'origine de ces vitraux.

5 - L'hypothèse "du Tertre de Montalais"

 

Jean Pierre René Séraphin du Tertre de Montalais de Plouguin a été un Capitaine de Vaisseau du Roi.

  • 1731 - Enseigne de Vaisseau

  • 1.5.1741 - Lieutenant de Vaisseau

  • 17.5.1751 - Capitaine de Vaisseau

  • 1759 - 20.11.1759 - Capitaine de Vaisseau - Commandant du Superbe

Commandant du Superbe, il participa à la "bataille des Cardinaux" en baie de Quiberon le 20 novembre 1759.

Il sombra avec son vaisseau ce jour là.

Il était accompagné de son fils qui, lui aussi, perdit la vie dans ce combat contre le Royal George.

Le blason de la famille du Tertre de Montalais se trouve aussi dans l'église de Plouguin.

Mais dans le transept gauche.

Questions :

 

Si la présence de l'Armide dans le vitrail du transept droit est liée à la famille du Tertre de Montalais,

deux questions se posent :

 

Pourquoi mettre les vitraux maritimes à l'opposé desdits blasons ?

Pourquoi faire référence à du Tertre de Montalais mort sur le Superbe en nommant ce voilier l'Armide, 

un navire mis à l'eau 62 ans après cet évènement ?

Il semble donc peu probable que ces vitraux concernent la famille du Tertre de Montalais.

Page sur René Jean Séraphin de Montalais de Lesven

pendant la guerre de 7 ans

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Le mystère reste entier.

Je laisse aux lecteurs et chercheurs le soin de continuer l'enquête.

L'étude des livres de bord, rôles d'équipage et listes de passagers de l'Armide sur ses 74 années d'existence, 

croisée avec la généalogie des familles du Beaudiez et de Cibon, pourrait-elle nous donner le nom du marin

à qui s'adressent ces vitraux ?

J'espère qu'un jour nous aurons la réponse, et que cette énigme sera enfin résolue.

Mais en attendant je ne peux que vous inviter à aller admirer ces magnifiques et énigmatiques vitraux.

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Nouvelle hypothèse très plausible

Nous approchons du but, mais l'énigme est toujours là !

François Denis du Baudiez né à Saint Urbain le 20 juin 1830 et décédé à Landerneau  le 7 mars 1867,

marié à Plouguin le 13 juin 1865 avec Ernestine Marie Thérèse de Cibon,

serait-il celui que nous cherchons ?

Il entre dans la marine en 1849.

Le 10 juin 1857 à Brest, il est promu enseigne de vaisseau.

En 1860, les relevés nous indiquent : pas d'affectation connue.

Les références aux familles du Beaudiez et de Cibon dans le vitrail vont avec l'identification de François Denis du Baudiez.

Sa carrière d'officier de marine commence à la fin de la carrière de l'Armide, mais nous n'avons pas son parcours détaillé.

Quels étaient ses embarquements de 1849 à 1857 ?

Cette période est la plus intéressante et la plus dramatique dans la vie "pacifique" de l'Armide.

L'enquête reste toujours ouverte...

François du Beaudiez Geneanet.JPG
Gazette nationale 11 juin 1857 Enseigne

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La recherche continue ...

De nouveaux éléments nous font approcher du but !!!

Faisons un peu de généalogie

Vingt années de présence de la famille de François du Beaudiez au château de Lesven à Plouguin expliquent peut-être l’existence et le financement d’un vitrail à l’église avec les armoiries du Beaudiez et de Cibon ?

 

François Denis du Beaudiez décède à Landerneau, chez son frère, le 7 mars 1867.

 

Son fils François Henri Bathilde Joseph naît à Plouguin, au château de Lesven, 15 jours plus tard, le 25 mars 1867.

Sa fille Ernestine Marie Françoise est née à Brest, 38 rue Saint Yves, le 1er septembre 1865.

Dans cet acte de naissance, il est noté que François du Beaudiez est Enseigne de vaisseau.

 

Après son décès, sa femme et ses enfants vont vivre à Plouguin, au château de Lesven de nombreuses années :

ils sont notés dans les dénombrements de population à Plouguin en 1872, 1876, 1886.

 

Ils n’y sont plus à partir de 1891.

 

Ernestine de Cibon, veuve de François du Beaudiez, est la sœur de Céleste Marie Bathilde de Cibon,

épouse de Adolphe Collas de La Motte, propriétaire du château.

Une autre approche de la problèmatique

 

Regardons d'abord l'autre vitrail.

Saint Guénolé et les blasons de la famille de Lesven...

On associe le Saint avec la famille, on montre le Saint pour rappeler

(ou suggérer) que la famille donatrice d'argent pour l'église

a un passé prestigieux lié à Saint Guénolé.

 

En face, on peut suggérer la même chose.

Le donateur a ses blasons (De Baudiez, De Cibon),

mais c'est un lieu de culte, il met donc sur le vitrail un Saint.

Quel saint ?

Un saint qu'il admire (et dont il porte le prénom, François).

En effet, pour un marin, le choix de Saint François Xavier à un autre sens.

En effet ce grand voyageur est souvent représenté avec un bateau.

Il y en a même deux autres dans l'église de Plouguin,

(panneaux de l'ancienne chaire à prêcher).

même si ces représentations sont postérieures à la fabrique du vitrail,

( ce n'est d'ailleurs peut-être pas un hasard ).

Plouguin Patrimoine Histoire Eglis
Plouguin Patrimoine Histoire Eglis
Plans Armide (2412 x 937).jpg
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