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1896

Lettres inédites
de Levot

Article 2 sur 3

 

 

Source : La Dépêche de Brest 24 août 1896

 

Nous avons commencé dans notre numéro du lundi 10 août la publication d'une série de lettres de Levot, l'historien de Brest.

Voici la suite de cette intéressante correspondance, que nous terminerons prochainement :

 

Brest, le 26 juillet 1859.

 

Cher monsieur et ami,

 

Le moment approche où M. Pilven ira vous porter le complément d'Ollivier ;

mais, je crains qu'il ne vous apporte que cela.

Malgré une lettre de rappel à Nantes, je n'en reçois rien, et je crains fort que le retard ne vienne des obstacles apportés par l'état de la santé de M. de la Jariette.

J'écrirai encore et ferai tout ce que je pourrai afin d'avoir, avant le 8 août, ce que vous désirez.

Mon envoi contiendra, si vous ne l'avez pas, un récit minutieusement détaillé du voyage du comte d'Artois et de l'empereur Joseph, à Brest, en 1777.

Je dis si vous ne l'avez pas, et je crois que vous l'avez.

Il suffit de vous reporter au tome 2e de la Revue bretonne et maritime, formant la 2e série d'un recueil dont j'ai en partie dirigé la publication ici.

Le ministère avait souscrit, je crois, pour sa bibliothèque.

Le corps du récit est extrait d'un manuscrit du temps, appartenant à M. du Chatellier ;

les annotations que j'y ai jointes sont extraites du compte rendu officiel rédigé à Brest.

Ainsi, ils se complètent l'un par l'autre.

Je viens de vérifier.

La bibliothèque du ministère de la marine possède la Revue bretonne (numéros 17,000-2,045).

S'il advenait que la série bretonne et maritime, formant deux volumes, ne fût pas dans les domaines de M. de Courtière, je vous ferais passer mon exemplaire par M. Pilven.

 

À lire sur Retro29.fr : 1927 - La visite du comte d'Artois à Brest en 1777 par Ollivier Lodel – Cliquer ici

Le comte d’Artois,

huile sur toile de Henri-Pierre Danloux

vers 1796

 

Si vous voulez qu'il puisse vous rapporter votre dossier Gordon, il est grandement temps que l'ami Dodin me le fasse parvenir.

 

Merci de votre lettre de M. de Roquefeuil du 3 décembre 1762.

Je ne la connaissais pas.

À plus tard les recherches contenant le spectacle.

Ne vous préoccupez pas de l'envoi de la vue de la rade ni de celle de la ville jusqu'à ce que M. Pilven ait vu le tout ;

il fera en sorte qu'aucun déplacement n'ait lieu.

 

Vous ne vous êtes pas trompé.

Le portrait de Mme de la Pérouse la représente les cheveux poudrés, une fleur à la poitrine, et en vêtements de couleur.

M. Bernier est absent, et Dieu sait quand il reviendra.

Il a acheté voiture et cheval, et en compagnie de son frère, amateur passionné de peinture, il explore nos campagnes, photographiant tous les objets d'art (inédits généralement) qu'il peut découvrir dans nos églises, manoirs féodaux, chaumières, etc.

On est absolument sans nouvelles de lui, et nous n'espérons pas qu'il soit ici assez à temps pour que M. Pilven puisse emporter les deux épreuves.

 

Avez-vous un portrait de la Pérouse ?

M. Ollivier en a un dont il est très satisfait et qu'il met à votre disposition.

Sur votre réponse, M. Pilven le mettra dans sa malle.

 

Tout à vous de cœur

 

P. LEVOT.

 

*

**

 

Brest, le 16 novembre 1859.

 

Cher monsieur et ami,

 

Dans une de vos précédentes, vous m'annoncez l'intention d'aller faire une perquisition à la bibliothèque pour y chercher des documents concernant Brest, que vous présumez exister dans un fonds que je ne dois pas avoir consulté.

Je n'ai recouru qu'au fonds Colbert.

Toutefois, si les documents dont il s'agit avaient une certaine importance, il vaudrait mieux, avant que vous fissiez aucune transcription, m'en donner une indication sommaire pour prévenir, le cas échéant, un travail en pure perte.

Chacun de nous doit être avare de son temps ;

ne le ménageons pas, je le veux bien, dans notre intérêt réciproque, mais ne le consumons pas en pure perte.

 

À propos, en quoi consistaient les deux horions que vous avez eu à supporter, par contre-coup, au sujet des fortifications de Brest ?

En quoi avez-vous été exposé à partager ma mauvaise fortune ?

Je désirerais bien le savoir.

Non ignara mali, etc.

 

Votre bien dévoué, P. LEVOT.

​​

 

Brest, le 6 décembre 1859.

 

Cher monsieur et excellent ami,

 

Je sors de chez le commandant de la Pérouse, avec lequel j'ai examiné, votre lettre en main, le portrait de Mme de la Pérouse, où les cheveux roulés sur eux-mêmes regagnent effectivement la nuque, les boucles retombent sur les épaules.

La boucle de l'épaule gauche déborde des deux côtés ;

celle de l'épaule droite, non roulée sur elle-même, a moins de développement.

À cette occasion, M. de la Pérouse m'a dit qu'un de ses cousins, possesseur d'une miniature de Mme de la Pérouse, devait aller vous la montrer, et qu'il était surpris qu'il ne l'eût pas encore fait.

Si vous savez sa demeure, réparez cette omission ;

vous aurez ainsi un moyen de contrôle.

 

Je regrette fort que vous n'ayez pas été mieux servi.

Quant à la photographie non coloriée, M. Bernier désespérait de réussir, en raison de l'état du tableau, et il n'a cédé qu'à des instances réitérées, tant il avait conscience de l'insuccès.

Je ne crois pas qu'un autre eût pu mieux faire, puisqu'il a échoué.

 

Je n'ai pas le précieux document que vous m'indiquez comme existant dans le Colbert, supplément français 3012, et portant pour titre :

« Relation de ce qu'il (Seignelay) a fait et vu pendant son voyage à Rochefort et à Brest en 1672. »

 

Vous me dites que vous, allez faire la dernière étude de votre volume intitulé :

Découvreurs et Pionniers.

Si j'ai bonne mémoire, ce volume doit comprendre, entre autres personnages, La Salle, Iberville, les Rozilly, Cartier, Champlain, etc.

Fasse le Ciel qu'il en soit ainsi !

Votre ardeur de consciencieuse investigation élucidera bien des faits et rectifiera bien des erreurs. Quelques-uns de ces personnages ont fait le sujet d'articles que j'ai insérés dans la nouvelle biographie générale des Didot ;

mais, réduit aux documents publics et dépourvu des documents authentiques, j'ai dû m'en référer aux traditions connues et commettre, sans aucun doute, maintes erreurs que vous rectifierez.

J'ai été plus exact pour Freycinet, Dumont d'Urville, Entre-casteaux, etc., parce que là les preuves abondaient, je ne renonce pas à l'idée de réunir ces articles et d'y joindre quelques nouveaux, de manière à faire une publication ainsi divisée :

 

I. — Marine jusqu'au règne de Louis XIV.

II. — Marine depuis le règne de Louis XIV jusqu'à nos jours.

III. — Notabilités, scientifiques de la marine.

 

Pour la première partie, je ne suis pas satisfait :

J'ai des lacunes, et crains de voguer parfois au hasard.

Pour la seconde et la troisième, je suis plus en mesure d'être exact.

 

Si les personnages que je vous ai indiqués, La Salle, etc., etc., entrent dans votre plan (ce que je souhaite fort), je modifierai facilement le mien.

Veuillez me le dire.

Je ne pense pas avoir rien qui puisse vous servir ; toutefois, s'il en était ainsi, ce serait avec bien du plaisir que je verrais qu'il en fût ainsi.

 

Quand j'écrirai à Saint-Georges, je lui adresserai vos remerciements avec prière de les remettre à M. de la Jarriette.

 

Votre bien dévoué,

 

P. LEVOT.

 

Brest le 6 mars 1860.

 

Cher monsieur et ami

 

Vous avez dû recevoir, ou vous recevrez au premier jour, la visite d'un de mes amis M. du Chatellier, que sa qualité de membre correspondant de l'Institut retient à Paris une partie de l'hiver et qui doit avoir plus de loisirs.

Ayant su par mon neveu, M. Moynet que vous n'en aviez guères, je me suis fait un cas de conscience de contribuer à retarder l'achèvement de vos travaux.

Impatient de les voir paraître, j'ai pensé que M. du Chatellier pourrait vous suppléer dans la transcription du Mémoire de Seignelay de 1672, et je lui ai indiqué, à toutes fins, les moyens de le trouver pour qu'il puisse me les transmettre le plus tôt qu'il pourra, ce qui me fera plaisir, attendu que je commence à en avoir un besoin sérieux.

Je ne sais ce qui aura été dit dans votre entrevue ; mais s'il n’avait pas été convenu qu'il se chargerait de cette transcription, remettez-lui-en le soin par un billet à son adresse, rue Saint-Hyacinthe Saint-Honoré, 8.

 

Vous devez avoir de bonnes notes sur Renau, le créateur des galiotes à bombes.

Ici notre correspondance administrative contient certains détails que j'extrairai et vous ferai parvenir si vous pensez qu'ils puissent vous intéresser et rentrer, comme je le présume, dans la série de travaux en vue desquels vous avez réuni des matériaux.

 

Pour le moment, je n'ai rien autre chose à vous dire, sinon que je vous souhaite santé et loisir en quantité telle que la Pérouse et vos Pionniers puissent se montrer bientôt au grand jour.

 

Votre bien dévoué,

 

P. LEVOT.

 

Brest, le 14 août 1860.

 

Monsieur et bien bon ami,

 

Merci de la communication de la note ci-jointe qui ajoute aux nombreux détails que j'avais déjà sur le passage de Jacques II à Brest.

J'ai souligné quelques mots qui me semblent douteux.

Ainsi de Vadri. Ne faudrait-il pas lire d'escadre ?

De même pour Trumeleston, Porter, Pouscel (Roussel ou Russel ?)

Jacques II

Roi d’Angleterre et d’Irlande

 

Je vous connais assez pour savoir que, placé entre le désir de me rendre service et l'impossibilité matérielle de le faire, vous en étiez contrarié.

Il y a six semaines, ou deux mois, que je le disais à M. d'Avezac.

Non, votre bonne volonté ne m'est pas suspecte, pas plus que ne vous serait la mienne si je ne pouvais vous procurer quelque document qui vous fût utile.

S'il ne s'agissait que d'attendre jusqu'à ce que vous puissiez disposer de quelque moment de loisir, je le ferais ;

mais je viens de prononcer un mot que vous ne connaissez guère, et les obstacles, loin de disparaître, s'accroîtront encore.

Tel est le sort de ceux qui se vouent à ces interminables recherches préparatoires qui nous absorbent l'un et l'autre.

Il est essentiel, néanmoins, que j'aie la relation de Seignelay qui, vraisemblablement, comblera une lacune importante de mon travail.

 

Mais comment faire ?

Connaissez-vous quelqu'un apte à faire la transcription de cette relation ?

Si vous avez ou l'occasion d'employer un copiste intelligent, soyez assez bon pour le charger de transcrire la partie, exclusivement relative à Brest, du manuscrit de Seignelay existant dans le Colbert, supplément français 3,012, sous le titre :

Relation de ce qu'il a fait et vu pendant son voyage à Rochefort et à Brest (1672).

La copie faite me serait transmise, soit par la poste, soit par M. d'Avezac, qui la ferait mettre dans une caisse d'envoi de livres.

Toutefois, la première voie serait préférable.

Si vous ne connaissiez personne, je verrais à me pourvoir.

Ce qui m'embarrasse en ce moment, c'est que mon ami Le Jean est en Égypte, où il semble devoir prolonger son séjour, et à défaut de vous, il n'y a guère que lui que je puisse charger de me trouver un copiste.

 

J'aurais voulu ne pas vous parler d'un événement qui doit vous préoccuper, la démission de M. votre frère ;

mais me taire m'exposerait à ce que vous me crussiez indifférent à ce qui vous concerne, et Dieu sait s'il en est ainsi !

L'étude ! L'étude !

Voilà le consolateur le plus efficace de nos tribulations.

 

Votre bien dévoué et affectionné,

 

P. LEVOT.

À lire sur Retro29.fr : 1872 - Guillaume Lejean, explorateur breton – Cliquer ici

Guillaume Lejean

 

Brest, le 29 avril 1861.

 

Cher monsieur et ami.

 

Voilà bien longtemps que je ne vous ai écrit, et bien longtemps cependant que j'en ai le désir.

Depuis quatre mois j'ai été dans un état de torpeur que je cherchais à secouer ;

j'y parvenais momentanément, et ne tardais pas à retomber dans mon anéantissement.

Il y a eu hier quatre mois que j'ai perdu celle qui avait pendant trente-cinq ans partagé mes rares moments de joie et, plus encore, les douleurs causées par la mort successive de nos enfants.

Les circonstances qui ont accompagné la catastrophe ont ajoute à son amertume ;

à mon réveil, le 28, je trouvai ma femme sans connaissance et frappée depuis deux heures d'une congestion séreuse qu'on ne pouvait plus combattre ;

et douze heures après, elle avait cessé de vivre.

 

La soudaineté du coup, le vide affreux qui se faisait près de moi, l'isolement auquel j'étais condamné, après avoir toujours vécu de la vie intérieure, m'ont jeté dans un accablement d'où je n'ai pu me relever que quand il m'a été possible de me remettre au travail.

Les premières tentatives ont été bien pénibles :

Aujourd'hui, je reconnais que cette diversion est la seule efficace, et j'y puise un motif de redoubler d'ardeur.

Le pourrai-je supporter ?

Je ne sais, mais qu'importe ?

Si je succombe, du moins aurai-je pallié mes derniers moments.

 

C'est sans doute pour apporter sa part de diversion à mon chagrin que notre société a publié mon récit du procès Gordon, que j'avais lu l'an dernier.

 

À lire sur Retro29.fr : 1927 - L’espion Alexandre Gordon Warhouse à Brest en 1769 par Ollivier Lodel – Cliquer ici

 

Elle m'a ainsi obligé à ne pas me replier sur moi-même, et je ne puis que lui savoir gré de ses intentions et du résultat qu'elles ont produit, car je sens que de nouveaux travaux pourront me soulager.

En même temps que cette lettre, vous recevrez un exemplaire de ma brochure.

Cet hommage n'acquitte que bien imparfaitement la dette de reconnaissance que m'ont imposée et votre obligeance à me communiquer toutes les pièces de cette affaire et le généreux abandon des notes que vous aviez vous-même recueillies.

Refuge Royal

À lire sur Wiki-Brest – Le Refuge Royal - Cliquer ici

Je ne sais si vos archives contiendraient quelque indication de l'origine de la Madeleine ou Refuge royal de la marine, qui fut incendié vers 1786.

Cette maison, qui était tout à la fois une maison de retraite et un pénitencier, a dû être fondée de 1667 à 1672.

Mais par qui l'a-t-elle été ?

Fut-ce par la marine ou par des particuliers.

Je ne sais.

Mais ce qui est certain, c'est qu'en 1684 elle était dirigée par l'intendant de la marine, et qu'elle le fut toujours depuis.

Je tiendrais d'autant plus à éclaircir la question d'origine que cet établissement est à peu près le seul sur le début duquel je ne peux pas m'expliquer d'une manière satisfaisante.

Vers 1702, M. l'intendant de Louvigny a dû dresser une statistique du port.

Si cette statistique se retrouvait, elle fournirait peut-être la solution de la difficulté.

 

Sachant combien il importe que vous ne soyez pas vous même détourné de vos travaux, je n'ose vous prier de vous livrer aux recherches que demande cette solution ;

mais peut-être M. de Branges qui, lui aussi, est si obligeant, pourrait-il vous suppléer.

 

Donnez-moi de vos nouvelles, parlez-moi de vos travaux, dites-moi surtout si une perspective plus consolante s'offre à vous.

J'ai besoin de savoir les autres heureux.

 

Rappelez-moi, je vous prie, au bon souvenir de MM. d'Avezac, Jal, de Branges, de Courtières, et croyez à la sincère et durable affection de

 

Votre bien dévoué,

P. LEVOT.

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