Dimanche 17 Avril 1785
Réunion des membres de la Fabrique de Plouguin
Une suppression d'enfant à Ploudalmézeau
1936
Une domestique de ferme
conservait depuis 18 jours, dans une malle,
le cadavre d'un nouveau-né
Le Petit Breton - Dimanche 26 Janvier 1936
Une suppression d'enfant à Ploudalmézeau
Une domestique de ferme conservait depuis dix-huit jours
dans une malle le cadavre d'un nouveau-né
UNE LETTRE ANONYME
Il y a huit ans, Françoise Jaouen, née le 4 Janvier 1897, à Plouguin,
entrait au service de son oncle Yves Pluchon, 59 ans, cultivateur à Kerarch Ouézan,
en Ploudalmézeau.
L'homme, veuf, vivait avec son fils Yves, 26 ans.
Les années passèrent.
La nièce donnait entière satisfaction.
Selon les propres déclarations du fermier, elle était sérieuse, active et honnête.
Le soir, elle s'absentait juste pour aller à la veillée chez les voisins.
Or, mardi dernier, une lettre anonyme destinée au « brigadier », de Ploudalmézeau, parvenait entre les mains du chef de brigade, M. Roué.
L'écriture était grossière.
Les fautes d’orthographe nombreuses.
L’auteur, d’une façon assez naïve du reste, laissait entendre que
« ça n'allait pas chez les Pluchon, que la bonne aurait une histoire » , etc.
Le chef fit des sondages sous un prétexte quelconque mais les voisins,
sagement, ne soufflèrent mot.
Mais les enquêteurs avaient à peine tourné les talons que les commérages reprenaient avec nouvelle vigueur.
Un homme finit par indiquer le nom d'une personne qui savait quelque chose et la personne en question mangea le morceau.
La fille Jaouen avait accouché mais le nouveau-né était demeuré invisible.
Alors on supposait...
LA FILLE JAOUEN PASSE DES AVEUX
Samedi, à 9 h. 15, le chef de brigade Roue et le gendarme Grannec se rendaient au domicile des Pluchon.
Précisément ceux-ci étaient absents.
Le père se trouvait dans un champ du côté du cimetière.
D'une carrière voisine le fils tirait de la pierre.
La fille Jaouen, en tablier, lavait la vaisselle près du lit clos réservé dans la cuisine à ses patrons.
— « Qu'avez-vous fait de votre enfant ? » lui dit à brûle pourpoint le chef Roue.
La domestique devint pâle et baissa la tête sans répondre.
Elle resta ainsi prostrée durant 15 minutes. .enfin, faisant un effort, elle murmura :
— « Il est là-haut, dans la malle ! »
A sa suite, les gendarmes montèrent l'étroit escalier de bois conduisant au grenier.
La bonne avait dit vrai.
Le cadavre était là en complet état de décomposition.
Françoise Jaouen fut conduite aussitôt à la caserne de gendarmerie,
où elle compléta sa confession.
Le bébé était venu mort au monde.
Avant de reprendre ses occupations journalières, elle avait enfoui le cadavre dans la malle, où il devait séjourner 17 Jours.
La fille-mère attendait que ses forces fussent revenues pour enterrer le petit corps quelque part dans un champ.
Françoise Jaouen eut soin d'innocenter ses patrons.
Le père et le fils Pluchon protestèrent énergiquement de leur innocence.
A aucun moment ils n'avaient remarqué l'état de leur domestique.
Au surplus le fils nia avoir flirté avec sa cousine.
Une confrontation des trois personnages eut lieu à 10 h, 30.
Chacun resta sur ses positions.
A midi, le fils Pluchon, escorté d'un gendarme retournait à la ferme pour soigner les bêtes.
Quelques instants plus tard, Yves Pluchon, père, regagnait également son habitation.
LE PARQUET SUR LES LIEUX A 14 h. 30
Le Parquet de Brest, composé de M, Bourriel, procureur de la République; M. de Lapeyre Juge d'instruction accompagnés de M. Lang capitaine de gendarmerie;
M. le docteur Mignard, médecin-légiste et M. Le Gall, secrétaire du Parquet
arrivait sur les lieux.
Tandis que le médecin légiste procédait à l'autopsie du nouveau-né
les magistrats interrogeaient la fille Jaouen et ses patrons.
Un peu avant 17 heures, M. le docteur Mignard faisait connaître le résultat
de sa macabre opération.
L'enfant du sexe féminin n'avait pas vécu.
En conséquence Françoise Jaouen qui, déjà en 1920 avait été mêlée
à une histoire identique, sera poursuivie devant le Tribunal correctionnel pour suppression d'enfant. *
Le Parquet a regagné Brest à 17 h. 30.
La demoiselle Jaouen, le soir, a pu rentrer chez ses patrons.
* Presse de 1920
La Dépêche de Brest - 19 Janvier 1936
Ploudalmézeau
SUPPRESSION D'ENFANT
LE PARQUET SE TRANSPORTE SUR LES LIEUX
La gendarmerie de Ploudalmézeau était avisée, avant-hier, qu'une jeune fille, employée dans une exploitation proche du bourg, avait mis au monde un enfant
dans des conditions restées mystérieuses.
Le maréchal-des-logis chef Roué, chef de la brigade, assisté du gendarme Grannec,
se livra à une enquête.
Il se rendit à la ferme de Kerarch-Ouézan, située sur la route de Portsall
et fut bientôt édifié.
Cette ferme est gérée par MM. Pluchon, père et fils, l'un veuf, l'autre célibataire.
Ils ont à leur service, depuis assez longtemps déjà, une bonne,
Françoise Jaouen, âgée de 39 ans.
Pressée de questions, celle-ci déclara qu'en effet elle avait mis au monde,
un enfant mort-né dans la nuit du 30 au 31 décembre.
Personne ne la seconda.
Le matin venu, ayant dissimulé le petit corps dans son lit,
elle se rendit aux étables pour soigner les bêtes, comme à l'habitude.
Quelques heures plus tard, elle vint en cachette chercher le petit cadavre
et l'enfouit dans une malle enfermée dans une chambre inutilisée.
C'est là, en effet, que fut découvert le corps.
Devant ces faits, le maréchal-des-logis chef Roué avisa le capitaine Lang,
commandant la gendarmerie, et le parquet de Brest.
Descente de justice
A 14 h. 45, arrivaient à la ferme de Kerarch'-Ouézan, les magistrats du parquet de Brest, qu'attendaient de nombreux curieux.
Aux côtés de M. Bouriel. procureur de la République, on remarquait MM. de Lapeyre,
juge d'instruction et Le Gall, greffier.
Les magistrats étaient accompagnés du capitaine Lang.
Bientôt après arrivait également M. le docteur Mignard, médecin-légiste.
Françoise Jaouen renouvela ses précédentes déclarations et l'autopsie pratiquée,
par M. Mignard, en confirmait le point principal.
On se trouvait, en effet, en présence d'un enfant mort-né du sexe féminin.
Il ne s'agissait plus dès lors que du délit de suppression d'enfant, puisque la déclaration légale n'avait pas été faite à l'état-civil.
Cette affaire ne sera évoquée qu'en correctionnelle, après sa complète instruction.