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1940

Brest en 1900

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Source : La Dépêche de Brest 27 décembre 1940

 

La saison théâtrale dure six mois, du 1er octobre à fin mars.

Les abonnements sont de 21 francs par mois aux fauteuils et loges de première galerie ;

13 francs aux stalles de première, de parquet et deuxième galerie.

Les prix au bureau sont ainsi fixés :

fauteuils, loges de première, fauteuils de balcon et baignoires grillées, 3 fr. 50 ;

stalles de première, parquet, deuxième galerie, 2 fr. 25 ;

secondes, 1 franc ;

troisièmes, 0 fr. 50.

 

La campagne 1899-1900 (direction Gourdon) n'a été ni très brillante ni fructueuse.

Il est vrai que le casino brestois concurrence le théâtre et que la subvention municipale de 42.000 francs est assez faible, comparativement aux sacrifices que font d'autres villes de même importance, telle Toulon qui octroie 75.000 francs.

 

C'est M. Peronnet qui prend la direction en octobre 1900.

Il nous arrive avec une troupe qui obtiendra les faveurs du public à ses premiers débuts :

Mmes van Hoff, première chanteuse légère, et Bonvoisin, première dugazon ;

MM. Lesbros, premier ténor ;

Chéret, baryton ;

Cailiol, première basse ;

Martini, grand premier rôle.

 

Comme de coutume, la première représentation est Faust.

Puis on joue, au cours de cette saison :

Galattrée, Charles VI, Don Pasquale, Gillette de Narbonne, Haydée, La Juive, l'Attaque du Moulin, Le Trouvère, Le Rédempteur, Mignon, Guillaume Tell, Lakmé, Le Roi d'Ys, Manon, La Traviata, Hamlet, Le Tribut de Lamora, etc..

 

La Dame Blanche n'est donnée qu'une seule fois et ne fait plus recette.

Des messieurs grisonnants, des dames d'un certain âge sont venus pour revivre quelques heures de leur prime jeunesse.

 

Plusieurs opéras-comiques nouveaux n'avaient jamais été joués sur notre scène :

Véronique, de Messager ;

Cendrillon, de Massenet ;

Les Saltimbanques, de Louis Ganne.

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Dans le domaine du drame, la direction a monté Napoléon, en 5 actes et 9 tableaux, qui est toute l'épopée napoléonienne, de Iéna à Sainte-Hélène ;

mais ce qui fait toujours recette, ce sont les vieux mélos :

les Deux Gosses, le Courrier de Lyon, Marceau ou les enfants de la République, le Juif Errant, la Grâce de Dieu, l'opérette féérie Ali-Baba ou les quarante voleurs.

 

Il y a foule au théâtre, tous les dimanches après-midi, aux matinées à prix réduits qui ne finissent guère qu'à six heures où déjà on s'empresse aux guichets pour la représentation du soir qui offre toujours un spectacle des plus copieux, tels, par exemple :

Guillaume Tell et le Courrier de Lyon ou Manon et les Deux Gosses.

 

Le public du paradis est parfois surexcité, ces dimanches soirs, avant le lever du rideau.

De braves gens, en manches de chemise (il fait si chaud), s'interpellent des galeries au parquet ;

des coups de sifflet stridents déchirent l'air ;

quelques jeunes spectateurs, le buste en dehors des secondes galeries, semblent méditer de gigantesques sauts périlleux pour atteindre la scène, par-dessus les tûtes grouillantes du parterre et des fauteuils d'orchestre.

 

Tandis que, calmes et dignes, les occupants des loges semblent, par un maintien solennel, protester contre une gaieté si violemment manifestée, d'aigres glapissements d'enfants strient parfois le tumulte, de même que les sons aigus de la petite flûte dominent le fracas d'un orchestre déchaîné qui accorde ses instruments.

 

Mais les trois coups retentissent ;

le chef d'orchestre a levé son bâton et le geste, impatiemment attendu, apaise la rumeur populaire.

 

Il est sept heures et demie ;

le spectacle ne se terminera qu'à une heure le lendemain matin.

La vieille marchande d'oranges aura eu le temps de vendre tout son panier aux entractes.

Les bonnes oranges de Valence ! C'est toujours la louche qui les vend !

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Le casino brestois, de la rue de Siam est dirigé par Mlle Henriette Paulus, fille du célèbre chanteur populaire :

MM. Fargeon et Morlay.

En dehors des vedettes et attractions de music-hall, on y joue des comédies, des vaudevilles et des opérettes.

L’orchestre, sous la direction du maestro Helmer comporte seize musiciens.

 

Le prix des places est modique :

1ères galeries, 1 fr. ;

parterre, 0.75 ;

2es galeries, 0,50 ;

enfants, 0,25 à toutes les places.

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Le programme change toutes les semaines.

C'est l'époque où on applaudit les douces et mélancoliques mélodies de Paul Delmet ;

J'suis pocharde, le grand succès d'Yvette Guilbert ;

les refrains de pierreuses (*) : Mon Homme ! À Batignolles ;

les scies à la mode : Ma Gigolette ! Ous'qu'est Joséphine ? ;

les vieilles chansons : La femme du roulier, les Matelots de Groix ;

les romances qui semblent émaner à la fois de la nature et de l'âme française :

Le temps des cerises, la chanson des blés d'or et la Chanson des peupliers.

(*) « Les pierreuses étaient des prostituées du dernier rayon qui racolaient dans les terrains vagues ou les chantiers de construction. »

 

La diva Rosalba est très fêtée dans son répertoire de Thérésa et ne peut quitter la scène sans avoir chanté La marche de l'infanterie de marine, reprise en chœur par tous les marsouins.

Mlle Dayelle triomphe avec Le salut aux Boers, hymne enflammé du plus pur sentiment d'admiration pour ces vaillants champions de la liberté.

 

Et Paulus vient cette année à Brest.

Il est acclamé.

Le Père la Victoire, En r'venant d' la r'vue, Si la Garonne avait voulu, qui furent ses premiers succès, en 1886, au concert « La Pépinière », enlèvent la salle jusqu'aux limites où l'enthousiasme confine à la folie.

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Dès la clôture du théâtre, c'est-à-dire le dimanche de Pâques, le Théâtre nantais vient s'établir, pendant six mois, sur la place de la Liberté.

 

D'autres grandes baraques foraines y viennent monter leurs tentes :

les cirques Bureau et Vasserot, le théâtre-salon Gallici-Rancy et ses tableaux vivants, le cirque des singes, le musée national ;

l'hippodrome algérien, où chacun peut se livrer au plaisir de l'équitation ou connaître les folles cabrioles d'un âne indomptable qui ne manque jamais de démonter ses cavaliers.

 

(À suivre)

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